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Dans leur tente nichée aux creux des dunes, Kidane, Satoma et leur fille Soya vivent paisiblement de l’élevage de leurs vaches. Or, à quelques kilomètres de là, Tombouctou est tombée aux mains des rebelles, qui sèment la terreur au nom d’un islamisme radical…
Jusqu’à sa récente libération par les troupes françaises et maliennes, Tombouctou vivait sous la domination d’extrémistes religieux. Durant de long mois, les djihadistes semèrent la terreur au sein de la population en établissant un couvre-feu draconien et en imposant aux femmes une loi islamique fortement répressive. C’est sur cette période tourmentée, qu’Abderrahmane Sissako a posé son œil de cinéaste en nous contant le destin de Kidane, un touareg qui vit avec sa famille dans le désert aux alentours de la cité.
Loin d’être un simple réquisitoire à charge contre la tyrannie des intégristes, "Timbuktu" évoque avant tout le quotidien des habitants et de leurs oppresseurs. Un prisme qui révèle le ridicule d’une police islamique, qui s’obstine à vouloir imposer des lois absurdes, alors qu’elle-même souffre de ces interdits sans fondement. Les policiers fument en cachette, parlent de foot en aparté et ne savent quoi répondre à la jeune femme qui s’insurge sur le fait de porter des gants alors qu’elle vend du poisson. Sans grand charisme, ils ferment les yeux devant ceux qui leur font front, comme le fait si bien Zabou, une rebelle faussement illuminée, qui porte le voile en traine sur sa robe longue, plutôt que sur son visage.
Or, ces hommes en charge de faire régner l’ordre ne sont que des pions, qui pour ne pas basculer dans le rang des persécutés, appliquent les terribles sentences qu’imposent les extrémistes. S’en dégage un profond malaise qui laisse la porte ouverte à toutes les dérives. La pression monte et la quiétude de la cité est mise à mal par la peur constante de risquer sa vie. Une atmosphère ambiguë parfaitement mise en lumière par Abderrahmane Sissako, qui au-delà de son discours sous-jacent, révèle de magnifiques scènes de vie (l’extraordinaire partie de football imaginaire) mais aussi de drame, tel ce plan large d’une rive à l’autre de la rivière, qui retranscrit simultanément la souffrance de la victime, mais aussi celle de son assassin.
Un regard à deux niveaux : l’un baigné de lumière au sein d’une famille aimante ou bien d’une bande de copains heureux de se retrouver et l’autre, beaucoup plus sombre, où se dessinent les silhouettes des soldats rôdant sur les toits, lourds comme des chapes de plomb. Surnommée « La perle du désert », "Timbuktu" alors voilée de noir, ne reflète plus que douleur et désespoir. Un film né de la colère d’un cinéaste, révolté face à l’indifférence des médias, qui oublie régulièrement l’Afrique pour se concentrer uniquement sur le Moyen-Orient.
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