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Festival de Cannes 2010: Jour 6 - Formidables puzzles mexicain avec Biutiful d'Iñarritu et danois avec Everything will be fine de Christoffer Boe


Photo Festival de Cannes 2010: Jour 6 - Formidables puzzles mexicain avec Biutiful d'Iñarritu et danois avec Everything will be fine de Christoffer BoeLundi 17 mai 2010

L'un des films les plus attendus de Cannes 2010 nous vient du Mexicain Alejendro Gonzales Iñarritu. Pour une fois située à Barcelone, son scénario, le premier non co-signé avec Arriega, semble plus linéaire qu'à l'habitude, impliquant de réels personnages secondaires, directement liés à celui joué par Javier Bardem. Père de deux enfants, en dehors de ses dons de médium, plus ou moins contestés par les familles auxquelles il vient en aide, celui-ci vit de différentes combines, jouant l'intermédiaire entre des clandestins chinois ou africains et la police qui ferme les yeux.

Pas des plus clairs sur le fond, il n'en est pas impliqué auprès de certains d'eux, de manière affective, d'autant qu'entre une femme bipolaire à laquelle il voudrait faire confiance une nouvelle fois, et une maladie qui ne lui laisse plus beaucoup de temps, il va devoir faire face à de nombreuses difficultés. "BIUTIFUL" est donc un drame qui avance à coup de scènes chocs, laissant l'émotion pointer son nez de manière régulière, jusqu'aux différentes tentative de transmission à la génération d'après et de contact avec la génération d'avant, avec le père qu'on a à peine connu. Un film difficile, qui pourrait bien valoir à l'acteur espagnol un prix d'interprétation masculine.

Takeshi Kitano, lui, a toutes les chances de repartir bredouille, considérant le navrant film de Yakuzas qu'il vient de réaliser. Sans âme, sans rythme, sans imagination, cette boucherie annoncée, pâle règlement de compte entre gangs rivaux, brille par son absence de caractérisation des personnages. Seules quelques meurtres originaux réussissent à sortir le spectateur de sa torpeur: une fraise de dentiste méchamment plantée dans les machoires, des baguettes plantés dans une oreille, une pendaise horizontale à l'aide d'une voiture. Cela ne fait pas un film et "OUTRAGE" confirme que le Kitano d'avant (avant ses dernières comédies "Achille et la tortue" et "Glory to the film-maker") semble avoir bel et bien perdu l'inspiration.

Pour trouver un peu d'originalité, il faut donc aller trainer ses guêtres du coté de la Quinzaine des réalisateurs où est présenté le nouveau film du très expérimental Christopher Boe ("Reconstruction", "Allegro"). "EVERYTHING WILL BE FINE" est une histoire torturée d'un scénariste en panne d'écriture qui croise un plombier devenu traducteur dans l'armée, et qui cherche à faire publier des photos compromettantes pour le gouvernement. Décidément très marqués par les tortures durant la guerre en Afghanistan, les danois s'attaquent à l'autorité de manière assez frontale. Boe ne fait pas exception, plongeant son anti-héros au coeur d'un thriller parano où lui même finit par soupçonner tout le monde.

Pouvant au début passer inaperçu, le personnage prend une telle ampleur au fil du récit que l'on finit par le sentir véritablement incrontrôlable. C'est là l'une des réussites d'un film aux multiples tiroirs, aux décalages temporels plutôt bien vus, Boe s'amusant en plus à rendre les lieux traversés irréels, à force de plan aérien "façon maquette" et à des choix de décors des plus modernes. Un cinéaste qui s'avère décidément à suivre de très près.

En Argentine, l'insécurité routière est un véritable fléaux, avec plus de 22 morts par jour. Pablo Traero ("Leonera") revient en sélection officielle avec "CARANCHO", palpitant thriller rapprochant une médecin du Samu et un avocat véreux travaillant dans une Fondation qui propose aux accidentés d'arnaquer leurs assurances. Récit malsain emprunt de corruption, l'histoire dégénère progressivement, pour terminer sur une mémorable scène de fusillade et d'accident qui vous scotche sur votre siège. L'Amérique du Sud confirme la vitalité de son cinéma.

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Mère indigne mais généreuse

Marc Fitoussi propose son deuxième film à la Semaine de la critique. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, "COPACABANA" n'est pas un film qui se déroule au Brésil. Il s'agit de l'histoire d'une mère, excentrique et envahissante, que sa fille, ayant trop honte de l'imaginer à son mariage, exclut en racontant à sa belle famille qu'elle est partie pour un an à Copacabana. Traitant des contradictions entre une rédemption sociale inattendue, par le biais de la vente d'appartements en time-share, et une déshumanisation progressive, ce scénario très bien écrit, permet à Isabelle Huppert de briller une nouvelle fois dans un premier rôle à sa démesure.

Critique de l'exploitation des employés par le biais de prétendus système de rinsertion et de formation, de l'apprentissage généralisé de la concurrence entre individus, "Copacabana" regorge de répliques déjà cultes, comme celle qui voit Huppert comparer sa co-locataire à Kathy Bates, par un vachard "tu vois la salope dans Misery ?". Le film est donc une comédie savoureuse, prenant clairement position pour une générosité sociale devenue la marge.

Source: Olivier Bachelard

18/05

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