©mars distribution
Un diplomate anglais part à la recherche de la vérité sur la mort de sa femme, une activiste affrontant les grands groupes pharmaceutiques au Kenya. Malgré les apparences, les non dits, il va se battre contre un système odieux et sanglant…
Voilà un film qui brûle les consciences, brisant des tabous que personne cependant n’ignore. Il révèle un continent africain qui est à la fois un vaste terrain d’expérimentation, mais aussi un purgatoire pour expier ses fautes passées. L’industrie pharmaceutique y joue un grand rôle, sur les deux tableaux, aidée en cela par des diplomates de grands pays, ainsi que par les responsables politiques locaux.
C’est ce que va découvrir un homme, à qui on a enlevé la femme qu’il chérissait le plus au monde, tout en salissant le lien qui les unissait. Il a perdu, au-delà de sa chair, sa confiance en elle, découvrant des secrets sur sa vie et ses activités, révélant ainsi au grand jour les failles de son existence ainsi que son aveuglement aléatoire… Le film est à la fois un pamphlet, un thriller, un drame et une formidable histoire d’amour que nous livre le réalisateur de « La cité de dieu ».
Autant dans les scènes psychologiques que dans les rares scènes d’action, il distille une tension moite et pessimiste, comme si tout ce qui se passait autour des personnages constituait une vague contre laquelle on ne peut lutter. A aucun moment le personnage interprété par Ralph Fiennes ne se rend réellement compte de l’endroit, du monde dans lequel il évolue. Tel une autruche, il ne semble pas vouloir savoir. Mais la mort de sa femme va l’obliger à changer de point de vue.
Malgré cette transformation, il va vite se rendre compte que toutes ses tentatives sont vaines, comme celle visant à sauver un enfant de plus, lors de l’attaque d’un camp. Et le lieu qui entoure tous ces personnages, l’Afrique, devient alors vivant, devient un endroit où l’homme perd l’homme. A tous moment, les actes généreux se brisent face à la cupidité des riches et à la violence des opprimés. Et les espaces immenses sont alors comme les vaines tentatives, ils noient le restant d’espoir.
Et c’est de ce point de vue dont se sert le réalisateur. Progressivement ce torrent va emporter cet homme qui se bat avec sa candeur contre une sanglante hypocrisie. Alors bien plus qu’un thriller, le film devient un drame dans lequel ce diplomate part aussi bien à la recherche de la mémoire de sa femme, qu’à la recherche de son amour, de ses souvenirs. Le réalisateur se sert de flash-back tout au long du film afin de structurer sa narration. Aussi bien dans une première partie où de longs flash-back viennent éclairer les tenants et les aboutissants de chaque personnage et leurs péripéties, que dans la seconde partie où, par petites touches plus subtiles, ils entretiennent la mémoire de sa femme, décuplant au passage la violence de sa disparition.
En fin de compte, The constant gardener est un film qui est beau, graphiquement, avec une photo magnifique rendant hommage aux paysages africains, à leur âpreté et à la sécheresse environnante. Mais c’est aussi un film dur, terriblement dur, dans un monde où le mensonge et la duperie règne en maître, un monde où les actes infimes et sans conséquences apparentes, entraînent des drames épouvantables. Mais il se révèle être aussi une magnifique déclaration d’amour…à titre posthume. Du grand cinéma, véritablement du 7 ème art.
Second avis:
Entre quête intérieur d’un homme détruit, vie des favellas africaines et téléfilm humanitaire, Fernando Meirelles aurait pu accoucher d’un monstre digne d’une fiction TF1, mais c’est un pure moment de magie qui s’échappe finalement de ce long métrage.
Aaaaah ! La cité de Dieu ! On ne choisit pas un pseudo comme Buscape pour rien, et force est d’admettre que le premier film de Meirelles était un véritable chef d’œuvre, par son esthétisme ahurissant, son scénario réjouissant et le jeu des acteurs bigger than life. La prudence était donc de mise pour une première production hollywoodienne tant les ratages de jeunes réalisateurs étrangers extrêmement prometteurs sont devenus une constante au pays de l’oncle Sam. Mais c’esst justement en délocalisant l’action en afrique et en désaméricanisant ses personnages principaux (ici des anglais) que Meirelles réussit son coup. Le jeu tout en finesse et en retenue de Ralph Fiennes rend d’ailleurs honneur à ce film plus surprenant qu’il n’y paraît en lisant le pitch de départ.
En effet Meirelles transcende son sujet par une réalisation à la fois chaotique (les ghettos kenyans) et éthérée (Fiennes face à lui-même et à la mémoire de sa femme) pour en faire un concentré de beauté et de violence autant psychologique que visuel. Toujours accompagné de son talentueux directeur de la photo Cesar Charlone, Meirelles nous livre ici un film qui ne fera sûrement pas date, mais qui saura toucher son public par la beauté des images… Il peut aller se rhabiller le père Arthus Bertrand face au plans « vue d’avion » du jeune réalisateur brésilien. Un pur moment de poésie avec le parcours de ces deux hommes, l’un se battant contre des chimères devant la caméra, l’autre ne ratant pas un seul plan derrière la caméra.
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