Livrant leur 17e long métrage avec "Avé Cesar", les frères Joel et Ethan Coen fêtent en quelque sorte leurs 30 ans de carrière au cinéma. Leur filmographie est riche de triomphes au box-office – "Intolérable cruauté", "No Country for old men", "Burn after reading", "True Grit" ont chacun dépassé les 100 millions de dollars de recette monde – autant que de succès d’estime – "Fargo", "O’Brother", "Ladykillers" sont les trois seuls à se situer entre 50 et 100 millions – et de bides – "Barton Fink", "The Barber", "A serious man" n’ont pas dépassé les 10 millions. La plupart ont toutefois marqué le septième art et ont imprégné la culture au point que des scènes, des personnages, des musiques se retrouvent cités voire copiés dans des pubs, des sitcoms, des dessins animés et donnent même naissance à une série télé ("Fargo"). L’héritage et l’influence des Coen sont immenses… De quoi se replonger dans la filmo et d’élire nos films préférés des deux frères. Voici donc le résultat de notre top 5 du meilleur des Coen pour la rédaction d’Abus de Ciné.
5// Inside Llewyn Davis
Musiques aux cœurs et révélation d’un comédien : Oscar Isaac. Seizième film des frères Coen, "Inside Llewyn Davis" raconte la quête de reconnaissance d’un chanteur de Folk qui doit quitter son New York pour se rendre à une audition à Chicago. Dans un superbe écrin, comme on en voit rarement au cinéma, "Inside Llewyn Davis" quitte le 66e Festival de Cannes avec le Grand Prix du jury. Il faut dire que le métrage bénéficie d’une photographie absolument sublime – il s’agit de leur deuxième film en noir et blanc (après "The Barber") –, d’une histoire d’une mélancolie ravageuse et d’un personnage principal fabuleux. Ce raté, hypocrite et antipathique, a quelques difficultés avec le succès qu’il cherche et qu’il fuit en même temps. Il permet de révéler Oscar Isaac (ici dans son premier grand rôle au cinéma), l’acteur remportant cinq récompenses pour ce rôle. Un film intimiste, élégant qui marque la filmographie des Coen par son originalité même à y figurer !
Mathieu Payan
4// O’Brother
Blues, gospel et road-movie homérique. Huitième long métrage des frères Coen, "O’Brother" est aussi la première collaboration entre les réalisateurs et George Clooney. Ce dernier fait partie d’un trio de prisonniers en fuite (avec les excellents John Turturro et Tim Blake Nelson) au temps de la Grande Dépression (années 30 aux Etats-Unis). L’histoire, très librement inspirée de l’Odyssée d’Homère, voit comme c’est souvent le cas chez les Coen des fuyards à la recherche d’un butin, poursuivis par un shérif, ici dans le Mississippi au son du blues et du gospel ! Les deux frères continuent dans la comédie joyeuse après avoir usé de noirceur. Ils offrent à Clooney un rôle en or, sa vraie première performance comique, qui lui vaudra d’ailleurs le prix de meilleur acteur aux Golden Globes de 2001, dans la section film musical ou comédie.
Mathieu Payan
3// The Big Lebowski
Une robe de chambre et un russe blanc s’il vous plaît ! Avec son statut de film culte, "The Big Lebowski" n’est pas tout à fait aujourd’hui le film qu’il était à sa sortie en 1998 ! Le Dude (inoubliable Jeff Bridges, bouc mal rasé, sandales et robe de chambre dépareillés) a depuis marqué durablement les esprits de sa cool attitude, de son flegme et de sa nonchalance, un gars simple au grand cœur confronté à une histoire qui le dépasse et malencontreusement aidé par son meilleur ami, un vétéran du Viêt-nam, qui a la gâchette un peu trop facile ! C’est la folie du scénario et des personnages qui le peuplent qui font tout le charme désopilant de ce septième film des frères Coen. Le métrage envoie valdinguer tout conformisme et laisse au placard toute idée réfléchie et sérieuse ! L’humour noir devient presque gras, accumulant plaisanteries et bouffonneries à se tordre de rire. Et puis que serait devenu le russe blanc, si les Coen ne l’avait pas, à cette occasion, remis au goût du jour ?
Mathieu Payan
2// No Country for Old Men
Polar westernien à moumoute. Douzième film des Coen, "No Country for old men" est en quelque sorte la quintessence de tout leur cinéma. Entre western, polar, thriller, film policier, les genres de prédilection des deux frères se croisent tout comme leurs thèmes fétiches : argent sale, vengeance, poursuite, destin funeste, immoralité… Le film a obtenu quatre Oscar, une consécration en plein milieu de leur carrière : le film obtient les statuettes de meilleur film, meilleurs réalisateurs, meilleur scénario adapté et meilleur acteur dans un second rôle pour Javier Bardem. L’acteur « perruqué » comme jamais compose un personnage effrayant doté d’une arme redoutable et encore jamais vue au cinéma ! Les scènes se succèdent avec un talent fou après avoir commencées par une longue introduction sans parole qui à elle seule confirme qu’ils sont purement et simplement des génies de la mise en scène…
Mathieu Payan
1// Fargo
Humour glaçant rouge sang. Sixième film des Coen, Fargo remporta le prix de la mise en scène à Cannes en 1996, les oscars du meilleur scénario et de la meilleure actrice (pour Frances McDormand) en 1997. Près de 20 ans après, une brillante série inspirée du film fait les beaux jours de Netflix. On pourrait s’arrêter là, oubliant ce que le film a d’iconique, en plus d’être un chef-d’œuvre du film policier. Fargo ne saurait être réduit à sa mise en scène implacable de la bêtise à l’œuvre dans l’Amérique redneck. Il porte en lui ces images d’étendues enneigées qui impriment la rétine et ensevelissent les personnages, prisonniers de leur environnement. Le Dakota du Nord se mue en théâtre de la condition humaine, de la vacuité de l’existence, où seuls les justes sont sauvés. Mais pas de cynisme chez les Coen, dont l’humour acerbe ne fait que souligner l’absurdité de ceux qui perdent la vie à vouloir en violenter le cours imperturbable. Imperturbable comme un hiver enneigé…
Thomas Bourgeois
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Mathieu Payan
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