Adapté d'une bande dessiné de Paco Roca, par Ignacio Ferreras, réalisateur dont on n'a vu ici le visage ou la silhouette qu'au travers d'un petit croquis, « Arrugas » (les rides, en français) est un dessin animé en deux dimensions, qui relate la longue déchéance d'un homme âgé, Emilio. La première scène, trompeuse, nous met directement dans le bain : les choses ne vont pas bien pour lui. On y découvre un couple assis face à un homme en costume, refusant de leur accorder un prêt. Face à ce refus le mari s'emporte, se lève, se met à crier... et la réalité prend le dessus : la table se transforme en lit, le costume en pyjama, et les cheveux du banquier ternissent. Cet ancien directeur de succursale bancaire n'est plus qu'un vieux monsieur qui perd les pédales et refuse non pas d'accorder un prêt, mais de manger sa soupe.
Sans transition, le voici donc admis dans une maison de retraite. Intelligemment le réalisateur dresse un parallèle entre la peur de ce nouveau lieu et les souvenirs d'enfance qui remontent (l'entrée dans une nouvelle classe où tout les élèves vous dévisagent...). Le lieu est présenté comme un monde hostile, aux longs couloirs, possédant même un étage interdit d'où proviennent des cris étouffés. Subtilement atténuée par la roublardise pratico-pratique de son guide, Miguel, le camarade de chambre argentin, la visite des lieux se fait avec un recul salvateur. Et l'on fait ainsi connaissance des cinq personnages principaux, noyau rassurant qui se rassemble à la même table pour les repas, mais qui sera implacablement amener à se déliter.
L'amitié entre ces deux vieux messieurs aux caractères opposés forme avec la thématique de l'entraide les deux piliers d'une histoire dont la tristesse est contrebalancée avec régularité par un humour toujours sur le fil du rasoir. Récit d'une dégradation annoncée, « Arrugas » fait aussi office de fable sur la recherche de la dignité, montrant à la fois les dégâts de la maladie d'Alzheimer et les stratagèmes pour la faire reculer ou la dissimuler, comme pour diminuer la solitude. Le résultat est un dessin animé aussi magique que cruel, dont les deux personnages principaux ne pourront que vous revenir en mémoire au moment de prendre la décision de mettre ou non vos parents en maison spécialisée.
Source: Olivier Bachelard
23/09/11
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