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Au milieu du XIXème siècle, dans l’Ouest sauvage, l’Amérique se construit petit à petit. Dans la petite ville de Loup, trois femmes qui ont perdu la raison doivent regagner l’Est pour être confiée à un pasteur de l’Iowa. Mary Bee Cuddy se désigne pour les y emmener. Elle s’attache les services de Georges Biggs qu’elle sauve in extremis d’une mort certaine et qui en échange accepte de l’escorter. Mais le long voyage qui les attend ne sera pas de tout repos…
Certes les grandes étendues sont là, les premières bicoques qui sortent de terre aussi, sans oublier les chevaux et quelques indiens. "The Homesman" a tout du western type, ce genre cinématographique à part entière qui fascine tant les États-Unis et qui a davantage fait la part belle à la conquête de l’Ouest. Or Tommy Lee Jones, ici réalisateur, acteur et co-scénariste, prend le contre-pied d’un genre éculé pour raconter l’histoire originale d’un retour vers l’Est. Une histoire adaptée du roman éponyme de Glendon Swarthout publié en 1988.
L’histoire pose d’abord les personnages. Simplement et honnêtement. Une femme qui vit seule, qui travaille au champ et qui tente de séduire un homme célibataire. Puis vient le portrait d’autres femmes, elles mariées mais proches de la démence ; perdues face à l’adversité, la dureté de cette vie. Tommy Lee Jones les expose dans de magnifiques plans où, aux bruits du vent et de la neige, se côtoie la désolation d’un troupeau mort, le corps lourd d’une mère décédée et ceux frêles d’enfants emportés par la maladie. Des portraits de femmes brisées dont le salut pourrait se trouver à l’Est.
Ce western possède donc la seconde particularité de porter la femme au premier plan de l’histoire. Leur condition de vie à cette époque n’a que très rarement était montrée au cinéma. Le spectateur est, en effet, plus habitué à les voir représenter par la serveuse de saloon ou la prostituée aguicheuse. Et les quelques films qui mettaient en scène des femmes comme "Les Belles de l’ouest" ou "Bandidas" sont avant tout des divertissements pour mâles en manque de décolletés plongeants. "The Homesman" renvoie donc à des œuvres plus anciennes tel que "Johnny Guitar" de Nicholas Ray et confirme une tendance : celle que le western change son fusil d’épaule quant à la place de la femme ; le virage ayant été amorcé en 2011 avec "True Grit" des frères Coen et surtout avec "La Dernière piste" de Kelly Reichardt.
Mary Bee Cuddy, le personnage – divinement interprété par Hilary Swank (qu’on n’avait pas vu aussi émouvante et fascinante depuis "Million Dollar Baby" d’Eastwood en 2005) – porte en lui des blessures de longues années de vie en solitude. Âgée de 31 ans, elle est à la recherche d’un époux et quand on sait qu’à cette époque les femmes se mariaient au sortir de l’adolescence, on imagine le chagrin et le désespoir qu’elle rumine de trouver l’homme qui partagera son foyer et ses terres. Mary Bee Cuddy n’est donc pas seulement cette femme rude et autoritaire en apparence, elle cache au fond d’elle un lourd poids que la société patriarcal de l’époque ne pourrait lui pardonner, et Hilary Swank fait des merveilles dans son jeu pour exprimer toutes ces nuances qui exploseront au grand jour dans une des plus fortes scènes du film.
Tommy Lee Jones est l’autre grand personnage du film, bien que plus attendu en bourru au grand cœur. Il est particulièrement bien servi par des dialogues qui font mouche, et il forme avec Swank un duo dont on s’attache vraiment et qu’on veut voir soulever des montagnes. On suit donc leur voyage avec intérêt et émotion – le film réserve ses moments de rire, d’action et de tension – en comprenant au fil des kilomètres parcourus qu’il n’y a pas que les trois femmes enchaînées dans la carriole qui ont un petit grain…
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