© 20th Century Fox France
Avant de jouer devant des centaines de milliers de spectateurs comme lors du Live Aid de 1985, le groupe Queen a connu une destinée hors du commun, de sa fondation avec son fantasque chanteur Freddie Mercury, à des succès planétaires, en passant par des expérimentations qui ne plaisaient pas à tous les producteurs ni à la presse, mais ont emporté l’adhésion du public et marqué l’histoire de la musique...
Le fait que le film ait été absent des line-up des gros Festival de la rentrée (Venise, Toronto, San Sebastian) faisait forcément planer le doute sur la qualité de l’un des plus importants films de cette automne, puisque dédié au groupe légendaire Queen. Pourtant, quelques semaines plus tard, le résultat est bien là, entouré d’une attente indicible, provoquant frissons pour ceux qui ont connu cette époque, donnant envie de chanter haut et fort, et permettant tout au moins de remettre en place quelques jalons quant au parcours de ce groupe hors du commun.
Bien sûr le scénario prend quelques petites libertés avec la réalité, histoire de ne pas omettre certaines facettes du lead singer, ou de créer un peu plus de suspense, mais elles sont, à vrai dire minimes. Ici Freddie Mercury apprend ici sa séropositivité avant le concert de 86 et non après, et surtout le groupe se sépare, alors que cela n’a jamais été vraiment le cas, freddy Mercury ayant travaillé sur son premier album solo en parallèle de la gestation de l’album du groupe intitulé The Works, qui donna quelques uns de leurs plus gros tubes : Radio Gaga ou I want to break free, par exemple.
Le fait que le film évoque, sans les approfondir, certains aspects de la vie privée du chanteur, de sa vie hétéro avec sa femme qui deviendra son amie fidèle, à sa vie homosexuelle, sous l’influence initiale de Paul, manager devenu amant, est finalement plutôt bienvenu, attisant la curiosité tout en ancrant le film côté grand public. Et même si certains y verront là une forme de règlement de compte de la part des deux musiciens restants, cet aspect reste suffisamment élusif pour laisser place à de nombreuses interprétation, Freddie Mercury n’ayant jamais été particulièrement expansif sur sa vie privée, malgré ses aspects transgressifs parfaitement assumés dans les vidéos clips de Queen.
Aspect essentiel du film, il faut bien évidemment souligner, la qualité de l’interprétation d’un Rami Malek à la prothèse dentaire impressionnante. Rejouant au geste près le concert de Wembley (Live Aid), celui qui s’est affirmé dans la série "Mr Robot", incarne toutes les facettes d’un créateur de génie nécessitant une remise en question permanente de ses choix. A noter également l’incroyable ressemblance des autres membres du groupe, principalement celle de l’acteur interprétant Brian May (Gwilym Lee, acteur de séries télé), qui marque le film de l’empreinte de plusieurs époques (rock progressif, punk, funk…) autant que les costumes ou les coiffures adoptées.
Mais l’une des forces du film est aussi de créer d’emblée une connivence avec le spectateur, créant ainsi un parallèle évident avec la relation d’amour entretenue par le groupe avec le public. En ouvrant le film sur l’arrivée devant le public à Wembley et en terminant en temps réel sur les vingt minutes de la prestation au Live Aid, Brian Singer construit un biopic certaine sagement chronologique, mais encapsulé dans un moment de communion avec le public, d’une force rarement égalée. Une parabole parfaite sur l’amour d’un public, qui une fois assis dans la salle, ne la quittera pas avant la fin du générique, où il pourra entendre la dernière chanson du dernier album du vivant de Mercury, évidemment testamentaire : "The show must go on".
CONTRE : Niveau 0 - Queen Mercury
"Bohemian Rhapsody" brosse en un peu plus de deux heures, quinze ans de la carrière de l’emblématique groupe de rock Queen et de leur leader Freddie Mercury. Avouons que la tâche n’est pas aisée. Mais plus qu’une histoire du groupe c’est avant tout celle de Freddie Mercury qui est mise en avant et sert de véritable fil conducteur. Cependant, à vouloir traiter autant de temps, le risque est de survoler le sujet. Ainsi l’ensemble reste bloqué dans la norme du biopic en ne rentrant que rarement dans le détail et la construction des personnages. On se contente de rester en surface de Freddie Mercury et tout semble balisé (avec les poncifs usuels). Le tout est là pour renforcer un mythe Mercury beaucoup trop lisse, le film ne sondant que rarement les zones d’ombres du chanteur. De plus sa créativité est mise uniquement en avant lors d’un long passage consacré à la création et à la sortie de leur titre : Bohemian Rhapsody. Pour le reste des chansons, il faudra repasser, même si sont rapidement évoquées les créations de We Will rock you et Another one bites the dust.
En terminant par la participation de Queen au concert Live Aid, moment de bravoure ultime (le seul du film), qui montre la communion d’un groupe mais surtout d’un homme, d’un showman, avec son public, on est dans du quasi fan service, en nous projetant au cœur de la scène pour l’un des concerts les plus mythique de l’Histoire.
Côté casting, Rami Malek pousse la ressemblance physique avec Freddie Mercury assez loin (comme le casting pour les autres membres du groupe) et si l’interprétation s’avère plutôt bonne, il n’en est pas de même du scénario ou de la mise en scène. La réalisation n’emporte jamais le morceau si ce n’est à de rares occasions comme lors du final. Il faut rappeler que Bryan Singer a été évincé de la réalisation et remplacé par Dexter Fletcher à la fin du tournage (Bryan Singer reste crédité au générique en tant que réalisateur). Mais cet incident ne saurait constituer une excuse pour expliquer une mise en scène sans imagination pendant une grande partie du long-métrage. Quant aux scènes de concerts, si le montage de leur tournée aux États-Unis est bâclé, le final à Wembley pour le Live Aid sauve de justesse les meubles. La B.O. nous donne des frissons en offrant un véritable best of des titres les plus emblématiques de Queen (certaines musiques sont sous-titrées, les plus connues uniquement, ce qui est un choix curieux). Mais on a malheureusement, l’impression d’avoir vu ce film des dizaines de fois. Il manque au long-métrage cette âme pour nous transporter ailleurs, une chose que possède leur musique.
Finalement "Bohemian Rhapsody" nous emporte plus par sa formidable B.O (sauf à détester la musique de Queen) que par ses images et son scénario. Mais il renforce l’icônisation de Freddie Mercury et ravira les fans du groupe.
09-12-2018
LA BANDE ANNONCE
Cinémas lyonnais
Cinémas du Rhône
Festivals lyonnais