Samedi 04 septembre 2010
Le deuil comme parcours
Dans une petite ville de Russie, un homme ayant perdu sa femme, demande à l'un de ses collègues et amis, de l'accompagner dans un voyage de trois jours pour emmener le corps dans un autre lieu. "SILENT SOULS" commence dans une ville oubliée, là où les ponts sont restés flottants et arborent des planches à la solidité incertaines, là où les usines sont en ruines et les escaliers rouillés. Au beau milieu de ces paysages dégradés subsistent encore des êtres de chair et de sang, qui vivent surtout de leurs souvenirs, ceux d'une femme disparus, ceux d'un père complice.
Ce film russe, présenté en compétition, donne à voir de nombreuses traditions locales, souvent méconnues, retraçant grâce à la voix-off du personnages principal, les souvenirs les plus intimes et secrets de son ami, récemment devenu veuf. Après une longue scène de nettoyage du corps de la dame, ceux-ci l'embarquent dans un périple de douleur qui deviendra tendresse. Présentant méticuleusement, au fil de leur parcours, et sous forme de flash-back, leurs souvenirs parmis les plus chers, "Silent souls" réussit doucement à émouvoir.
La comédie la plus acide de la rentrée
Adapté d'une pièce de théâtre ayant déjà une dizaine d'années, le nouveau François Ozon, "POTICHE" réjouit d'emblée par la densité et l'originalité de son casting, au coeur duquel brille Fabrice Lucchini, en patron aussi odieux que calculateur. Donnant la réplique à Catherine Deneuve (sa femme, alias la "potiche" de service, celle à qui on ne demande jamais son avis), Karine Viard (sa secrétaire, douée pour "sa petite spécialité"), Judith Godrèche (sa fille), Jérémie Rénier (son fils, artiste et snob sur les bords) et Gérard Depardieu (le député-maire communiste), il s'adonne pour une fois à un rôle loin des beaux-parleurs intellos habituels.
Charge à peine dissimulée contre l'état d'esprit sarkoziste (mépris des travailleurs, régression sociale et "travailler plus pour gagner plus"), le scénario de "Potiche" réjouit par son humours, ses délires quant au passé des personnages (bien moins lisse qu'il n'y paraît) et ses dialogues déjà cultes, Deneuve mettant fourrures et colliers de perles pour aller dialoguer avec les syndicalistes et déclarant avec applomb: "c'est pour eux que j'ai mis mes bijoux; après tout, sans eux je n'en aurais pas; il faut bien qu'ils en profitent un peu" ! De quoi se réjouir, en cette rentrée sociale qui s'annonce plus qu'agitée.
Panne sèche
La comédie italienne portée par Silvio Orlando, "LA PASSIONE", a reçu auprès du public vénétien un accueil triomphal. Il faut dire que l'acteur, récompensé il y a deux ans pour "Le papa de Giovanna" sait interpréter à merveille les hommes dépassés et fatigués. Il joue ici le rôle d'un metteur en scène en panne d'inspiration, qui n'a pas fait de film depuis 5 ans et doit trouver rapidement une idée pour satisfaire son agent et une jeune star de la télévision, qui rêve de tourner avec lui. Mais comme les obstacles aiment à s'amonceler, il se retrouve coincé dans un village de Toscane, faute à un dégât des eaux dans l'un de ses appartements, qui a de plus détérioré une peinture de valeur dans l'église voisine. Obligé en échange du silence des élus locaux, il va devoir monter un 5 jours une représentation théâtrale de la Passion du Christ. De quoi révéler son inspiration.
D'originalité, le scénario n'en manque pas, accumulant avec un certain sens du rythme, les idées farfelues, du comédien de rue qui doit son succès au hasard, à l'acteur gothique, présentant la météo à la manière d'un effrayant sermon de prêtre, jusqu'aux fausses idées de pitch, montrées en inserts couleur sépia, plus ridicules les unes que les autres... Les préparatifs amateurs de la pièce et les ennuis qui s'acculument sont un vrai régal à suivre et la critique de la piètre qualité du cinéma italien actuel plutôt réussie. Bref, il s'agit là d'un bon moment assuré.
Même pas peur
Les films des frères Pang ne sont pas des plus efficaces, mais ils rencontrent en général un certain succès, que ce soit pour le retournement de situation final qu'ils réservent ("The eye") ou pour leurs qualités esthétiques dans la peinture de mondes abstraits ou fantastiques ("Re-cycle"). "THE CHILD'S EYE (3D)" ne fait malheureusement partie d'aucune des deux catégories, laissant augurer du pire dès les premières minutes. Car outre quelques plans au travers d'un grillage, l'exploitation de la 3D n'est pas d'une originalité folle, quant au scénario il est aussi compliqué qu'incompréhensible, cumulant tous les clichés du film d'horreur asiatique des dix dernières années: fantôme féminin aux cheveux noirs, crissements ou cliquetis sensés être inquiétants, enfants séquestrés, expériences étranges, infirmes angoissants...
Mais ce qui est le plus inquiétant, c'est sûrement l'absence de cohérence de la mise en scène et le désintérêt pour une interprétation crédible. Outre le fait que l'héroïne principale (comme ses 5 autres jeunes compères) jouent foncièrement comme des pieds, il faut bien avouer que les effets sont voués à l'échec les uns après les autres. Les enfants et le chien présentés comme source d'angoisse pour les personnages n'ont strictement rien d'inquiétant, la musique est utilisé totalement à contre emploi, accentuant artificiellement des moments où il ne se passe rien et soulignant inutilement d'autres (chaque jappement du chien accompagné d'un coup de tambour: ridicule !). Enfin, ce n'est pas la double fin, préparant une possible suite, mais à laquelle on ne comprend strictement rien qui sauvera le film du désastre.
Egalement présentés ce jour:
"Noir océan" de Marion Hansel
"Naomi" de Eitan Zur
Source: Olivier Bachelard
05/09/10
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Cinémas du Rhône
Festivals lyonnais