INTERVIEW

ASSAUT (L')

© Mars Distribution

L'ASSAUT


Julien Leclercq et Vincent Elbaz

réalisateur et acteur


Le 3 février 2011 a eu lieu la présentation à la presse lyonnaise de « L’Assaut », deuxième film du réalisateur Julien Leclercq, qui est venu accompagné de son acteur principal Vincent Elbaz. Cela tombe bien : le 3 février 2011, c’est aussi le jour des 40 ans de l’acteur. Alors bon anniversaire Vincent !



Réalité. Les événements relatés dans « L’Assaut » sont survenus en Algérie et en France pendant les fêtes de Noël 1994. Les occupants d’un avion en partance pour la France sont pris en otage. L’assaut par le GIGN sera suivi en direct à la télévision.

Julien Leclercq :
Avec mon co-scénariste, pendant les six premiers mois de l’écriture, nous avons fait un gros travail de journalisme. Nous avons recherché toutes les infos et interviewé toutes les personnes liées aux événements : les membres du GIGN qui sont entrés dans l’avion, des otages du vol Alger-Paris, des membres du Ministère, le commandant de bord… Notre objectif avec toute cette matière était de s’en détacher, pour ne pas en faire un documentaire. Mais tout ce que nous racontons est vrai. Nous avons d’ailleurs fabriqué le film avec le GIGN, tourné chez eux et dans le même avion que celui de l’époque. Enfin, nous nous sommes appuyés sur les retranscriptions audio entre les terroristes et la tour de contrôle de l’aéroport, pour que tous les dialogues collent à la réalité.

Le roman. Suite aux événements, Roland Môntins, membre du GIGN intervenu sur cette opération, a écrit « L’Assaut », paru aux éditions De Riaux en 2007.

Julien Leclercq :
C’est le livre de Roland Môntins qui m’a donné envie de faire un film sur cet événement. Je l’ai lu il y a trois ans, en une nuit, j’étais à Los Angeles et je devais faire un film américain. Mais quand on réfléchit à son prochain projet et qu’on lit ce livre, on se dit qu’il se passe quelque chose. J’ai donc foncé sur ce projet et, surtout, je n’avais pas envie que quelqu’un d’autre le fasse !
Le livre n’est qu’un point de vue d’un des membres du GIGN. Or, je voulais aussi montrer l’envers de cet assaut : comment les terroristes sont arrivés à l’aéroport, ce qui se passait dans l’avion et dans les Ministères. Je voulais que mon film montre l’envers des images qui ont été vues en direct par 21 millions de téléspectateurs : l’assaut du GIGN avec ces trois passerelles.

Vincent Elbaz :
Je n’ai lu le livre que pendant mes entraînements au GIGN. Ce témoignage m’a touché, c’est un vrai drame humain. A la télé, on voyait ces passerelles, ces hommes cagoulés entrer dans l’avion, ces grenades exploser. Et on ne savait absolument pas ce qui se passait dans l’avion… Ce qui m’a intéressé dans le projet de Julien, c’est d’abord découvrir ce qui s’est réellement déroulé avant et pendant l’assaut du GIGN, dont les images nous ont tous marqués.

Thierry et le GIGN. « L’Assaut » ne parle pas d’un homme mais d’une famille, qui est le groupement d’intervention de la gendarmerie nationale.

Vincent Elbaz :
Je ne pouvais pas considérer Thierry comme un héros, même si de mon point de vue, je trouve son geste héroïque. Je ne pouvais pas jouer un concept, j’avais besoin de me raccrocher à des choses plus concrètes, moins héroïques. Thierry a une famille, un métier, certes un peu particulier, mais un métier qui s’apprend comme tant d’autres.

Julien Leclercq :
J’ai passé beaucoup de temps avec Thierry pendant l’écriture. Mon co-scénariste et moi avons écrit le script pendant deux ans, nous sommes régulièrement allés voir le GIGN pour parler avec eux, parler de l’assaut. Cela nous a pris du temps parce que la cellule est finalement très cloisonnée, et il fallu se faire accepter…

Vincent Elbaz :
Mais ce n’est pas un film sur la vie privée de Thierry. L’histoire parle de ces hommes de terrain et d’action qui en voient toute la journée et qui, une fois à la maison, sont dans un creux. Ils rament pour parler avec leurs enfants. Le personnage de l’épouse, jouée par Marie Guillard, est là pour balancer cette émotion des proches qui vivent dans l’attente, la peur, et elle, pour le coup, vit l’événement en direct à la télé…

Julien Leclercq :
C’est la première fois que les femmes assistent à la démonstration du travail de leur mari dans ces conditions, alors qu’elles sont normalement à l’abri de tout, parce que rien ne filtre. Dans cette affaire, ça a été d’une violence absolue.
Il y a d’ailleurs eu un gros nœud quand les épouses ont vu mon film. Ça a été compliqué même pour certains membres du GIGN.

Vincent Elbaz :
Ils étaient minés ! Au fond de moi, je suis content de voir l’émotion de ces grands gaillards d’un mètre quatre-vingt-dix : ça me fait plaisir ! Thierry a vu le film avec beaucoup d’émotion. Ça a été une projection assez physique pour lui !

Terreur. Ils sont quatre terroristes du GIA, le Groupe islamique armé, à prendre en otage un avion d’Air France et ses 250 passagers.

Julien Leclercq :
On a vu une centaine de jeunes acteurs pour jouer ces terroristes. Il y a d’ailleurs une vraie génération de comédiens avec un super niveau. Aymen Saïdi [qui joue le chef de la bande] a un truc, alors que si vous le croisez dans la vie, c’est un enfant, tout petit, tout chétif, introverti ! C’était impressionnant de le voir jouer. Il a scotché tout le monde dès la première prière, c’est un putain d’acteur ! Il a beaucoup travaillé le débit de phrase de Yahia grâce aux enregistrements audio. Au festival de Sarlat, il a même eu le prix d’interprétation. C’est un super comédien, je pense qu’on en entendra parler.

Vincent Elbaz :
Chems Dahmani est exceptionnel aussi. Il ne voulait pas me parler au début. On se croisait mais il avait besoin d’aller trouver cette haine au fond de lui pour jouer, alors il m’évitait, bien qu’en fait il mourrait d’envie qu’on se parle.
Ils ont tous les quatre réussi à capter cette part de violence et de détermination dans cet acte fou, prendre des innocents en otage. Ils ont réussi à camper des êtres humains, tout en agissant de manière inhumaine.

A venir. Julien Leclercq nous parle de ses projets futurs.

Julien Leclercq :
Mon prochain film sera « L’aviseur », écrit par Abdel Raouf Dafri (auteur des scénarios de « Mesrine » et « Un Prophète »), une histoire de narcotrafiquants sur le détroit de Gibraltar, basée sur des faits réels. Mes trois prochains films sont d’ailleurs des histoires vraies. Les extra-terrestres, ce sera pour plus tard !

Vincent Elbaz :
Le jour où il fera un film sur les extra-terrestres, c’est donc qu’ils seront là !!

Propos recueillis par Mathieu Payan
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