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Carlos Guttiérez, alias Elvis Presley, vivote entre son travail à l’usine et les concerts qu’il donne avec son groupe dans des fêtes familiales. Persuadé d’avoir hérité de la voix du King, il nourrit secrètement l’ambition de quitter sa morne vie de sosie à Buenos Aires pour un plus grand destin. Mais il se voit contraint de reporter son projet lorsqu’un accident de voiture impliquant son ex-femme l’oblige du jour au lendemain à s’occuper de sa fille…
Loin d’être un biopic sur Elvis Presley ou sur l’un de ses sosies (façon « Podium » de Yann Moix), « Ultimo Elvis » est le portrait à la fois flamboyant et mélancolique d’un homme convaincu d’avoir un don et fermement décidé à lui consacrer sa vie. Il est ici question d’une véritable passion, de celle qui meut certainement les autres sosies, mais qui dépasse les tendances au mimétisme auxquelles ont pense forcément. Il n’est donc pas question pour Carlos de copier son idole (si ce n’est dans ses efforts pour prendre du poids, mais l’issue du film expliquera pourquoi) ni de s’accoutrer de façon ridicule, mais bien de se sentir comme une réincarnation dudit personnage, ni plus ni moins. Droit dans se bottes et doté d’un véritable talent vocal, il évolue dans un milieu social anodin avec beaucoup de fierté et de dignité, tel une star locale qui ne susciterait jamais les railleries. Aussi, même si la première scène du film montrant Carlos en concert prête à sourire, on se surprend à le trouver fascinant, puis à se passionner pour lui tout au long du film.
Il faut dire aussi que l’interprétation de John McInerny (retenez bien ce nom !), acteur argentin inconnu au bataillon, y contribue largement. Doté d’une beauté qui supplante le ridicule de la situation, diablement inspiré lorsqu’il s’agit de chanter des tubes de Presley, transpirant le charisme au moindre de ses déplacements, il irradie l’écran. À travers les thèmes de la paternité retrouvée (une jolie ramification du récit, qui ne vient pas court-circuiter l’essence du film) ou de la passion musicale (qui, et c’est vraiment étonnant, ne tombe jamais dans le ridicule), John McInerny trouve le juste équilibre entre charisme et sensibilité, préservant de bout en bout toute la dose de mystère qui fait le charme de son personnage et rend l’évolution de la trame incertaine. À ce titre, le dernier quart d’heure du film est un bijou de suspense, tant dans sa mise en scène que dans la rupture de ton qui le caractérise.
Digne héritier de Alejandro González Inárritu (il a co-écrit le très beau « Biutiful »), Armando Bo fait preuve avec cette première réalisation d’un don pour la narration et d’un sens de l’esthétique remarquable. Mais là où il marque des points, c’est en livrant une œuvre singulière et fascinante, qu’on n’attend pas au tournant. Il parvient notamment à rendre terriblement émouvantes des scènes qui, sur le papier, se prêtent davantage à la comédie (vous n’êtes pas prêts d’oublier la magnifique interprétation de « Unchained melody » par Carlos/Elvis dans un décor façon Las Vegas). Un réalisateur à suivre de près, donc, en espérant que ses futurs choix d’acteurs soient tout aussi inspirés.
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