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Venise 2006 - Jour 9 - Branagh magique


Jeudi 07 septembre 2006

8H30 - Hors compétition - LA FLUTE ENCHANTEE de Kenneth Branagh

Kenneth Branagh était resté silencieux depuis son "Peines d'amours perdues", adaptation de Shakespeare, certes très théâtrale, mais mêlant astucieusement textes en vers, décors et costumes des années 30 et chansons classiques des années 30 à 50. Après avoir fait uniquement l'acteur pendant quelques années, le voici de retour derrière la caméra. Et il rend cette fois-ci hommage à Mozart en adaptant son opéra: "La flûte enchantée". Sous sa baguette naît un film magique, visuellement superbe où les effets spéciaux créent une vision du front intéressante et surréaliste dans un monde relevant à la fois du médiéval et des années 30, aux coloris très riches.

Malgré la statique d'un des interprètes au charisme pourtant important (le supposé "méchant"...), son opéra est bien plus que mis en images. La magie et la poésie sont bien là, Branagh sachant toujours insuffler un humour bienvenu, ici par une gestuelle parfois proche du cinéma muet, et surtout par la virtuosité de ses mouvements de caméra ou effets de foules. Quelques scènes nous emportent littéralement dans un autre monde, lorsque le messager parcoure les tranchées ou quand la reine virevolte dans le ciel.

Si les dialogues par moments sont très durs à comprendre sans sous-titres, on pourra aussi se laisser aller à apprécier simplement la musique, en saisissant uniquement l'essentiel des situations dramatiques. Le plaisir n'en sera nullement diminué tant la mise en scène est somptueuse. Un film à découvrir en France pour Noël.

10H45 - Compétition - NUE PROPRIETE de Joachim Lafosse

Voici un premier film belge à classer parmi les excellents thrillers intimistes du même acabit que "La cérémonie" de Claude Chabrol. "Nue propriété" montre comment des questions de succession après un divorce peuvent gâcher la vie d'une famille, soudée malgré elle autour d'une maison. La montée en tension est ainsi parfaitement orchestrée, jusqu'au point de rupture, inévitable.

Isabelle Huppert est simplement magistrale, entre manipulatrice insensible et mère boudeuse. Jérémie Rénier lui tient tête, en garçon buté et perturbant de mauvaise foi. Les dialogues sonnent toujours justes et font croire à ces affrontements qui finissent par jouer aussi sur nos nerfs. Une guerre d'usure des plus confondante.

13H00 - Hors compétition - BELLE TOUJOURS de Manoel De Oliveira

Pour une fois, Manoel De Oliveira nous livre un film plutôt bien écrit, aux dialogues intelligents, nous offrant des discussions de comptoirs loin d'être habituelles. En référence et hommage au film de Bunuel "Belle de jour", qu'il conviendrait de revoir pour mieux apprécier, il nous offre un beau face à face entre Michel Piccoli et Bulle Ogier, autour des obsessions et phantasmes passés d'une femme.

Le film, drôle et sombre à la fois, est servi par des interprètes impeccables, hormis Eleonore Baldaque, dont le phrasé sonne décidément toujours faux. Le remarquable jeune acteur portugais qui fait office de Barman sera certainement lui quelqu'un à suivre. Mais on ne peut s'empêcher de se dire que décidément Oliveira n'écrit jamais mieux que pour des personnages âgés, livrant souvent des mots bien peu à propos dans la bouche des plus jeunes.

17H00 - Journées des auteurs - OFFSCREEN de Christopher Boe

Tourné en caméra vidéo, le nouveau film du Danois Christopher Boe (caméra d'Or à Cannes pour Reconstruction) nous montre un faux montage de la vie quotidienne d'un acteur qui aurait décidé de se filmer en permanence. Un point de départ déjà vu dans d'autres films ("Ed's tv"...) mais qui prend ici la forme de l'inquiétante descente aux enfers d'un homme emporté par son obsession de filmer.

Celui-ci fait peu à peu le vide autour de lui, perdant la confiance de ses proches comme de ses collègues. Troublant, le film montre comment la caméra déshumanise le rapport avec les autres, et met en images un dérape progressif devenant carrément incontrôlé. Boe se plonge allégrement dans le gore et ose même faire que son personnage prenne conseil auprès d'un réalisateur de ses amis: Christopher Boe, qui joue son propre rôle. Faux documentaire aux images quasi amateurs, "Offscreen", ne serait rien sans son inquiétant interprète principal littéralement habité, et bien peu mis en valeur par une image vidéo au gros grain.

Conclusion

C'est l'heure du départ, demain seront projetés les deux derniers films de la compétition, THE GOLDEN DOOR d'Emmanuel Crialese et BUGMASTER de Katsuhiro Otomo. De quoi créer peut être la surprise dans une compétition qui paraît dégager comme favoris le Johnnie To, le Stephen Frears et le Alfonso Cuaron. A vos paris.

Source: OB

09/09/06

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