PORTRAIT

TIM BURTON

Réalisateur

Portrait

© Warner Bros.

Réalisateur mystérieux, metteur en scène de génie et graphiste talentueux, Tim Burton est devenu un maître des univers fantastiques et gothiques. Véritable conteur d’histoire, amoureux de l’image, son œuvre, fortement inspirée par Edgar Allan Poe, est marquée par des thèmes récurrents, notamment la mort, la marginalité et l’anticonformisme, l’enfance ou encore la critique de la famille américaine moyenne. Aujourd’hui, il est l’un des seuls à allier succès public et réussite critique, à avoir un univers aussi marqué et tourné vers l’esthétique tout en multipliant les couronnements financiers.

Tim Burton est né Timothy Walter Burton, le 25 Août 1958 à Burbank, en Californie, d’une mère gérante d’une boutique de cadeaux, et d’un père coach sportif. Aîné de la famille, le jeune garçon passe la plupart de son enfance seul, ne cherchant pas à se faire d'amis. Introverti, il préfère s’enfermer dans sa bulle et se consacrer à sa passion : dessiner. Mais ce qu’il aime dessiner, ce ne sont pas les maisons sous un beau soleil mais plutôt des monstres, toujours plus effrayants. Celui-ci passe alors beaucoup de temps dans les salles obscures, dévorant chaque film fantastique ou horrifique et s’enthousiasmant devant les prestations de celui qui va devenir son idole, Vincent Price. Frankenstein et Godzilla seront ainsi ses références durant sa jeunesse. Collectionnant les cartes représentant des monstres, le petit garçon s’amuse à les redessiner. Inventif, il se badine en créant ses propres monstres, notamment pour effrayer le fils des voisins. Son univers ne cessant de croître, il se met à raconter ses premières histoires, son imagination et son esprit semblant être sans limite. Plus il grandit, plus son don pour le dessin va grandir mais plus il va se renfermer sur lui-même, sa seule délectation étant lorsqu’il a un crayon à la main. Ses parents, bienveillants, s’inquiètent de l’univers morbide des esquisses de leur enfant, situation qui sera à l’origine de nombreux conflits entre Tim et son père. Néanmoins, ses dessins constituent son seul moyen d’expression et rien ne semble pouvoir arrêter l’enfant de croquer, c’est pourquoi ils se résignent à encourager leur fils dans cette voie, non sans une certaine nonchalance. Talentueux, l’adolescent remporte ainsi un concours pour embellir les camions de la ville. Même s’il n’éprouve aucun plaisir à étudier, passant le plus clair de son temps, dans ses pensées, à rêvasser à ses futures œuvres, le jeune homme n’abandonne par pour autant l’école, conscient que le seul moyen de pouvoir rentrer dans une école d’art est d’obtenir son diplôme. Une fois celui-ci en poche, c’est tout naturellement qu’il s’inscrit au California Institute of Arts.

Ses professeurs sont alors frappés par sa précocité, ce dernier possédant un univers tant marqué pour quelqu’un de son jeune âge. Tim Burton se sent enfin à sa place, compris par d’autres, et commence à s’ouvrir à ses semblables. Assidu et obstiné, il ne compte plus les heures qu’il passe devant une feuille blanche; développant ses talents de conteur, il s’amuse à mettre en scène quelques petits personnages récurrents, inspirés des vieux films d’horreur dont il est toujours accroc. A la fin de ses études, il multiplie alors quelques petits boulots, dessinant des pochettes d’albums de groupes locaux notamment, mais rapidement, il se fait embaucher par Disney. Il est alors chargé de travailler sur les concepts-art de « Taram et le chaudron magique » et « Rox et Rouky », malheureusement, les deux expériences s’avèrent être peu fructueuses, Burton ne parvenant pas à dessiner pour des projets aussi éloignés de son univers. Mais les pontes de Disney, persuadés du talent du jeune garçon, ont confiance en lui et lui accorde le financement de son premier court-métrage, « Vincent », en 1982. Néanmoins, face à la noirceur de l’œuvre, le studio refuse toute distribution mais conscient du talent de leur prodige, ils décident de lui offrir une seconde chance en lui proposant de mettre en scène « Frankenweenie ». Une fois encore, le résultat ne plaît pas au studio qui ne peut accepter un court aussi sombre et morbide. Tim Burton, ne pouvant sacrifier son univers, ne peut se résigner à accepter les conditions imposées par Disney et préfère quitter le studio, afin de voler de ses propres ailes. La chance va alors commencer à lui sourire.

