Alors que la flopée d’avant-premières continue à fleurir dans les salles de L’Etrange Festival, nous avons choisi de voir le dernier film d’Agnès Merlet, cinéaste iconoclaste et rare (« Le Fils du requin », « Artemisia », « Dorothy »). A défaut d’être réellement convaincant, « Hideaways » (+1), joli conte sur l’amour et le droit à la différence, a apporté un peu de fraîcheur dans une sélection forcément brute de décoffrage. Pourtant, si le récit de cet homme affligé d’un don encombrant et obligé de s’isoler dans les bois est beau (mais archi-prévisible), la mise en scène de l’auteure a fâcheuse tendance à s’étendre sur des plans inutiles. Le métrage aurait pu, sans peine, être allégé d’une vingtaine de minutes. Du coup, le récit (qui peut se résumer en trois lignes) n’arrive jamais à émouvoir comme il le devrait et le film finit parfois par friser l’ennui.
La suite de la journée aura été plus enthousiasmante avec, tout d’abord, un superbe hommage au cinéaste Jean Rollin, décédé le quinze décembre dernier alors que le documentaire en question « Jean Rollin, le rêveur égaré » (+3) de Damien Dupont et Yvan Pierre-Kayser était en montage. Réalisateur franc-tireur et anarchiste, Jean Rollin, qui a tout de même réalisé une trentaine de films en quarante ans (dont, il est vrai, des films classés X sous le pseudonyme de Michel Gentil), a de tout temps été déprécié par les critiques. Pourtant, chacun de ses plans est facilement identifiable tant ils portent la marque de leur auteur. Le métrage revient sur toute la carrière du metteur en scène, de son premier film inachevé « L’Itinéraire marin » (dont les dialogues étaient tout de même de Marguerite Duras) à ses premiers films de vampires, de son aventure dans le cinéma X qui ne l’intéressait guère (le plus souvent les plans de sexe n’étaient pas de lui mais de son assistant réalisateur) à son plaisir tardif pour l’écriture de romans. Commenté par de nombreux intervenants (le journaliste Jean-Pierre Bouyxou, le dessinateur Philippe Druillet, les actrices Brigitte Lahaie ou Ovidie…) et entrecoupé de brefs extraits de films, « Jean Rollin, le rêveur égaré » vous apprendra forcément quelque chose sur le réalisateur « qui filmait ses rêves », même si vous pensez tout connaître de sa vie.
Second coup de cœur de la journée, « Confessions » (+3) de Tetsuya Nakashima (« Kamikaze Girls »), un film choc sur la violence juvénile au Japon, la mort et la vengeance.
Partant de confessions qui changent sans cesse de narrateurs et de points de vue, le métrage conte la cruelle vengeance d’une professeure dont la petite fille de quatre ans est morte dans la piscine du lycée. Connaissant les deux coupables (deux de ses élèves), elle décide de leur faire boire du lait mixé avec du sang contaminé par le virus HIV. Impossible d’en dévoiler davantage tant le scénario, basé sur un livre de Kanae Minato, fait preuve d’imagination, fragmentant les différents récits dans une mosaïque pourtant totalement cohérente. La mise en scène est au diapason, jouant avec les divers personnages et la temporalité avec une grande dextérité, qui nous mène sans cesse par le bout du nez avant de nous dévoiler la terrible vérité. En outre, « Confessions » peut se voir telle une sorte de thriller dramatique froid comme la mort (et comme son esthétique bleutée), dont les éclats de violence dévoilent l’envers des apparences d’un pays aux façades trompeuses. Un must à voir absolument.
Source: Christophe Hachez
05/09/11
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