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Festival de Cannes 2010: Jour 8 - réputations à sauvegarder dans le touchant Poetry et abus de pouvoirs dans le complexe My joy


Photo Festival de Cannes 2010: Jour 8 - réputations à sauvegarder dans le touchant Poetry et abus de pouvoirs dans le complexe My joyMercredi 19 mai 2010

Sauver la face

Il y a quelque chose de pourri dans les scénario de Lee Chang Dong ("Oasis", "Peppermint candy", "Secret sunshine"), quelque chose qui systématiquement derrière la beauté des gens et de leurs sentiments, vient gâcher la vie de ses personnages. "POETRY" n'échappe pas à la règle, en mettant en scène une grand mère, dont le petit fils a participé à un viol collectif. Entre soutien indéfectible, difficultés à trouver l'argent qui fera taire la famille de la jeune fille, suicidée depuis, et tentatives désespérées d'affirmer son autorité vis à vis d'un gamin en roue libre, le personnage principal se débat.

Tout est ici question d'honneur à sauvegarder: renommée de l'école, avenir des enfants, réputation de la grand mère poussée au vice par un "président" amoidri par une attaque cardiaque, et dont elle doit s'occuper jusque dans la plus stricte intimité. L'évocation des personnalités des enfants est soigneusement évitée, rendant leur crime effroyablement ordinaire. Enfin, l'amour de la poésie, véritable respiration apportant quelques scènes comiques dans une histoire plutôt triste, se révèle sur la fin, une véritable bonne idée, permettant d'aborder avec pudeur le suicide de la jeune fille.

Un système médical mis à mal

Dans le fin-fond de l'Argentine, trois femmes débarquent dans un village, pour réaliser une campagne de soins, doublée d'une enquête sociale. Installées dans un ancien hôpital sur le point d'être rasé, "LOS LABIOS" est un film social plutôt difficile d'accès, montrant le délabrement du système de soin, symbolisé parfaitement par l'état de délabrement du bâtiment dans lequel ces femmes se retrouvent isolées chaque soir, loin d'une quelconque vie sociale. Malgré tout, malgré la nervosité, le manque d'équipements, la misère ambiante, chacune aide l'autre à se passer du rouge à lettre, comme si la situation était encore normale.

La peur de la maladie

"LIFE ABOVE ALL" s'ouvre sur l'enterrement annoncé d'une petite fille, Sarah, sa soeur Chanda se rendant aux pompes funèbres pour choisir un cercueil, à la place de sa mère, souffrante, et de son beau-père, alcoolique notoire. Dans un magnifique cinéma scope, l'Afrique du Sud est ici dépeinte au travers des relations d'une famille fragilisée avec une voisine influente, mais trop soucieuse de la réputation de chacun. Dans l'atmosphère moite et pestilentielle d'un quartier noir qui se voudrait bien propret, se déroule donc un cruel récit d'exclusion, basée à la fois sur les actes supposés de chacun (prostitution...) et sur une maladie qui rode, mais dont on tait le nom: le SIDA.

Le scénario pointe également les dysfonctionnements du système de santé (hôpitaux sans réelles urgences, faux docteur dont personne ne sait lire les intitulés des dipômes et qui pratiquent des prix exhorbitants...), et la tendance des populations à la superstition (appel à des marabouts qui extirpent des serpents du corps des malades, rituels diverses...). Et au final une indéniable émotion pointe son nez.

Une habile construction

Dernier film de la compétition pour aujourd'hui, l'ukrainien "MY JOY" (Mon bonheur) est un captivant premier film, dont la construction à peu près linéaire de la première partie, vire de manière soudaine à une inattendue complixité. Dans une Ukraine où corruption et abus de pouvoirs semble être la règle, l'auteur fait d'abord évoluer un jeune routier, qui à force d'obstacles (douaniers véreux, accident provoquant un bouchon...) finit par prendre un chemin de terre sensé lui permettre de retrouver la route plus loin. On s'amuse ou s'inquiète des rencontres qu'il fait, d'un vieil auto-stoppeur envahissant à une prostituée mineure.

Puis le récit grimpe encore d'un cran dans l'angoisse, une fois la nonchalence du personnage principale mise de coté. Le loups sont lâchés et les flash-backs se mélanges, explicitant de manière assez confuse l'acte finale d'un des protagonistes. Et il faut bien avouer que c'est cette confusion, matinée d'un imperceptible mystère, qui fait tout le charme de ce film hors normes. Un film envoûtant qui dépeint cependant une Ukraine reculée faisant preuve de mépris et d'esprit revenchard vis à vis de la capitale. A découvrir.

Source: Olivier Bachelard

20/05

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