© Paramount Pictures France
Dans le futur, la guerre contre les machines se termine : le leader de la résistance John Connor est sur le point de mettre fin aux agissements du super-ordinateur Skynet. Mais peu avant de rendre l’âme, ce dernier utilise alors une machine révolutionnaire pour envoyer un T-800 (modèle original de Terminator) dans le passé afin d’éliminer sa mère, Sarah Connor. John n’a alors plus le choix : il doit utiliser à son tour cette machine pour envoyer quelqu’un dans le passé protéger sa mère. Le sergent Kyle Reese se porte volontaire et atterrit finalement dans une fracture temporelle, dans laquelle Sarah est devenue une guerrière, entraînée depuis sa plus jeune enfance par un autre T-800 chargé de veiller sur elle. Ensemble, ils doivent affronter une nouvelle menace, pour le coup inattendue…
Les films autour du voyage dans le temps, c’est un peu toujours la même histoire. Il faut d’abord faire un choix de narration afin de rendre le concept crédible : tandis que certains optent pour une logique de boucle narrative façon "Looper" (ce qui est « modifié » dans le présent n’est que la continuité de ce qui arrivera dans le futur), d’autres scénaristes choisissent au contraire l’option « réécriture du temps » façon "Retour vers le futur" (ce qui est « modifié » dans le temps a un effet sur ce qui était déjà « écrit »). Mais une fois le concept défini, encore faut-il le solidifier et le contenir afin de ne pas partir dans tous les sens, ni d’égarer le spectateur dans un scénario « spaghettisé » à l’extrême. Dans le cas de "Terminator Genisys", on a droit au Menu Maxi Best Of des mauvais choix pour relancer une franchise fatiguée : non seulement le film constitue un contre-sens honteux à la logique de narration bouclée propre à la saga "Terminator", mais la nouveauté pointe aux abonnés absents au profit d’un formatage bâclé et d’un révisionnisme narratif aussi vain que profondément imbécile. De quoi réussir l’exploit de violer une franchise par derrière, d’un coup sec et sans préliminaires.
D’un bout à l’autre de son récit charcuté, "Terminator Genisys" s’impose comme l’incarnation absolue d’un système hollywoodien névrotique, dont le manque d’idées nouvelles et d’audace provoque alors le pire des effets, à savoir celui de réécrire l’Histoire au détriment des mythes qui ont été installés au préalable. Deux cas se sont alors révélés au cours de ces dernières années : d’un côté une paire de franchises-gruyères (citons "Saw" ou "Fast & Furious") qui se contentaient de laisser des trous narratifs à chaque épisode tout en remplissant ceux laissés dans l’épisode précédent (une logique de sérialisation télévisée qui n’a pourtant rien à faire dans un contexte propre au cinéma), et de l’autre, une franchise "X-Men" désormais vouée à la réécriture nauséeuse de ses propres codes, comme en témoigne un dernier opus insupportable ("Days of future past"), surchargé de plages temporelles superposées, de personnages éparpillés et d’enjeux raturés sans vergogne. Cette seconde option caractérise le film d’Alan Taylor, qui, dès son premier quart d’heure, commet l’inimaginable en annulant purement et simplement l’existence du premier "Terminator" ‒ le T-800 d’origine, chargé d’éliminer Sarah Connor, se fait détruire dès son arrivée dans le passé par un autre T-800, forcément plus « vieux ».
On précisera que cette scène honteuse ne fait pas que nous inciter à effacer de notre mémoire tout ce en quoi les deux films de James Cameron et celui de Jonathan Mostow nous avait fait adhérer. Elle offre surtout une métaphore du projet lui-même : faire littéralement « bugger » la saga en envoyant un vieux modèle de Terminator faire le ménage pour changer le destin. Grosso modo, tout se résume à une phrase adressée au Terminator incarné par Schwarzie : « Tu n’es qu’une relique appartenant à une ligne temporelle effacée ». Le film ne fait alors que s’égarer dans un fatras infini de circonvolutions narratives et temporelles que l’on ne cherche même plus à assimiler, entre des termes pseudo-scientifiques censés servir d’explication (or, si on n’y pige que dalle, ça ne sert à rien !), des surprises narratives tellement mal amenées que le distributeur avait jugé préférable de les spoiler dans la bande-annonce (John Connor est ici le méchant… QUOI ?!?), une inventivité visuelle en-dessous du niveau zéro (n’est pas James Cameron qui veut !) et un réalisateur qui n’hésite pas à décalquer les scènes cultes de la saga, sans les comprendre et en saccageant toute leur substance iconique et mythologique.
Face à un massacre proprement ahurissant, aussi creux et taylorisé qu’une production Marvel bâclée par des exécutifs drogués aux études de marché, on ne sait plus quoi dire ni faire, largué entre l’envie de quitter la salle en colère, de piquer une sieste ou de se marrer nerveusement devant un premier degré qui tombe sans cesse à plat. Mais comme la fabrication du film ne fait même pas l’effort d’être au niveau de celle d’un blockbuster calibré (cadrages foireux, dialogues ineptes, découpage incohérent, faux raccords en pagaille, blagues à deux centimes, etc.), on n’a pas envie de se forcer. Le simple fait d’entendre James Cameron lui-même vanter les supposées qualités de cet épisode dans une vidéo-web qui pue le coup de pub forcé suffit amplement à nous achever. Avec un tel navet, la saga "Terminator" s’est bel et bien « auto-terminée ». Hasta la vista, comme dirait l’autre…
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