© Mars Distribution
Plusieurs histoires s’entremêlent au cœur de la ville éternelle : une New-Yorkaise attend avec anxiété ses parents venus rencontrer son fiancé italien ; un étudiant en architecture tombe sous le charme de la meilleure amie de la femme alors laquelle il vit, une actrice légèrement mythomane et cyclothymique, sous le patronage d’un architecte célèbre venu se remémorer sa jeunesse ; un Italien monté tout exprès à la capitale avec sa récente épouse doit faire passer une prostituée de luxe pour sa femme auprès de ses futurs employeurs ; un homme du commun se retrouve brutalement sur le devant de la scène, poursuivi par les paparazzis et demandé sur toutes les télévisions, sans aucune raison. Le tout sur fond de Colisée et d’opéra...
Pour la nouvelle étape de ses pérégrinations européennes, Woody Allen, après Londres, Barcelone et Paris, a levé l’ancre dans l’une des plus belles villes du monde. Sur fond de monuments et de ruines, de spaghettis et de Piazza di Spagna, le trublion new-yorkais délie un écheveau de plusieurs historiettes, à la façon de Boccace, réunies par une philosophie commune : mieux vaut vivre sa vie que s’échiner constamment à la fabriquer. Tous ces personnages, d’une manière ou d’une autre, composent ou recomposent leur présent en fonction d’un passé réel ou hypothétique. Prenons Monica, par exemple, jouée par l’excellente Ellen Page : tandis que Jack (Eisenberg) se surprend lui-même à tomber progressivement amoureux, John (Baldwin), toujours présent dans les parages tel un mauvais génie, fait de sa vigueur, de sa culture générale et de son attractivité physique de pures constructions volontairement dirigées vers la manipulation émotionnelle ; le même John qui trouve en Jack l’alter ego de ses vingt ans, lorsqu’il était venu passer une année d’étude à Rome. Les deux histoires pourraient d’ailleurs être identiques, Jack pourrait être John en plus jeune, par le miracle du cinéma.
Cette philosophie est traitée de façon plus ou moins loufoque. À côté du triangle amoureux déjà cité, on trouve aussi un chef d’orchestre à la retraite et fin mélomane (Jerry / Woody Allen) fasciné par la voix du père de son gendre, qui chante sous la douche les meilleurs moments du Pagliacci de Leoncavallo ou un Roberto Benigni qui profite sans comprendre de son quart d’heure de gloire warholien, mais en le regrettant dès qu’il est terminé. Même cette histoire toute simple du jeune couple italien, monté de sa province, séparé par l’effet du hasard et adultère chacun de son côté pour la première fois, confine à l’absurdité temporelle lorsque le spectateur se rend compte que leur journée d’éloignement progresse plus lentement que les trois autres récits du film. Cette contradiction dans les temps confirme l’atmosphère d’un long-métrage d’abord porté sur l’onirisme et le fantasmatique, angle d’approche que certains critiques italiens ont pu reprocher à Woody Allen, du fait de la crise importante traversée par leur pays. On se doit ici de défendre le réalisateur, car ces critiques ont tort : on ne peut pas demander à chaque film d’être politique lorsqu’il n’en a manifestement aucune intention. C’était déjà vrai de la France nostalgique et idéalisée mise en scène dans « Midnight in Paris », et cela ne gâtait en rien les immenses qualités du film.
Cependant, la suspension du réel qui a cours dans « To Rome With Love » ne le sauve pas de la médiocrité. Franchement, Woody Allen n’est pas dans le meilleur de sa forme, et la qualité de l’interprétation chorale ainsi que la chaude beauté des plans ne permet pas d’élever son dernier opus au rang des meilleurs du cinéaste, loin de là. Malgré la présence d’Allen lui-même dans le rôle du monomaniaque papa américain, présence dont il ne nous avait pas gratifiés depuis « Scoop » en 2006, « To Rome With Love » pêche par sa longueur et les manques de rythme qui touchent tour à tour chacun de ses récits. En bref, le film s’apparente à l’air quelque peu blasé que son auteur et comédien affiche tout au long de son segment : si Jerry arbore sans cesse la tête des mauvais jours, on sent bien que ce n’est pas non plus un enthousiasme débordant qui émane de son œuvre.
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