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Ce film est une adaptation du roman de Pascal Quignard. Ann Hiden est une pianiste renommée, qui décide de changer de vie lorsqu’elle surprend son conjoint en train d'embrasser une autre femme. Cet instant coïncide avec ses retrouvailles avec Georges, son ami d’enfance. Avec le soutien de ce dernier, elle vide son appartement du jour au lendemain, le vend, puis elle entame un exil qui la conduira à Ischia, île de la côte amalfitaine où elle va s’établir dans une villa inhabitée...
Qui n’a pas rêvé de tout quitter: une relation insatisfaisante, une vie sociale et professionnelle qui n’évolue plus? Le pas est franchi par l’héroïne, sans demi-mesure. On ignore alors si l’adultère de son conjoint est une cause ou un prétexte, mais cela n’a pas une grande importance. Car il s’agit d’une quête personnelle, une affaire de liens qu’on dénoue pour renouer avec soi. La recherche identitaire correspond dans un premier temps à un dépouillement matériel: rupture de contrat professionnel et destruction de partitions, mais l’essentiel demeure, à savoir le corps et les sensations. Ann est d’ailleurs dans l’eau lorsqu’elle découvre cette villa qu’elle emprunte avec l’accord de la propriétaire, s’accordant ainsi un refuge-ouvert, traversé par la nature.
Débute alors un périple au cours duquel Ann vit, bouge, respire. Les vêtements sont jetés pour en acheter de nouveaux, telle une nouvelle peau qu’elle enfile, tout comme ses cheveux qu’elle coupe pour en finir avec le passé. Cette scène emblématique nous offre l’intimité de l’héroïne: une page qui se tourne. «Villa Amalia», c’est avant tout un parcours primitif, instinctif, où la caméra filme son actrice comme pour faire corps avec elle, cette dernière étant liée aux éléments: la nage, la marche, et l’on vit le film à son tempo. Car la musique tient également une place prépondérante dans le film, souvent en rupture et en dissonances, en réponse avec la façon initiale d’Ann d’être au monde. La musique, qui accompagne son parcours et dont elle a fait son métier, subsistera uniquement dans son esprit ou sur le papier.
Le réalisateur Benoît Jacquot excelle dans un système narratif où rien n’est expliqué ni suggéré, loin d’un climat enquêteur qui répondrait aux interrogations du public. Il en va de même pour la place qu’occupe le personnage interprété par Jean-Hugues Anglade, seul lien qui surgit du passé de l’héroïne. Lui aussi évite de chercher une justification à son départ, il accepte avec humilité d’être son référent passif. Tout dans la narration est alors suspension, les sensations tenant place d’actions. On suit Isabelle Huppert comme un guide nous faisant découvrir la clé de la sérénité. Certes, ce rôle n’a rien de nouveau pour elle, Isabelle Huppert maîtrise cette partition. Mais ce film condense l’ensemble de sa filmographie, tant la palette du jeu est étendue. Évanescente, impassible autant que fragile, elle parvient dans ce film à laisser une empreinte magnifique aussi bien dans le sol qu’elle foule que sur l’image à l’écran.
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