© Patrice RICOTTA
réalisateurs et acteur
Quelques semaines avant la sortie de leur film « Nos Jours Heureux » nous avons rencontré Eric Tolenado et Olivier Nakache, réalisateurs, ainsi que l’interprète principal du film : Jean-Paul Rouve. L’ambiance est particulièrement décontractée, pendant que Jean-Paul Rouve commande et commence à déguster un grog bien corsé, les deux réalisateurs font les questions et les réponses… Avant que l’entretien proprement dit ne commence.
Les deux réalisateurs commencent par nous expliquer la raison du changement de titre par rapport à leur court-métrage originel : « Ces jours heureux ». La première raison vient du fait que dans le long-métrage, ils ont fait le choix de raconter l’histoire de plusieurs personnages, justifiant le possessif « nos ». De plus, lorsqu’ils parlaient du projet autour d’eux et/ou à des journalistes, la confusion était souvent faite entre « ces jours heureux » et « séjours heureux ». Il fallait donc changer le titre pour éviter les problèmes.
Au début du tournage, tout s’est très bien passé malgré le nombre très élevé d’enfants : environ 70. Les enfants étaient très sages, car ils étaient très impressionnés par l’équipe, les caméras… Puis ils ont été de plus en plus difficiles à gérer car ils se sont sentis à l’aise, et ont eu presque l’impression d’être réellement en colonie de vacances. Seuls les plus petits étaient très sages car ils ne faisaient pas la différence entre un tournage de film et un séjour en colo.
Olivier et Eric se sont rencontrés lorsqu’ils étaient moniteurs de colo. Ils ont été successivement animateurs, directeurs… Le film est très clairement une inspiration de leur expérience personnelle, et tente de regrouper des éléments vécus en dix années de colonies de vacances.
Ils nous expliquent ensuite qu’ils ont été obligés de forcer le trait, et de présenter au début du film des personnages presque caricaturaux, pour pouvoir mettre le spectateur tout de suite dans le rythme. L’objectif était de les rendre attachants, qu’on les aime et qu’on ait envie qu’ils deviennent nos potes. Il était ensuite possible d’aller plus dans la finesse et la subtilité et ainsi de dépasser le cliché.
C’est un peu comme dans une colonie. Au début, tout le monde se toise, on se fait de nombreux à priori sur chacun, et puis au fil du temps on remet en cause ces à priori. En colo, tout va beaucoup plus vite : les engueulades, les réconciliations, les amourettes… car on sait que cela ne dure pas, que le temps est limité. Les animateurs n’ont pas réellement une autorité sur les enfants, ils n’ont souvent que 4 ou 5 ans de plus. La relation qui s’établit alors est très intéressante et formatrice. La colonie de vacances est réellement un moment à part, quelque chose de très important et formateur dans la vie de l’enfant ET de l’adulte. Chacun va pouvoir y apprendre des choses sur soi.
Le scénario faisait parfois un peu peur dans sa version écrite. Jean-Paul Rouve nous explique qu’il ne l’aurait très certainement pas accepté si il n’avait pas connu les deux réalisateurs. Il se sentait alors rassuré, en confiance. Pour lui, le film est le personnage principal. Il se sent très fier de l’avoir fait. Les réalisateurs n’ont pas cherché à faire volontairement un film pour redorer le blason des colonies de vacances, mais finalement, il a obtenu l’agrément « Jeunesse et Sport », ils ont même reçu la visite du Ministre sur le tournage. Le film sert désormais de base de réflexion pour les animateurs. Les colonies de vacances connaissent une perte d’image ces dernières années. A l’époque où Eric et Olivier étaient animateurs, tous les milieux sociaux étaient présents en colonie, du plus pauvre au plus riche, et c’était là une véritable école de tolérance, de mixité… Désormais les colonies de vacances souffrent d’une image négative : on croit que seuls les jeunes de cité ou les plus pauvres y vont encore, ce qui n’est pas le cas.
Les réalisateurs reviennent maintenant sur le tournage. Ils nous expliquent que le scénario était très écrit, mais qu’ils ont laissé un espace pour de nouvelles idées, notamment lors des olympiades. Ils n’avaient que 10 semaines de tournage donc il était nécessaire d’être prêts dés le départ. Ils ont aussi laissé une liberté aux acteurs « étrangers » pour ajouter des références typiques : notamment avec le petit belge ou l’animateur québecois. Parfois, il fallait « voler » des instants aux enfants, faisant croire que la caméra ne tournait pas, pour dépasser leurs peurs, leurs réticences… ou capter leurs chahuts. Le film reste cependant quelque chose de vécu, notamment parce qu’ils ont tourné dans un lieu où eux-mêmes avaient participé à des colonies. Même le personnage de Caroline est quelqu’un qu’ils ont réellement connu.
Concernant le casting des enfants et des animateurs, l’objectif principal était de faire émerger des gens qui n’étaient pas connus. Certains enfants avaient déjà tournés, mais pour beaucoup, c’était une première, d’où certaines confusions parfois entre réalité et fiction (certains enfants sont même tombés « amoureux » comme leurs personnages). Pour les réalisateurs, tourner à deux est un grand avantage, ils peuvent se relayer et se compléter. Leur seul impératif étant de ne jamais se contredire devant l’équipe.
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