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cannes 2015 - Retour thématique sur le 68e Festival : De véritables univers


Quelques films ont cette année plongé les festivaliers dans des univers aussi surprenants que poétiques, aussi visuellement sublimes que magiques.

Ce fut le cas d'un des premiers films en compétition, « Tale of tales » de Matteo Garrone. Avec ses histoires de sorcières, de roi obsédé par le sexe ou par le destin de sa fille, d'émancipation et de désir, ce sont dans des châteaux aux formes improbables, sur des falaises abruptes et dans des fonds marins aux créatures étranges que nous promène le réalisateur italien. Alliant brumes mystérieuses, personnages tordus et musique envoûtante, il provoque l'émotion et l'émerveillement.

Yorgos Lanthimos nous a proposé le film le plus original de cette quinzaine, grâce à un scénario barré aux paraboles multiples, permettant d'aborder sous un angle toujours particulier le formatage qu'attend la société. « The lobster »nous plonge dans un monde où les célibataires sont condamnés à trouver l'âme sœur et se marier ou à perdre leur humanité en se transformant en animal (un homard dans le cas Colin Farrel). Ici ce sont avant tout les règles absurdes (une main dans le grille-pain comme punition après une masturbation, un jour en plus si on abat un fuyard...) qui font l'originalité de lieux tout à fait communs (un hôtel de bord de mer, une forêt).

Autre lieu insolite, le désert dans lequel Jérémie Rénier combat dans « Ni le ciel ni la terre », film présenté à la Semaine de la critique. Progressivement envahi par le doute et la folie, il doit faire face à la disparition de ses hommes, au sein d'un paysage aride obsédant. Entre mysticisme local et cartésianisme tout occidental, c'est au choc de deux cultures que l'on assiste, dans un univers hostile.

Ce même désert est exploité totalement différemment par le George Miller de « Mad Max : Fury road », qui en fait un lieu graphique et fascinant, support d'un road-movie à couper le souffle. Charlize Theron affronte une horde d'hommes devenues créatures, dans un monde en manque d'eau, où une tempête de sable aux nuages électriques vous laissera cloué à votre siège. Un voyage tout simplement inoubliable.


Terminons par l'incursion obsédante en Amazonie, de deux expéditions à des dizaines d'années d'écart. « El abrazo de la serpiente » fut l'une des révélations de la Quinzaine des réalisateurs, invitant à un voyage au temps de explorateurs et des colonisateurs, posant les rouages de la disparition d'un peuple, et questionnant le lègue entre générations. Jusqu'à la folie, nous accompagnons les deux personnages de blancs, guidé par un indigène mystérieux. Envoûtant.

Olivier Bachelard

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