Le portrait de Paulo de Figueiredo, un ancien mercenaire, qui revient sur ses différents crimes…
Débutant par la voix de Paulo de Figueiredo demandant ce que va être ce film, c’est par une succession de réponses que va se structurer le documentaire. Sur plusieurs jours, la documentariste Salomé Lamas a pu interroger cet ancien mercenaire du GAL, groupe antiterroriste de libération, dont la mission était de combattre ETA. S’effaçant complètement derrière sa caméra, la voix de la réalisatrice n’intervenant que pour apporter quelques précisions, ce sont des nombres qui apparaitront avec les réponses de l’interviewé, les questions demeurant toujours inconnues. Dans une mise en scène minimaliste, un fond noir et une chaise en guise de décor, c’est face-caméra, avec une alternance de plans-poitrine et de plans plus larges, que va répondre l’intéressé, n’éludant aucune question.
Et c’est avec un calme incroyable que l’homme va raconter, sans aucune concession, l’étendue de ses différents crimes, le sort qu’il a réservé à des femmes ou à des enfants. Aidé par l’incroyable charisme du seul protagoniste, le documentaire parvient à offrir une vision humaine extrêmement précise et intéressante sur des faits souvent ignorés. Ainsi, l’ancien mercenaire n’hésite pas à reconnaître qu’il n’était même plus un commando mais uniquement un assassin, confirmant les critiques de certains qui considéraient les membres des GAL comme des terroristes d’État. « Tirer était comme boire un verre d’eau » déclare-t-il, et s’il reconnaît ne pas aimer tuer, cela ne l’empêchait pas pour autant de dormir. Avec une froideur déconcertante, l’homme décrit alors des horreurs comme si rien ne pouvait l’atteindre, révélant même que l’argent n’était pas sa seule motivation, le devoir de remplacer une injustice incapable de neutraliser l’ETA étant tout autant important.
Décrivant avec minutie le déroulement de ses crimes, Paulo de Figueiredo évoque également les petites combines obscures et les enjeux politiques qui se jouaient derrière ces évènements. Il explique ainsi comment durant les procès, ils étaient protégés par le gouvernement espagnol, voire même par les services secrets français. Si n’importe qui aurait pu tenir la caméra pour réaliser ce documentaire, d’autant plus qu’on nous cache la manière dont sont posées les questions, les propos de cet homme suffisent à offrir une perspective intéressante, nous questionnant également sur les rouages de la sphère politique et sur les pratiques terroristes. N’hésitant pas à user de quelques traits d’humour, notamment lorsqu’il affirme n’avoir que deux amis, « Magnum et Winchester », le portrait dressé de cet ancien militaire nous interloque profondément. Le seul petit bémol, outre la réalisation inexistante, est peut-être l’issue du documentaire, lorsque la caméra suit cet homme en dehors de la salle d’interview, mettant le spectateur quelque peu mal à l’aise en recherchant maladroitement sa compassion pour ce criminel.
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