réalisateur et scénariste
C’est dans la cave du Grand Hôtel que David Carreras souriant homme mûr aux cheveux grisonnants, s’installe face à moi, pour une interview d’un petit quart d’heure. Cet aimable monsieur parle français, et l’échange commence, en 6 questions.
Journaliste :
Chaque personnage dans ce film a une obsession ou une phobie, que ce soit les ascenseurs, le sexe ou l’autorité. Introduire cela était-il une façon de plomber l’ambiance dès le départ, ou d’impliquer le spectateur, qui a lui même ses propres phobies ?
David Carreras :
Je ne crois pas nous ayons raisonné comme cela, en terme de phobies. Au départ, il y avait surtout les personnages du roman. Et nous avons tenté d’éviter les pièges de la caricature.
Journaliste :
Dans ce film, vous jouez sur l’altération de la perception, de la vision et du temps, pour le personnage principal, comme pour le spectateur. Pouvez-vous nous parler du travail de montage, et de la construction par rapport au roman ?
David Carreras :
J’ai beaucoup joué sur les contraires. Nous avons adopté le principe d’un cercle, à la fois temporel et mental. Et nous avions besoin de symboles, comme la salle noire et la salle blanche dans Twin Peaks. Ici, les couloirs, les chemins sont courbes, signifiant cette idée de cercle. Les personnages tournent en rond.
J’aimais l’idée que l’héroïne se souvienne à sa façon du passé. C’est la même chose au fond, pour tout le monde. Si on se souvenait de la réalité, dans ses détails, on deviendrait fou. J’ai de ce fait joué sur des plans semblables, pour donner peu à peu une impression de déjà-vu, lié forcément au souvenir.
Journaliste :
Le travail sur les décors est impressionnant. Comment s’est-il fait, et quels ont été les lieux de tournage ?
David Carreras :
Les lignes verticales sont en effet un moyen d’écraser l’humain. La seule ligne horizontale est finalement la mer. Dans la pièce blanche, les angles sont gommés. Je voulais donner une impression d’irréel, d’infini. Ainsi le spectateur peut comprendre que ce lieu ne peut pas être.
Nous avons tout tourner en studios à Barcelone, à l’exception des extérieurs (plage, et scènes en voiture), qui l’ont été en Almeria, au Sud de Madrid.
Journaliste :
Il y a une forte place de la symbolique dans votre film. On pourrait comparer la structure de la clinique avec celle d’un cerveau, avec le bâtiment ou se trouve la vérité, sorte de subconscient. L’influence du passé sur le futur est elle forcée ? Serait-ce au final un film sur la nécessité de se souvenir ?
David Carreras :
Oui, on devrait apprendre à partir du passé. Mais quelque part, c’est toi même qui doit faire les erreurs. En occident, nous avons une conception du temps qui est circulaire. En orient, il n’en est rien, le temps est linéaire. Chacun s’inscrit dans la continuité des leçon de l’autre. Ils continuent la ligne. Le temps est linéaire.
Journaliste :
Pourquoi avoir gardé une fin ouverte ? Le film aurait pu finir et commencer sans l’accident de voiture.
David Carreras :
Je ne veut pas tout dire dans mon film. Moi, « j’ai mon film », vous avez le votre. Vous ne savez pas si le père a été emprisonné, et si elle n’est pas en danger. Mais qui vous dit que c’est son père ? Et pourquoi tout cela ne se déroulerait pas dans les 10 secondes qui précèdent la mort dans l’accident ? Chacun se fait son film, et c’est cela que j’aime.
Journaliste :
UIP est distributeur. Cela a-t-il été facile de monter le film ?
David Carreras :
Non, ça n’a pas été facile. Ce fut presque un miracle. Mais grâce au travail de beaucoup d’amis, qui se sont impliqués, ont aidé, ont tiré le projet, nous y sommes arrivés.
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