INTERVIEW

PAS SI GRAVE

PAS SI GRAVE


Bernard Rapp

réaliseur et scénariste


Bernard Rapp est le réalisateur et le scénariste de " Pas si grave ", une comédie dont la sortie est prévue ce 4 mars. C'est à cette occasion qu'il s'est exprimé sur le film.

Il raconte tout d'abord pourquoi il a choisi de faire apparaître dans son film des " faux frères " comme il le dit, des enfants orphelins adoptés par le même couple. Il y avait pour volonté depuis le départ d'avoir des personnages d'horizons divers, avec " trois passés, trois passifs un peu lourds ". Des personnages avec de vraies différences mais au fond une vraie fratrie qui se forment tout au long du film, dans cette comédie où il est question de drames de vie.

Quand on lui demande pourquoi avoir choisi Romain Duris pour jouer le frère homosexuel, il préfère d'abord préciser que le personnage n'est pas un homosexuel. C'est un jeune gars qui est musicien et qui tombe amoureux d'un homme. Pour Bernard Rapp, son film est comme la vie, on tombe amoureux d'un homme ou d'une femme, mais surtout de quelqu'un. S'il a choisi cet acteur c'est parce qu'il est comédien mais aussi musicien comme l'est le personnage et qu'il a, en plus, une grande facilité à endosser n'importe quel personnage.

Pour Angela, il fallait qu'elle soit sublime. La surprise vient toujours des femmes selon Bernard Rapp et il voulait que dans son film aussi, la femme étonne. C'est pour cette raison qu'elle est pleine de facettes : chirurgien, boucher, réglant ses problèmes à coup de tête. C'est un mélange de différentes personnes qu'i la pu rencontré.

Le rôle de Jean-François Stevenin, est l'adaptation d'une histoire vraie. Rapp pensait déjà à lui quand il a écrit ce personnage. Il y a aussi un jeu de réaction avec le public car il ne croit pas à Stevenin en espagnol, il sait qu'il n'est pas espagnol. Et dans le même temps l'acteur parle en espagnol aux trois frères qui viennent d'arriver à Valence, pour se moquer d'eux. Ce personnage est en fait un lointain cousin des trois frères : il a quitté dans sa jeunesse la France pour un voyage dans le monde, et il a fini par trouver sa place, là, même si ce n'est pas celle qu'il pensait. Dans ces personnages, il y a de son réalisateur mais il y a aussi beaucoup de choses qui ne sont pas lui. Il a été trompettiste pendant quinze ans, et estime qu'il a mis de son père dans leur père, c'était un sculpteur un peu original comme Pedro.

Quand l'allusion à " L'auberge espagnole " est faite, Rapp se défend de toute assimilation. " L'auberge espagnole " se finissait tout juste quand il a proposé ce film à Romain Duris et il a refusé de visionner ce film avant d'avoir fini le sien. Et le résultat est très différent, en dehors de la présence de Romain Duris et de l'Espagne (De plus, précise-t-il, Valence et Barcelone n'ont pas du tout la même atmosphère.). L'Espagne qu'il a choisi d'abord parce qu'il fallait que le père adoptif en soit jamais retourné dans son pays depuis 50 ans et que la guerre civile espagnole reste une guerre marquante. Et parce qu'il y a une lumière, une atmosphère, une musique qu'il voulait dans son film. Il fallait faire partir ces trois frères du nord pour les faire aller dans la lumière du sud.

L'histoire du film est formée d'anecdotes qui sont des histoires vraies au départ, parfois arrangées, auxquelles Bernard Rapp a assisté ou qu'on lui a rapporté. Pour le commandant de la Guardia Civil homosexuel par exemple, c'est dans un café qu'il en a eu l'idée : un jeune garçon était assis seul à une table quand un officier de la Guardia en uniforme l'a rejoint, il y avait quelque chose entre eux, cela crevait les yeux, il l'a rangé dans un coin de sa tête, puis il l'a réutilisé dans son film en faisant de l'officier un transformiste, pour faire un clin d'œil au cinéma d'Almodovar. Il ajoute même que ce côté transformiste du personnage n'est pas si loin de la vérité, puisque lors du tournage, il a lui-même rencontré un transformiste qui faisait partie de la Guardia. Comme quoi la fiction est souvent rattrapée par la réalité.

Pour le thème principal du film, l'idée de dette est très importante pour Bernard Rapp. Ce film parle de la dette que l'on croit avoir envers ses parents parce qu'ils nous ont élevés, mais qu'on ne rembourse jamais à ses parents, car ce n'est en fait pas nécessaire. Cette dette est une dette qu'on rembourse à ses enfants en leur donnant la même chose qu'on a reçu de ses propres parents. C'est une dette qui se transmet de génération en génération. Les trois jeunes vont vers un inconnu qui est bien connu par d'autres. Les trois jeunes ont pour écho les trois vieux. Il voulait exprimer avec cela l'idée que l'on marche toujours dans l'ombre de ses aînés.

Bernard Rapp avait envie d'une comédie. " Tirer à part " était un film noir, " Une affaire de goût " également, et il pensait déjà à une comédie à ce moment-là. Etant donné l'état du monde d'aujourd'hui, et justement parce que le monde est dur, il souhaitait faire une fable légère,. Il voulait aussi qu'on le retrouve où personne ne l'attendait. Il voulait aussi faire un film pour le public, pour lui faire venir le sourire et les larmes. C'est un film auquel il pensait depuis très longtemps, d'autant plus que c'est le premier film dont il est l'auteur, et non pas l'adaptateur.

Enfin il s'explique sur ce titre, et dit qu'il n'y a en réalité pas vraiment de rapport avec l'histoire-même. C'est juste la vie qui n'est pas si grave. Il y a des choses lourdes dans ce film : les frères n'ont pas de parents, l'un d'eux ne se sent pas artiste, il y a aussi un problème d'identité sexuelle, mais elles sont traitées de manière légère, en comédie. Parce que tout ça n'est pas si grave. Au départ il voulait l'appeler " Pas si simple ", mais il a eu peur qu'étant donné son image publique, on ne comprenne compliqué. Et puis, c'est comme un mot d'enfant du genre " même pas grave ".

Chloé
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