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Venise 2006 - Jour 7 - Le western de Johnnie To comme favori?


Mardi 05 septembre 2006

8H30 - Hors compétition - SUMMER LOVE de Piotr Uklanski

Présenté en séance de minuit voici venu un déroutant western polonais. Parodie assumée des films de cowboys d'antan, de John Wayne à Eastwood, son personnage principal rappel les héros flegmatiques de notre enfance. Dans une ville minimaliste, avec son Saloon (le french palace) et son bureau du sheriff pour uniques bâtiments, celui-ci débarque dans l'espoir de se faire payer la récompense promise pour la capture d'un homme. Et belle surprise, cet homme est interprété par Val Kilmer, au corps duquel il arrivera bien des choses durant le récit. Le film ne vaudrait d'ailleurs le coup d'oeil rien que pour cela, et l'on reste amusés par le fait que l'acteur américain ait accepté ce "rôle".

Baigné dans une musique parodique (mêlant harmonica et trompettes), assumant parfaitement des dialogues et des poses face caméra hallucinant et hallucinés, et portant ses personnages totalement barrés (le Sherif maso, qui joue à se faire taper dessus et aime saigner, la tenancière de bordel délurée...), le film va jusqu'au bout de sa logique. Sans pour autant provoquer le rire de manière systématique. Un bon moment pour les cinéphiles avertis.


10H45 - Compétition - LA STELLA CHE NON C'E de Gianni amelio

Ce film italien en compétition tourne autour d'un duo de personnages: un technicien italien persuadé qu'une machine achetée par les chinois a un point faible qu'il sait réparer, et la jeune traductrice de l'entreprise en question. Récit d'un parcours désespéré pour retrouver cette machine sur le territoire chinois, le film est surtout le portrait d'un homme sujet à la frustration provoquée par la délocalisation, et qui poursuit une chimère, voulant être encore lui même utile par son travail. Cet état d'esprit, finement montré, lui permet de tenir... face à deux systèmes qu'il ne comprend pas.

Un peu avare en émotions, le film a le mérite de montrer de l'intérieur le gigantisme des moyens de transport comme des usines d'un pays en pleine industrialisation. Effrayantes dans l'isolement qu'il provoque pour le personnage principal, qui ne parle pas la langue, ces contrées semblent aussi faire peu de cas de l'humain, comme le montrent quelques plans de petites filles aux vêtements colorés perdues dans des décors sans âmes, le long de murs gris, ou assises dans la poussière. Leurs gestes simples et quotidiens (l'une se frotte les yeux, l'autre mange dans une gamelle...) contrastes avec l'environnement totalement artificialisé qui les entoure.

Sur les questions économiques, le film reste très peu critique d'un point de vue politique, préférant se placer sur le plan humain. Pouvoir tourner là-bas, en Chine, valait peut être bien quelques concessions scénaristiques pour pouvoir montrer les évolutions locales de l'intérieur. Saluons enfin la sensibilité des interprètes, avec une jeune actrice habitée, toute en discrétion face à la fougue emportant parfois l'italien Sergio Castellito.

13H00 - Compétition - EXILED de Johnny To

Voici enfin le film qui pourrait mettre l'ensemble des jurés d'accord. Johnnie To, réalisateur asiatique des plus prolifique (on a découvert à Cannes, il y a quelques mois, son "Election 2") nous revient avec un western moderne des plus réjouissant. Usant de plans calibrés sur mesure, peaufinant une fluidité des mouvements de caméras déjà fort maîtrisés, il utilise de nombreux ralentis à bon escient, provoquant des rictus amusés dans les pires situations. Accumulant les références aux westerns, il réussit des scènes d'actions sublimes à l'irréalisme esthétisant, comme de belles et fortes ellipses sur l'amitié.

On croit à la complicité qui lie ces amis de jeunesse, et l'émotion nous étreint alors qu'ils cherchent à protéger l'un des leurs, sa femme et sa toute jeune fille. Le scénario prend en permanence à contre-pied les situations du genre, et Johnnie To fait une utilisation intelligente de certains codes, comme les cigares, symboles de position de chef dans les gangs mafieux, ou l'harmonica et la cigarette, signe de la nonchalance du cow-boy. Sauf que cette fois-ci les cow-boy vivent dans le Far East. On va donc de surprise en surprise avec ce film. Du grand cinéma, qui ne saurait repartir de Venise sans un prix.


20H15 - Semaine de la critique - SUR LA TRACE D'IGOR RIZZI de Noël Mitrani

Du coté de la semaine de la critique nous avons l'occasion de découvrir un petit film français surprenant. "Sur la trace d'Igor Rizzi" relate la vie quotidienne faite de braquages et de petites arnaques d'un ancien footballeur ruiné. Par l'utilisation de la voix off, le réalisateur nous donne une idée du passé de cet homme, et surtout de son grand amour avorté, sans pour autant relier ces commentaires à l'histoire qui se déroule sous nos yeux.

Un peu déroutant au départ, ce principe nous permet de suivre deux histoires en parallèle, les deux se rencontrant au travers de la situation précaire actuelle du personnage, qui ira jusqu'à accepter de tuer quelqu'un pour quelques milliers de dollars. Laurent Lucas, méconnaissable avec moustaches, lunettes de soleil et bonnet, interprète cet ancien sportif qui ne semble pas avoir deux grammes de jugeotte. Et on s'amuse du ridicule de son entraînement, comme de sa crédulité. Un bon film qui se déroule à Montréal (Québec) en plein hiver.

22H30 - Compétition - EUPHORIA de Ivan Vyrypaev

Le film russe de la compétition, s'il adopte un récit linéaire d'une banale histoire d'adultère en gestation, surprend par ses qualités esthétiques et formelles. Mettant en valeur de grands paysages par de sublimes plans larges ou survols de la toundra, et baignant dans une musique dramatique, "Euphoria" prend une dimension mystique qui vous hante longtemps après sa vision.

Certains trouveront qu'il s'agit là d'un exercice de style maniéré. D'autres se laisseront emporter par le rythme de cette fable où la passion trouve une résonance dans une nature à dimension sur-humaine. A découvrir.

Source : OB

06/09/06

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