La sélection de cette 35ème édition du festival du film américain fut marquée par de nombreux métrages traitant de la quête de soi. Nombreux protagonistes se retrouve cette année en dépression (Paul Giamatti dans "Cold Souls", Pippa Lee, Julie et parfois Julia), dans un profond malaise (Henry dans "Shrink", Precious ou Nick dans "Youth in Revolt") et cherchent leur voie comme Vince de City Island, Lucas dans "The Good Heart" ou encore Richard dans "Me & Orson Welles". La liste n'est pas exhaustive et cette poursuite vers l'accomplissement est récurrente dans la quasi-totalité de la sélection.
Vus dans leur ensemble, on pourrait même affirmer qu'un certain schéma se dessine dans les films de Deauville cette année. La plupart commencent en présentant des personnages perdus ("The Good Heart", "Harrison Mongomery" ou "Cold Souls" pour ne citer qu'eux) qui vont s'affirmer et trouver leurs voies par le biais d'activités artistiques. D'ailleurs, bien souvent, il s'agit d'individus ayant des aspirations créatrices fortes mais qui sont coincés dans des petits jobs d'appoint faute de soutien et de reconnaissance ("La Proposition", "The Open Road", "City Island"…).
L'accomplissement par l'art…
Les différents arts qui permettent à ces protagonistes de rayonner sont assez variés dans toute la palette des films présentés.
Richard Samuel, joué par Zac Ephron, dans "Me & Orson Welles" tente d'échapper à l'ennui qu'il éprouve en classe à travers le théâtre.
Le personnage d'Andy Garcia (Vince), enfermé dans ses mensonges et sa routine dans l'excellent "City Island", s'essaie lui aussi à la comédie, passion qu'il considère de prime à bord plus comme une simple hobbie qu'un véritable métier.
Pour en finir avec la comédie, Paul Giamatti dans "Cold Souls", lui, ne parvient plus à jouer à la suite de l'ablation de son âme et il se rend compte qu'il a besoin de ce talent pour exister.
Dans "Harrison Montgomery", Ricardo s'est enfermé dans le deal de drogue pour se payer les études d'art dont il rêve. Ces petits écarts lui rapportent plus d'ennuis que d'argent, néanmoins, son objectif et sa passion pour le dessin le pousse à s'en sortir.
Enfin, le jeune Clay de "Personal Effects" est, lui, prisonnier de son handicap (la surdité) et du deuil de son père via lequel il entretient une haine inextricable. Walter (Ashton Kutcher) va lui faire découvrir la lutte et c'est par ce sport que l'adolescent va réussir à s'affirmer.
L'art apparaît donc comme un moyen de se transcender et de trouver sa voie et chacun va se voir grandir à travers la discipline qu'il choisit de pratiquer en dépit des embuches.
… et plus particulièrement par l'écriture
Outre les disciplines évoquées précédemment, c'est l'écriture qui s'est fortement démarquée. En plus des productions représentant des personnages écrivant leurs vies à titre personnels ("Pipa Lee" et Nick dans "Youth in Revolt" via son journal intime), beaucoup mettent en scène des écrivains rêvant d'être publiés ou de percer.
"Julie & Julia", par exemple, met en parallèle deux femmes voulant trouver leur voie. Julia essaie de sortir de sa condition de femme au foyer par la cuisine d'abord, puis, par l'écriture d'un livre de recettes et Julie, qui n'a jamais terminé son livre, tente de rayonner via son blog.
Dans "World's Greatest Dad", on retrouve un peu le même désir d'être publié et cet enfermement dans un métier insipide. C'est par l'écriture des mémoires de son défunt fil que Lance (formidable Robin Williams) obtient la reconnaissance, mais non pas en tant qu'écrivain mais en tant que père.
"La Proposition" met également en scène un écrivain désirant vivre de sa passion et d'être reconnu. Andrew Paxton, sorte de petit assistant à tout faire d'une maniaque imbuvable, est prêt à accepter le chantage douteux de sa chef pour faire publier son livre.
Autre personnage enfermé dans un carcan et cherchant sa voie, Carlton, joué par Justin Timberlake dans "The Open Road", veut renoncer à sa carrière toute tracée de footballeur pour devenir écrivain.
Enfin, "Shrink" met en scène les aspirations de plusieurs protagonistes voulant percer dans le cinéma. Le personnage de Jérémy (Mark Webber) tente tant bien que mal d'écrire le scénario qui lui ouvrira les portes du monde du cinéma.
Alors, il est peut-être possible d'éclairer cette prépondérance à cette discipline en remettant ces films dans le contexte d'il y'a deux ans alors qu'ils n'étaient qu'au stade de tournage voire d'écriture. Peut-être de la crise des scénaristes survenues début 2007 a poussé la production de films sur ces créateurs de l'ombre? Peut-être, enfin et surtout, les scénarios de ces films étaient révélateurs de la température des sentiments des scénaristes avant la fameuse grève de 2007…
Alexandre Romanazzi
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