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Antoine est compositeur de musiques de films, et sa vie se répartit entre les femmes qu’il séduit et les films sur lesquels il travaille. Lorsqu’il part en Inde pour composer la bande originale d’une version assez inédite de Roméo & Juliette, sa rencontre avec la belle Anna, épouse de l’ambassadeur français en Inde, va chambouler son existence…
À la fin du film, on a quand même envie de vérifier. Et puis non, en fait, Patrick Sébastien n’est pas le vrai réalisateur du film. Parce qu’on a souvent l’impression d’avoir revu le fameux "T’aime" dans une version rallongée, largement mieux éclairée et délocalisée en Inde. Mais bon, avec l’égotique Claude Lelouch aux commandes de la chose, le résultat est le même : sous prétexte d’une touchante love story qui aurait pu se suffire amplement à elle-même (avec les couchers de soleil indiens en arrière-plan), le cinéaste le plus controversé de l’Hexagone aura renoué une fois de plus avec ses crises d’ego, multiplié les « audaces » de narration même lorsqu’elles ne s’imposait pas, et flingué un joli point de départ par l’ajout de considérations bavardes et édifiantes sur tout un tas de sujets qu’il ne maîtrise absolument pas. Comme à l’époque de "Vingt ans déjà" et d’"And now… ladies and gentlemen", ses détracteurs vont pouvoir une fois de plus s’en donner à cœur joie, le cinéaste donnant ici le bâton pour se faire battre.
Soyons simples : la gêne ressentie devant ce film se mêle en permanence à des fous rires nerveux, naissant de notre incapacité à croire que les acteurs aient pu débiter des dialogues aussi ineptes et neuneus sans pouffer de rire toutes les dix secondes. En moins d’une demi-heure de pellicule, Elsa Zylberstein fixe déjà le sort du film par un verbiage anthologique sur l’amour, le cosmos, la spiritualité, le lien entre les êtres et l’univers, l’eau du Gange, les étreintes, les hirondelles, les PTT, les boomerangs, et tout un tas d’autres machins. Face à elle, un Jean Dujardin qui passe le plus clair de son temps à rigoler en l’écoutant (on aurait bien envie de l’imiter, mais non…), un Christophe Lambert qui n’a plus rien d’autre à offrir qu’une inexpressivité totale et une élocution handicapée par une gorge encore plus enrouée que celle de Garou (chacune de ses répliques nous donne l’impression qu’il va s’étouffer), et une Alice Pol qui se tourne les pouces dans un hôtel en attendant que le film se termine.
Consternation assurée tout au long d’un périple où Lelouch nous inflige son prêchi-prêcha spirituel sans jamais se montrer lui-même spirituel. Encore aurait-il fallu que la mise en scène – relativement soignée – et la photo – très belle – aient été privilégiées pour exprimer ce besoin d’amour universel. Mais non : fidèle à ses pires travers d’auteur qui considère chacun de ses films comme le brouillon du suivant (se battre contre son propre ego est donc la ligne directrice de son cinéma), Lelouch tartine son film d’un amas de dialogues illustratifs, pesants, professoraux, exaspérants et outrancièrement bêbêtes qui font passer son petit cours d’amour universel pour une punition.
Dans le fond, peu importe l’idée d’une mise en abyme de la vie et du cinéma (un classique chez Lelouch, hélas devenu un gimmick exaspérant) ou le fait de voir le cinéaste encore marqué par sa rencontre avec Mata Amritanandamayi (appelée communément Amma, qui joue ici son propre rôle). Tout ce qui ressort d’"Un + Une", c’est de voir le cinéaste tourner en rond dans une bulle qu’il a lui-même fondée il y a trois décennies, et qui s’est fissurée depuis trop longtemps au point de révéler sa matière la moins reluisante. Et tant qu’à s’intéresser à Amma, on vous invitera surtout à jeter un coup d’œil au très beau documentaire "Darshan" de Jan Kounen, qui explore en détail le sens et l’impact des étreintes effectuées par cette femme d’exception.
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