Une fois de plus, quelques films se sont distingués par leur originalité, leur forme s'avérant soit déroutante, soit captivante, parfois les deux à la fois. Il en va ainsi de l'abscons « Under electric clouds » de Alex German Jr, présenté en compétition, dont l'intrigue paraît très vite incompréhensible, mais dont les plans captivent par leur envoûtante beauté. Un film que l'on aurait aimé apprécier pour le fond, mais qui nous a, il faut bien l'avouer, laissé sur le carreau.
De son côté, Terrence Malick a continué à creuser le style qui a fait son succès avec « Tree of life » et lui a valu en 2011 la Palme d'or. Ayant présenté l'an dernier « À la merveille » au Festival de Venise, c'est sensiblement à la même histoire de quête qu'il nous convie cette fois-ci avec « Knight of cups », traçant le destin d'un scénariste d'Hollywood (Christian Bale), cherchant la femme de sa vie et sa continuité dans la paternité. Adoptant un montage serré et utilisant une caméra flottante, comme volant des moments d'intimité à ses acteurs, saisissant par des gros plans la moindre caresse ou élan de tendresse, la beauté des plans subjugue autant que l'utilisation de la musique classique. Malheureusement, le monde fantasmé de Malick, où les femmes sont toutes des top-model et virevoltent à la moindre occasion, finit par agacer sérieusement.
Autre expérience, la plongée dans l'underground berlinois proposée par Sebastian Schipper dans « Victoria », reparti d'ici avec le Prix de la contribution artistique pour le cadrage. Filmée en temps réel, cette descente en enfer d'une jeune espagnole fraîchement installée en Allemagne et embringuée par une bande dans un casse, possède certes des coupes, mais maintient un rythme d'enfer générant une réelle angoisse chez le spectateur. Alliant une esthétique nocturne et une caméra à l'épaule saisissant au plus près le stress de personnages dépassés par les événements, le film n'assume plus son réalisme dans les dernières minutes d'un scénario qui choisit certaines facilités, mais réussit à proposer des moments de répit où l'émotion affleure finalement. Un joli coup.
Guy Maddin, habitué de la Berlinale, a une nouvelle fois surpris son monde en proposant d'exhumer (ou plutôt de terminer) des films jamais finis ou détruits, et en les réunissant dans un unique long métrage de deux heures intitulé "The forbidden room" ("La chambre interdite"). Tournant un film par jour aux musées d'art moderne de Paris (Centre Pompidou) et de Québec, il invita ses acteurs à des séances de spiritisme invoquant l'esprit du film disparu, avant d'en assurer le tournage dans la journée. Cela donne plus de 25 histoires imbriquées les unes dans les autres avec brio, pour des montagnes d'aventures, d'humour sexué et d'extravagance, le tout fidèle au reste de la filmographie de l'auteur, imitant de vieux films, parfois muets ou en noir et blanc, à la pellicule abîmée.
Enfin, l'auteur argentin Marco Berger (« Plan B ») nous a livré une belle leçon d'écriture minutieuse avec « Mariposa ». Il y développe deux histoires parallèles, partant d'un effet papillon qui fait qu'un bébé est soit abandonné en forêt, soit conservé par une famille. Le désir, l'attirance, eux, restent intacts, quelles que soient les situations et trajectoires des personnages, donnant au final une certaine idée du destin. Une œuvre radiante, d'où émane sincérité et sensualité, grâce à une troupe de jeunes interprètes parfaitement castés.
Olivier Bachelard
Cinémas lyonnais
Cinémas du Rhône
Festivals lyonnais