L'un des sujets récurrents cette année des films présentés à Venise fut l'hypocrisie de la société dans son ensemble face à certains problèmes comme l'immigration ou l'intégration, ou plus particulièrement celle dont peuvent faire preuve des microcosmes organisés tels les entreprises ou les fédérations sportives.
Véritable bijou d'humour noir et de cynisme, le malaisien « Sell Out ! » s'ouvre sur une hallucinante interview d'un réalisateur de courts métrages Alors que l'on s'attend à une charge contre l'art conceptuel, c'est finalement à une critique des multinationales qu'on assiste. Et on se régale du portrait des deux infâmes patrons d'une certaine « Fony enterprise » contrôlant tous les secteurs et obligeant une présentatrice à se convertir à la télé réalité et un inventeur à vicier ses propres produits de manière à ce qu'ils tombent en panne le lendemain de la fin de garantie ! Au fond s'ajoute une forme décalée des plus réjouissantes dans laquelle s'immisce la comédie musicale et de mémorables scènes burlesques telle l'exorcisme du côté créatif de l'inventeur.
La réalité derrière les reportages télé est le sujet central de « Jay », film qui épingle les dérives manipulatrices d'un animateur peu scrupuleux qui déclenche lui même des drames pour mieux fabriquer le sensationnel. Là où l'oeuvre prend une dimension fascinante, c'est lorsqu'elle stigmatise l'attitude de ceux qui veulent faire bonne figure à la télé ou qui l'utilisent à leurs propres fins. La scène à la morgue, où la mère rejoue la découverte du corps de son fils, est particulièrement abjecte. Mais le malheur est devenu spectacle. Et ce n'est pas « The wrestler » (Lion d'or 2008, sortie en mars 2009) qui le démentira. Ce nouveau film signé Darren Aronofsky (« Requiem for a dream ») dévoile les dessous du métier de catcheur, au travers du portrait d'un vieux routard égoïste et sans le sou. Interprété par un Mickey Rourke méconnaissable, le film interroge sur l'honnêteté des fédérations qui incitent, au nom du spectacle, à une réelle prise de risque, et qui ferment les yeux sur les problèmes de santé de ses membres, souvent au mépris de leur vie.
Parfois le sport est aussi un moyen d'obtenir un droit à la mobilité dont chacun devrait pourtant disposer de fait. Ainsi les Sri Lankais de « Machan » réussissent à obtenir un visa pour l'Allemagne en montant de toute pièce une équipe nationale de Hand Ball. Le fait que la fédération n'existe pas et qu'ils ne savent même pas jouer, outre créer de savoureux décalages, permet de mettre en évidence les contradictions de deux administrations, qui derrière la notion de fraternité entre peuples, cachent la répression vis à vis de l'immigration. Sur un sujet proche, « La terre des hommes rouges » (17 décembre 2008) traite de l'exclusion d'un peuple amérindien dans un Brésil contrôlé par les grands propriétaires. Au delà des préjugés et malgré l'exploitation au quotidien, des liens se tissent peu à peu, que ce soit avec les nouvelles générations ou les gardiens des puissants. De quoi peut être espérer que l'individu puisse, quelque part, par ses actions et ses élans quotidiens, changer l'inébranlable donne d'une société finalement bien peu équilibrée.
Olivier Bachelard
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