© Ad Vitam
Une Française se rend chaque été dans un village grec, pour aider à l'organisation d'un festival de théâtre, qu'elle finance grâce à une subvention. Mais la crise est passée par là, et ce n'est qu'en arrivant, accompagnée de son fils aîné, qu'elle apprend l'annulation du festival. Qu'importe : comme il s'agit là aussi d'une réunion de famille, elle décide de squatter une villa laissée vide et de monter une pièce...
Si de nombreuses répliques font mouche, et si le rythme reste soutenu tout du long, on lit peut-être trop facilement les intentions de Brigitte Roüan au travers de ce nouveau et ensoleillé long métrage. Car au-delà de son amour pour la littérature et le verbe, qui transparaît dans de nombreuses scènes, c'est avant tout de l'amour d'une mère, de sa difficulté à laisser ses enfants vivre leur vie, et de sa peur d'être seule, qu'il s'agit. Le prétexte de la réunion de famille, avec une quasi unité de lieu (la villa, le théâtre en plein air, le village) donnant forcément lieu à ses règlements, est certes très usité, mais la qualité du casting, emmené par une Nicole Garcia pétillante et libre, et un Éric Caravaca subtil dans sa gestion des contraires (sa mère a eu la bonne idée d'inviter ses ex...), fait que la sauce prend rapidement.
Alors pourquoi finalement ne pas s'être contenté de cette galerie de personnages, d'humains plus ou moins torturés (voir la petite Irlandaise de Caravaca, qui pousse des envolées lyriques lorsqu'elle est contrariée...) et d'une certaine dose d'incongru ? Il est clair que les allusions à l'actualité, la précarité des intermittents du spectacle, la guerre en Syrie, la crise, ne sont certainement pas assez développées ni assez liées au reste pour ne pas paraître anecdotiques, voire opportunistes. De même, si l'on adhère plutôt aux étranges monologues ou apartés de la grand-mère (Emmanuelle Riva, distante et rassurante à la fois), jouant le rôle de médium et prédisant un cataclysme à venir, les dialogues et allusions au théâtre classique semblent trop écrits, brisant la vague de naturel globalement construite, et flirtant même une fois avec le ridicule (la réplique sur la lecture de Platon).
Reste le plaisir de retrouver un duo actrice-réalisatrice au meilleur de sa forme, sous-tendu, dans l'écriture comme l'interprétation, par une sensibilité à fleur de peau, et des préoccupations légitimes de mères que les enfants quittent. On s'amusera aussi de voir Demis Roussos faire une apparition en pope, cristallisant l'opposition entre liberté de création (la pièce finale, montée par les enfants, est certes amusante... et critique) et la rigidité d'un système installé. Et pourtant, on sortira de la salle à la fois peiné de devoir quitter cette fratrie et cette mère envahissante, tout autant que soulagé de ne plus se voir asséné de multiples messages dont la relative importance est difficile à saisir.
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