Le Festival de Cannes, s’il réserve toujours des surprises, a particulièrement brillé cette année par la diversité des genres représentés, du film policier à la série télé, en passant par le film de vengeance, la chronique adolescente ou la comédie. De quoi provoquer chez le spectateur, aussi bien émerveillement, tension, peur ou accès de tendresse incontrôlés. Coup d’oeil sur ces merveilleuses surprises qui ont égayé cette 70e édition.
Des films à l’esprit positif
C’est une comédie douce-amère qui a surpris tout le monde du côté de la Semaine de la critique. Avec le portrait d’une japonaise vieillissante tombant sous le charme d’un professeur d’Anglais particulièrement affectueux, "Oh Lucy !" nous embarque dans un improbable road movie côté USA permettant au personnage principal de dire au revoir à quelques illusions, mais aussi de se réconcilier avec sa sœur. Une jolie comédie dont le décalage, l’aspect sexué et le jeu sur les différences de culture s’avèrent une redoutable recette.
Toujours à la Semaine de la critique, le film de clôture, "Brigsby Bear", a su à la fois toucher la fibre nostalgique de certains et réveiller chez d’autres l’envie de faire du cinéma. A partir d’un incroyable postulat de départ (la découverte par un jeune homme qu’il a été enlevé enfant, et que son show télé favori était tourné chaque semaine par ses ravisseurs de parents), le film développe un récit empli de belles rencontres, valorisant l’entraide et l’usage de l’imagination. Une thématique qui résonnera dans l’esprit des plus nostalgiques, autour du désir très actuel de recréer des séries ou émissions cultes enterrées il y a longtemps.
Mais c’est du côté d’Un certain regard que l’on aura finalement découvert le film le plus tendre, parcours d’une servante chilienne égarée suite à une panne de bus et remettant en cause sa vie sage et bien réglée. Au fil des rencontres et des hasards, à partir de petits rien qui bousculent votre existence, Cecilia Atan et Valeria Pivato vont confronter leur personnage (Paulina Garcia, impériale) à un nouveau désir de vie. "La novia del desierto" développe ainsi un incroyable charme, conforté par un photographie magnifique et la nature toujours bienveillante des personnes croisées. Inoubliable.
Des films de genre magnétiques
Du côté des films dits « de genre », Un certain regard a mis en exergue les talents de narrateur et de générateur de suspense du scénariste de "Comancheria" et de "Sicario", Taylor Sheridan. Avec son thriller enneigé "Wind River", il livre une brillante enquête en réserve indienne, prenant en étau le spectateur, qui ne sait rapidement plus d’où le danger va tout à coup jaillir. Brillant.
En séance de minuit, "The Villainess", sorte de Nikita coréen, s’est révélé un film de vengeance percutant de par à la fois son caractère immersif (la première scène renvoyant à de nombreux jeux vidéos…) et sa violence inouïe. Épousant à merveille un romantisme qui aurait pu paraître incongru, le scénario livre de nombreux flash-backs éclairant le passé de l’héroïne et des morceaux de bravoures qui donnent envie d’applaudir. On en reste scotché à son siège.
Présenté en compétition, "Wonderstruck" de Todd Haynes est un récit enfantin, convoquant les espoirs de deux gamins vivant à deux époques différentes : un garçon devenant sourd en 1977 et une jeune fille sourde en 1927. Autour des mystérieux liens entre les deux histoires, il construit un récit pratiquement muet, passant d’une époque à l’autre avec une grande fluidité et grâce à une musique omniprésente. Un film empreint d’une belle nostalgie.
Terminons par l’événement qui marqua les Séances spéciales, le retour tant attendu de David Lynch, avec les deux premiers épisodes de "Twin Peaks saison 3". Un moment d’une rare intensité, nimbé du souvenir de ses incroyables deux premières saisons, diffusées il y a 25 ans, dont cette suite fait revivre l’esprit et les élans d’angoisse, avec une modernité assumée. Élargissant les lieux de l’intrigue, lorgnant vers l’expérimental, provoquant en permanence la surprise, le maître du bizarre n’a rien perdu de sa superbe et nous accroche une nouvelle fois sur la fin, à force d’énigmes et d’usage habile de la musique. Vivement un prochain long métrage.
Olivier Bachelard
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