DOSSIER

Affiche

BERLIN 2008 - Les hispanophones font de plus en plus peur


Tendances fortes depuis quelques années (« Le labyrinthe de Pan »...), encore renforcée cette année par la main mise sur la quasi totalité des prix à Gerardmer (Grand Prix pour « L'orphelinat », Prix du jury pour « REC » de Jaume Baloguero), les films en espagnol versent dans l'horreur et le fantastique. Certains spécialistes s'entendent pour dire que les pays les plus prolifiques en la matière sont des sociétés qui subissent de profondes mutations, et que leurs films restituent ainsi une sorte d'inquiétude générale aussi inconsciente qu'envahissante. C'était le cas ces dernières années avec notamment la Corée du Nord. C'est aujourd'hui le tour du Mexique et de l'Espagne.

A Berlin cette année, 3 films se sont ainsi fait remarquer, du fait de leur caractère effrayant, mais aussi de leur efficacité. Le premier, venu d'Espagne, « Eskalofrio » ( Shiver en anglais ou Frissons en français) met en scène un adolescent atteint d'une allergie à la lumière. Ceux qui penseront aux vampires seront à ranger parmi les autres parano du village reculé dans lequel le gamin d'installe avec sa mère, et a bien du mal à s'intégrer car les rares amis qu'il se fait, finissent tous sauvagement assassinés en forêt!

Le film joue sur tous les tableaux: peur de l'étranger, de la différence, de la forêt, du noir, de l'isolement, des bruits d'une vieille maison... Et le spectateur tremble. Car la créature qui fait bouger les buissons, se meut dans d'étranges gargouillis, et sectionne au passage les tendons ou les gorges est aussi flippante dans les bois qu'une fois introduite dans la maison. Le réalisateur, lui, use d'effets des plus simples, comme d'un plan fixe sur un visage terrifié, le long duquel court une mèche de cheveu, avec en fond sonore le souffle de la chose, provoquant quelques sursauts bien placés.

Photo2

D'apparence plus à ranger côté anticipation, « 3 dias » débute comme une histoire de fin du monde. A la télévision, un journaliste officialise la collision d'une comète avec la terre, sous 82 heures, anéantissant tout espoir de vie, ce qui ne manque pas de déclencher émeutes et pillages. Aucun endroit où fuir, jusque quelques jours pour profiter de la vie, et pour certains, comme les prisonniers, pour s'échapper de leurs cellules, leurs gardiens ayant bien évidemment quitté leurs postes. Du coup, une grand mère s'inquiète: et si l'assassin que l'un de ses fils avait dénoncé, revenait se venger. Au programme, une première partie paranoïaque, et une deuxième sous forme de duel au soleil autour d'une maison isolée de la campagne andalouse. Un film assez violent, qui n'arrive malheureusement pas à rester dans le réalisme jusqu'au bout.

Photo3

Enfin, tout droit débarqué du Mexique, « Sleep dealer » anticipe lui aussi, mais sur la diminution de la ressource en eau (dont la gestion est entièrement privatisée – et même militarisée), la surveillance technologique et l'exploitation des rêves par l'industrie. Le héros, un jeune homme, y met sa vie en danger en piratant des communications à distance. Sa maison est détruite, et son père avec. Il passera le reste du film à tenter de changer le passé, de manière certes peu claire ou crédible. La mise en scène situe le film dans l'irréalisme dès le départ, alliant montage cut et multiples filtres de couleur.

Olivier Bachelard

Partager cet article sur Facebook Twitter