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Festival de Cannes 2012 : Compétition – Alain Resnais continue d'expérimenter à 89 ans avec Vous n'avez encore rien vu


Photo Festival de Cannes 2012 : Compétition – Alain Resnais continue d'expérimenter à 89 ans avec Vous n'avez encore rien vuCompétition
VOUS N'AVEZ ENCORE RIEN VU
de Alain Resnais
avec Sabine Azéma, Pierre Arditi, Michel Piccoli, Mathieu Amalric, Denis Podalydès, Annie Duperey, Anne Consigny...

Malgré ses 89 ans, on continue à s'étonner de la capacité d'Alain Resnais (« L'année dernière à Marienbad », « Mon oncle d'Amérique », « Cœurs », « Smoking – No smoking »...) d'expérimenter encore et toujours avec le langage cinématographique. Sa dernière œuvre, déroutante et séduisante à la fois, emmène une flopée d'acteurs célèbres dans une demeure immense, où ils assistent à la lecture du testament d'un auteur, Antoine d'Anthac. Cette lecture s'avère vite particulière, puisqu'il s'agira pour eux de juger du bien fondé de l'adaptation de sa pièce « Eurydice », par une jeune troupe de théâtre. Ainsi chacun des acteurs du film, ou presque, joue son propre rôle, hormis notamment Denis Podalydès, qui interprète l'auteur en question.

Dès le générique, « Vous n'avez encore rien vu » marque donc son originalité, puisque celui-ci devient oral, le majordome appelant au téléphone chacun des acteurs pour leur annoncer la mort de leur ami et l'étrange rendez-vous qui s'en suivra. Le verbe sera donc au centre du film, dont le scénario reprend en temps réel la pièce de Jean Anouilh (relecture du mythe d'Orphée), et mettant en perspective les interprétations différentes de chacun des invités, tous ayant déjà joué un rôle issu de la pièce au théâtre. Ainsi Sabine Azéma compose une Eurydice bien moins vulnérable que celle d'Anne Consigny. Et le jeu de Lambert Wilson en Orphée n'a rien à voir avec celui de Pierre Arditi.

Mais Resnais ne se contente pas de cette mise en abîme orale, il joue d'abord de la démultiplication des points de vue, laissant les acteurs dialoguer d'un fauteuil à l'autre, puis emplir l'espace et même déborder de celui-ci. Il utilise les reflets mis à disposition par l'agencement du salon, puis entraîne ses personnages dans des lieux extérieurs, assurant de magistrales transitions, comme celles vers le bar du bistrot de la gare ou ses quais. Il va même jusqu'à jouer l’interaction entre les acteurs réunis et les personnages de la troupe à l'écran. Plein de surprises, « Vous n'avez encore rien vu » est donc à la fois une variation sur la capacité des acteurs à transcender un texte, lui restant finalement fidèles, tout comme celle d'un réalisateur à transformer totalement une intrigue par quelques infidélités visuelles.

Source: Olivier Bachelard

23/05/12

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