La Warner Bros, ayant passé un contrat avec l’acteur Paul Rubbens pour donner vie à son personnage de Pee-Wee Herman, cherche de toute urgence un réalisateur, aux prétentions financières peu élevées de préférence. C’est ainsi que leur chemin va croiser celui de Tim Burton, en 1985, libre de tout contrat depuis son départ de chez Disney. Tournant pour une bouchée de pain, dans un temps record de quatre semaines, « Pee Wee Big Aventure » connaît un certain succès public et pose les fondations de son univers cinématographique futur, entre fantastique et onirisme. Le grand public va alors le découvrir définitivement, trois ans plus tard, avec « Beetlejuice », fable morbide, délicieusement décalée, et point de départ de sa collaboration avec Michael Keaton (qui se poursuivra avec les deux volets de Batman). En 1990, « Edward aux mains d’argent » consacre le poétisme morbide à qui Tim Burton va donner ses lettres de noblesse et marque le début de son amitié avec Johnny Depp, pour qui il sera le seul metteur en scène capable de s’adapter à son talent pour l’aiguillonner au-delà de ses limites. Depp va alors incarner des personnages, toujours plus solaires, toujours plus marginaux, sans jamais cacher la folie qu’ils possèdent, pour le metteur en scène, celui-ci trouvant enfin son alter-égo, celui à qui il peut confier les rôles les plus improbables pour pérenniser son univers fantastico-horrifique (« Charlie et la chocolaterie », « Sleepy Hollow », « Sweeney Todd », « Dark Shadows »).

S’entourant d’une bande d’acteurs à qui il peut tout demander (Depp, Helena Bonham Carter, Michael Gough, Christopher Lee…), Tim Burton n’hésite pas à revisiter à sa sauce « La Planète des singes » ou encore le conte « Alice aux pays des merveilles », relecture qui marque son retour chez Disney, oubliées les incompréhensions et incompatibilités du passé. Fou de l’image, touche-à-tout, celui-ci accorde un soin méticuleux aux décors et aux costumes, obsession encore plus marquante pour ses films d’animation (« Les Noces Funèbres », « Frankenweenie »). Si ces films sont le signe d’un univers sombre où règne toutefois une poétique indéniable, ils sont aussi bien souvent satiriques et pamphlétaires, notamment en ce qui concerne la famille américaine ordinaire. Libre et désinvolte, Burton rêve aussi d’un monde à son image, c’est pourquoi il s’efforce de décrier les habitudes et les codes de cette société routinisée. Si certains lui reprochent de ne plus se renouveler, d’avoir perdu la “Burton Touch” au détriment d’un banal gothique, en se contentant du minimum, Tim Burton n’en demeure pas moins l’un des réalisateurs les plus inventifs, à l’univers le plus marqué, et aux choix artistiques les plus osés et libérés des contraintes du système hollywoodien.


Le saviez-vous ?

Tim Burton est tombé éperdument amoureux de l’actrice Helena Bonham Carter lors de leur première collaboration sur « La Planète des singes ». Celle-ci, en plus de devenir l’une de ses actrices fétiches, est également la mère de ses deux enfants.

Filmographie sélective

2012 : Frankenweenie
2012 : Dark Shadows
2010 : Alice aux pays des merveilles
2008 : Sweeney Todd, le diabolique sorcier de Fleet Street
2005 : Les Noces funèbres
2005 : Charlie et la Chocolaterie
2004 : Big Fish
2001 : La Planète des singes
2000 : Sleepy Hollow, la légende du cavalier sans tête
1997 : Mars Attacks !
1995 : Ed Wood
1992 : Batman, le défi
1991 : Edward aux mains d’argent
1989 : Batman
1988 : Beetlejuice
1985 : Pee Wee Big Aventure

Christophe Brange
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