Au cinéma, tout est question de point de vue. Ainsi le monde peut être perçu totalement différemment en fonction du narrateur ou de l'observateur choisi. Certains films sélectionnés à Venise ont ainsi permis d'approcher le monde des adultes à hauteur d'enfant.
Nocturna, dessin animé franco-espagnol, adopte ainsi le regard émerveillé d'un enfant sur le monde de la nuit, qu'il découvre magique et peuplé de créatures aussi angoissantes que captivantes (troupeaux de chats chargés d'endormir les enfants et leur berger, lumières de candélabres agissant comme des lucioles, étoiles accrochées à des filins...). Faussement naïf, ce malicieux conte autour de la peur du noir, fascine par ses jeux d'ombre et de lumière, l'échelle de cette ville aux aspects familiers et son message visant à donner aux petits l'envie d'affronter le monde. D'échelle il est également question dans Cochochi, film mexicain, où deux frères se retrouvent perdus dans des paysages qui les dépassent à la suite du vol de leur cheval. D'une forêt embrumée à une plaine immense et déserte, la confrontation des deux enfants avec une nature imposante, puis à des inconnus dont on ignore les intentions, fait tendre le récit vers une nécessaire initiation au courage et à la responsabilité. En effet, emmener des médicaments à l'autre bout d'une vallée apparaît ici comme un périple aussi dangereux que riche en rencontres avec des adultes, porteurs d'intérêts forcément divergents.
La prise de responsabilité est aussi au coeur de With a girl of black Soil, film asiatique, où une gamine devient progressivement chef de famille, s'occupant d'un frère attardé et d'un père sombrant dans l'alcoolisme. Pessimiste, le film se rapproche d'un documentaire sur les villages reculés de Corée, où le chômage fait des ravages et où les enfants peuvent au choix prendre la place des adultes ou fuir. Un autre personnage a lui aussi choisi la première solution. Il s'agit du garçon de Tricks, film polonais, qui serait prêt à tout pour rapprocher celui qu'il croit être son père, de sa mère. Spontané, bridé par une soeur plus grande et expérimentée, il touche à force d'incompréhension des hésitations et des cas de conscience des adultes. D'autant que cet homme pourrait bien ne pas être le bon.
Mais le film qui met le mieux face à face ces deux mondes, aux aspirations différentes et aux problèmes incompatibles, c'est certainement Atonement de Joe Wright. Construit en séquences miroirs, montrant l'action vue à distance par une adolescente à l'imagination débordante, puis le même événement de manière rapprochée, à hauteur d'adulte, cette histoire d'amour bascule dans l'impossible lorsque la fillette accuse à tort le fiancé secret de sa soeur de pédophilie. Un grand drame cousu de jalousie et d'aveuglement, qui sur fond d'entrée en guerre, pose les questions de la perception du monde par l'enfant et de l'influence de l'écriture sur la réalité. Un grand film, à découvrir en janvier en France.
OB
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