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Aujourd’hui âgées d’une trentaine d’années, Claire et Laura sont les meilleures amies du monde depuis leur enfance. Lorsque Laura décède brutalement suite à son accouchement, Claire plonge dans une terrible dépression, malgré le soutien de son mari Gilles. C’est en découvrant le surprenant secret de David, le mari de Laura, qu’elle va reprendre goût à la vie. Mais cette relation d’amitié va vite déborder sur un autre terrain, plus risqué et complexe…
On peut désormais l’affirmer sans avoir peur de l’hyperbole : François Ozon n’est jamais aussi bon que lorsqu’il se la joue bien tordu dans son approche filmique du trouble sexuel. Au fil des années, on peut hélas aussi considérer qu’une filmographie axée sur ce thème précis range vite au vestiaire toute propension à la surprise chez le spectateur. En ayant pris connaissance du synopsis de son nouveau film ainsi que du fameux « secret » qu’il évoque (pas la peine de spoiler, l’affiche du film va s’en charger !), on peut dire qu’on imaginait déjà plus ou moins les possibilités nourries par une telle intrigue. Telle n’est pas alors notre semi-déception de constater que le film d’Ozon réussit à enchaîner toutes nos suppositions à la queue leu leu, la faute une fois de plus à une mise en scène trop cadenassée au plan près qui surligne chaque intention de mise en scène au Stabilo. La scène d’ouverture a beau être un modèle de précision et de montage musical, elle a vite fait de révéler toutes les pistes narratives à toute personne un tant soit peu apte à décoder le langage cinématographique.
Certes, ce n’est pas la première fois que l’ombre d’Hitchcock flotte au-dessus du cinéma d’Ozon, mais c’est peut-être avec ce film-là que le clin d’œil s’assume pleinement, quitte à paraître un peu envahissant. Preuve en est que la première apparition de Romain Duris en femme (filmé de dos) renvoie au twist final de "Psychose". Il en est de même pour le spectre d’Otto Preminger, qui n’en est désormais plus à une citation près : à titre personnel, il faudrait vraiment éviter à l’avenir d’utiliser toujours le prénom de Laura pour désigner une femme morte qui obsède tout le monde. Là où Ozon réussit à se démarquer et à offrir un vrai gage de surprise dans son récit, c’est en révélant une maîtrise assez gonflée pour mixer le thriller hitchcockien à une forme assumée de comédie grinçante (un registre qu’il connait bien depuis "Sitcom"). Alors que la bande-annonce semblait promettre un pur thriller angoissant, on se surprendra à sourire devant quelques parenthèses comiques bien amenées, surtout centrées sur la première partie du film où le système d’approche établi entre Duris et Demoustier est réduit au rang de jeu ludique et décomplexé (voir la scène de shopping sur fond de Katy Perry).
C’est toutefois dès que le film accélère dans son thème qu’Ozon acquiert une dimension quasi polanskienne, faisant se confondre les identités sexuelles en même temps qu’il se plait à interchanger la réalité et le fantasme. À travers un système de répétitions qui fait se rejoindre certaines scènes à différentes temporalités tout en y intégrant des parallèles très subtils, le cinéaste monte d’un cran dans le trouble et enrichit la duplicité de son « couple » vedette. D’un côté, un homme veuf désireux d’acquérir une enveloppe de femme. De l’autre, une femme mariée qui revoit peu à peu dans cette transformation l’image de cette amie disparue qu’elle aimait (désirait ?). Entre les deux, une femme morte qui redevient pour chacun un idéal fusionnel. Très tordu et très érotique, "Une nouvelle amie" trouve donc chaussure à son pied grâce à son postulat purement manipulateur, qui agite en boucle son éventail de scènes troublantes, jusqu’à un plan final qui ne manquera pas d’horrifier les supporters de La Manif pour tous. On aimerait juste qu’Ozon change un peu de sujet à l’avenir et fasse aussi évoluer sa mise en scène, désormais trop prévisible. Mission impossible ?
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