INTERVIEW

JOYEUX NOËL

© Rémy Margage

JOYEUX NOËL


Christian Carion et Diane Kruger

réalisateur et actrice


Dans le cadre de la sortie du film Joyeux Noël, en Sélection Officielle Hors-Compétition au Festival de Cannes 2005, nous avons rencontré son réalisateur Christian Carion, et la belle Diane Kruger, l’une de ses interprètes.

Christian Carion nous parle d’abord de la genèse du film. En 1991, il se promenait dans le rayon histoire de la Fnac Bellecour où il a acheté un livre sur la bataille des Flandres et de l’Artois. Il y découvre l’histoire des fraternisations. A la fois surpris et ému, il appelle l’éditeur et rencontre l’auteur. Ensemble ils font des recherches sur le sujet, à Londres, à Paris… Longtemps ce sujet a été censuré en France, il décide alors d’essayer de faire sauter cette censure par le biais d’un film.

Pourtant, son producteur ne tient pas à faire un tel film. Carion va donc commencer par des courts-métrages. Avec le succès de « Une hirondelle a fait le printemps », il relance le projet. Il a cependant rencontré de nombreuses difficultés de production. Jeunet faisait également un film sur la guerre (Un long dimanche de fiançailles), il voulait conserver les trois langues, et 27 partenaires et cofinanceurs étaient présents sur le projet. C’est d’ailleurs pour cela qu’ils ont du réaliser le générique tel qu’il est. Le réalisateur ne l’a accepté que grâce à la présence des autochromes.

Interrogé sur les sanctions envers les soldats, il nous explique qu’il n’y a pas eu de sanctions contre les soldats qui ont fraternisé. A l’époque on n’avait pas encore inventé l’exemple, la hiérarchie surprise, retire les régiments dits « contaminés » de la zone et les met en première ligne sur d’autres fronts. Les soldats en parlent peu, le phénomène n’a été connu que par les lettres des soldats à leur famille.

Joyeux Noël est avant tout un film de fiction, et Carion a cherché à rassembler dans un même endroit différents exemples de fraternisations. Le personnage féminin a par exemple été créé spécialement pour l’occasion. Son objectif était de filmer la « parenthèse enchantée », mais cependant il a fallu poser le décor, montrer le conflit et la tension, sans cependant reprendre l’imagerie de Verdun. Il s’est ainsi inspiré de 500 photos du front.

Christian Carion nous explique ensuite pourquoi il a tourné en Roumanie. Il était impossible de tourner en France. Il voulait un camp militaire, en avait trouvé un près d’Angoulême, dont le responsable était d’accord pour le tournage. Cependant, la hiérarchie a refusé, refusant de s’engager sur un film « traitant des rebelles ». Cela l’a beaucoup embêté, notamment vis à vis de l’impact économique qu’un tournage peut avoir dans le métier.

Il revient enfin sur le prêche du prêtre anglais. Le réalisateur ne l’a pas modifié. C’est un prêche qui a été prononcé en 1914 à Westminster. Il s’agit d’un discours presque semblable à celui récent, de Georges Bush, et encore, il l’a censuré un peu. Il ajoute que selon lui, le monde chrétien n’a pas de leçons à donner aux musulmans.

Diane Kruger évoque ensuite son rôle dans le film. Elle nous explique que toutes les chansons avaient été enregistrées avant le tournage, et que pour elle, les scènes de chant ont été très difficiles. Il lui a fallu plus de deux mois pour trouver la note juste et donner une crédibilité à son personnage. Sur le tournage, elle était traitée comme une princesse, même si elle a été intégrée à la bande de garçons. Elle gardera un grand souvenir de camaraderie sur un tournage qui faisait finalement un peu penser à un camp de vacances.

Christian Carion nous explique alors qu’au début du tournage, chaque nationalité restait dans son camp. Il a cependant imposé une formation militaire à tous les acteurs, puis a commencé par tourner les batailles. C’est alors qu’ont commencé les fraternisations dans l’équipe. Il considère qu’il était génial de mélanger toutes ces cultures et ces nationalités sur un plateau.

Diane Kruger nous explique qu’elle souhaitait beaucoup faire ce film. D’habitude elle reçoit des scénarios où les allemands ont le rôle du méchant, voire du salaud. Ici l’allemand avait le beau rôle, en fait le plus gentil.

Christian Carion nous raconte qu’il avait testé le concept du film lors d’une avant-première d’ Une hirondelle… à Berlin, le 14 juillet 2002. Il explique l’histoire de Joyeux Noël et se retrouve confronté à un grand silence. Puis une femme prend la parole, en larmes, et lui explique qu’elle est très touchée car pour une fois les allemands ne seraient ni des cons ni des salauds. Il a alors décidé de coproduire avec les Allemands pour qu’ils se sentent complètement impliqués dans le film dés le départ.

Il revient enfin sur la présence de Dany Boon dans le film. C’est le premier acteur qu’il était allé voir. Les gens du Nord ont connu une occupation très forte durant cette guerre et étaient face à une forme de double peine, entre la mort et la destruction de leur région. Dany avait une grande sensibilité qui permettait de montrer le courage de ces gens, prêts à vivre et à mourir pour leur terre.

Rémy
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