L'ambivalence du jour des enfants
Aujourd'hui les sentiments ont été bien différents d'une séance à une autre, lors de cette journée où l'un des événements centraux consacrait le cinéma jeunesse. En effet, la grosse séance de l'après-midi était bien sûr celle de la Halle Tony Garnier. Cette année Toy Story a été choisi pour le public d'enfants toujours aussi nombreux et expressifs lors des projections. Ils ont eu l'air d'avoir apprécié ce spectacle qui représenta une vraie révolution dans le monde du cinéma. Effectivement, le long-métrage de John Lasseter, qui était présent à Lyon pour une master class, est le premier film réalisé entièrement à l'ordinateur avec des images de synthèse en 3D. Bien sûr le jeune public n'aura vu que l'humour, qui marche encore, mais comme chaque année, quelques cinéphiles se seront sans doute découverts lors de cette séance.
D'un autre côté, les séances proposées étaient plus sérieuses, et parfois plus sombres les unes que les autres. Par exemple, dans le cadre de l'hommage annuel au cinéma québécois, le film Les Fous de Bassans d'Yves Simoneau était projeté au Pathé Bellecour. Claude Fournier et Marie-José Raymond de la société Eléphant (chargée de la restauration du patrimoine cinématographique du Québec) étaient présents pour introduire le travail de leur compatriote. Et le hasard faisant bien les choses, une des actrices du long-métrage, Laure Marsac, était à Bellecour pour présenter une autre séance, elle est donc venue partager avec le public quelques souvenirs de tournage. Et tous n'avaient qu'un mot à la bouche : la cruauté, ce que ce film représente à la perfection. On suit le retour d'un homme dans sa ville natale située sur une île québécoise, cinq ans après son départ. Les choses ont peu changées et son arrivée va déclencher la chute inexorable de la communauté à l'apparence soudée de ce bout de terre au milieu des eaux et du vent. Yves Simoneau nous sert de l'humanité cruelle au possible, choque et dérange par ses scènes crues et ses personnages torturés. Une découverte forte, qui n'aura pas laissé de marbre les personnes présentes.
Et après l'interlude enfantin du début d'après-midi, c'est reparti de plus belle dans les salles obscures avec des films plus sérieux et dérangeants. Alors que certains encensaient le travail du lauréat du Prix Lumière Martin Scorsese pour La Dernière Passion du Christ et que d'autres découvraient la paire Dewaere-Deneuve dans Hôtel des Amériques, certains sont allés assister à Journal d'une femme en blanc de Claude Autant-Lara. Ce film, qui s'inscrit dans l'hommage à la Gaumont, résonne d'une modernité folle. Tourné dans les années 60, il traite sans détour de la question de l'avortement et de la contraception dans la société de l'époque aux mœurs encore dictées par de vieilles coutumes religieuses. La femme a donc un rôle central dans cette histoire qui chamboulait beaucoup de choses lors de sa sortie, au point que les critiques furent mitigées alors que Claude Autant-Lara était déjà bien installé dans le paysage du cinéma français. Un film sérieux qui fait réfléchir, voilà qui nous détache complètement de la séance de l'après-midi et qui pose la diversité du cinéma mondial mis à l'honneur dans le festival lyonnais.
Pour finir cette journée on ne peut plus diverse, l'Auditorium de Lyon proposait son premier ciné-concert de l'édition 2015 avec, en projection, des films muets de Gaumont, qui fête en même temps que le cinéma ses 120 ans. Pour l'occasion, Thierry Frémaux a joué les présentateurs, introduisant d'une petite histoire du cinéma chaque ''entracte'' qui vient couper les films. Ceux-ci ont tous été accompagnés au piano. Étant un grand habitué du festival et un amoureux des ciné-concerts, Laurent Gerra a rejoint le directeur de l'Institut Lumière sur scène, pour l'aider dans ses introductions. Belle conclusion, donc, pour une journée riche en émotions.
Source: Quentin Chirol
15/10/15
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