Le traditionnel buzz autour des Oscars a pour habitude de désigner deux challengers potentiels de taille. Cette année, le duel était particulièrement intéressant, puisque les deux challengers n’étaient autres que les ex-compagnons James Cameron et Kathryn Bigelow. Ajoutons à cela la polémique qu’a créée le producteur français de «Démineur » en incitant les votant à ne pas encourager l’industrie d’Hollywood en votant pour «le produit à 500 millions de dollars » de M. Cameron. Communication efficace ou pas, le film de Kathryn Bigelow est ressorti grand vainqueur, en remportant six statuettes contre trois pour «Avatar ».
Meilleur film :
Démineurs (Kathryn Bigelow, Mark Boal, Nicolas Chartier & Greg Shapiro)
Meilleure réalisation :
Démineurs (Kathryn Bigelow)
Meilleur acteur :
Jeff Bridges (Crazy Heart)
Meilleure actrice :
Sandra Bullock (The Blind Side)
Meilleur acteur dans un second rôle :
Christoph Waltz (Inglourious Basterds)
Meilleure actrice dans un second rôle :
Mo’nique (Precious)
Meilleur film d’animation :
Là Haut (Pete Docter)
Meilleur scénario original :
Démineurs (Mark Boal)
Meilleur scénario adapté :
Precious (Geoffrey Fletcher)
Meilleure chanson écrite pour un film :
«The Weary Kind » pour Crazy Heart (Ryan Bingham & T Bone Burnett)
Meilleure musique écrite pour un film :
Là-haut (Michael Ciacchino)
Meilleure photographie :
Avatar (Mauro Fiore)
Meilleurs décors & direction artistique :
Avatar (Rick Carter, Robert Stromberg & Kim Sinclair)
Meilleurs costumes :
The Young Victoria (Sandy Powell)
Meilleur maquillage :
Star Trek (Barney Burman, Mindy Hall & Joel Harlow)
Meilleur son :
Démineurs (Paul N.J. Ottosson)
Meilleur mixage sonore :
Démineurs (Paul N.J. Ottosson & Ray Beckett)
Meilleur montage :
Démineurs (Bob Murawski & Chris Innis)
Meilleurs effets spéciaux :
Avatar (Joe Letteri, Stephen Rosenbaum, Richard Baneham & Andrew R. Jones)
Meilleur court métrage :
The New Tenants (Joackim Back & Tivi Magnusson)
Meilleur court métrage animé :
Logorama (Nicolas Schmerkin)
Meilleur court métrage documentaire :
Music by Prudence (Roger Ross Williams & Elinor Burkett)
Meilleur film documentaire :
The Cove (Louie Psihoyos & Fisher Stevens)
Meilleur film étranger :
Dans ses Yeux (Argentine)
Le palmarès 2010 des Oscars fut finalement plus éclectique que celui des Césars, récompensant près d’une dizaine de films différents. A ce titre, pas moins de dix nominés prétendaient à l’Oscar du meilleur film.
Ce fut donc "Démineurs" qui rafla cette récompense, passant devant le pourtant magnifique "Là-haut", qui reçut tout de même le prix du meilleur film d’animation en guise de consolation. Des dix nominés, c’était très certainement ces deux films qui méritaient cette noble distinction. Son "Démineurs" ayant remporté une bonne partie des Oscars techniques tels que la réalisation, le montage et le son, Kathryn Bigelow fut très justement récompensée pour ses talents de mise en scène. Tout comme notre Jacques Audiard, la cinéaste américaine a réussi à insuffler à son œuvre une atmosphère oppressante, grâce à un sens du rythme et des plans minutieusement calculés. A cette occasion, elle devient la première femme à se voir décerner l’Oscar de la meilleure réalisation.
Le film le plus rentable de l’histoire du cinéma repart donc avec seulement trois statuettes, dont la meilleure direction artistique et les meilleurs effets spéciaux qui, avouons-le, lui revenaient de droit, au vu du travail de longue haleine qui a été fourni pour rendre Pandora plus vivante que nature. On sera, en revanche, moins enthousiaste pour l’Oscar de la meilleure photographie décerné à "Avatar", alors que figurait dans la liste des nominés "Le Ruban Blanc" au noir et blanc des plus profonds, cadrant prodigieusement avec son sujet.
Les prix récompensant les scénarios demeurent également discutables, lorsque l’on voit "Démineurs" rafler la statuette du meilleur scénario original devant "Inglourious Basterds". Le film de Bigelow n’est au final qu’une succession de scénettes, certes très bien rendues, sur le quotidien des démineurs, alors que l’œuvre de Tarantino jouissait tout de même de dialogues d’une inventivité et d’une verve implacables. Il en est de même pour l’Oscar du meilleur scénario adapté, remis à "Precious" pour son adaptation édulcorant le matériau originel par une bonne dose de fantaisies, alors qu’"In the loop", réécriture brillante de la série "Thick of it", et "District 9" à la SF faisant intelligemment écho à nos sociétés modernes, étaient dans le lot.
La performance de Jeff Bridges en chanteur de country has been fut justement récompensée, en dépit de l’excellente et touchante interprétation de Colin Firth dans le film plastique de Tom Ford. Malheureusement, la réalisation léchée du grand couturier relègue en second plan la prestation de Firth, alors que Scott Cooper n’utilise aucun artifice pour ne point dénaturer l’interprétation brute de décoffrage de Bridges. En second rôle masculin, c’est bien évidement Christoph Waltz qui était tout désigné pour recevoir cet Oscar. Sans lui, "Inglourious Basterds" n’aurait certainement pas eu la même saveur.
Chez les femmes, Sandra Bullock, l’actrice la plus rentable d’Hollywood, s’est faite sacrer meilleure actrice de 2009 pour son rôle de mère de famille engagée dans "The Blind Side", alors que Gabourey Sidibe, qui porte le film « Precious », l’aurait tout aussi bien mérité. C’est finalement Mo’nique, qui joue le rôle de la mère impitoyable de Precious, qui reçut l’Oscar du meilleur second rôle féminin. Des cinq performances nominées, je ne dirais pas qu’il s’agit de la meilleure, car un peu plus de retenu dans son jeu aurait profité au personnage, mais il s’agissait là du rôle le plus intense et donc le plus sujet à la faveur des votants.
Enfin, les grands espoirs français ont échoué avec le prix du meilleur film étranger remis aux auteurs argentins de "Dans ses yeux”, qui est certes un excellent polar mais qui, sans être chauvin, n’égale aucunement la puissance d’"Un Prophète". Avec la récompense de "Coco avant Chanel" passant à la trappe au profit de "Victoria, jeune reine", la France se contentera de l’Oscar du meilleur court métrage d’animation ("Logorama", réalisé par un français).
Néanmoins, l’artistique mis à part, on peut tout de même dire que les producteurs français ont su placer leur billes dans des films de qualité, tels que l’excellent documentaire "The Cove" (coproduit par Luc Besson) et le fameux "Démineurs" (coproduit par Nicolas Chartier), grand vainqueur de cette 82ème édition des Oscars.
Alexandre Romanazzi
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