© Diaphana Films
Dans une banlieue tranquille de la région parisienne, des élèves de terminale disparaissent un à un, à commencer par Simon Werner. Pourtant, ces étudiants ne sont pas particulièrement liés. Toutes les hypothèses sont alors envisagées…
Simon Werner a disparu est un premier film dont Fabrice Gobert peut être fier. Valsant entre teen movie et polar, mêlant une esthétique visuelle et musicale avec un rare talent, il mérite largement les félicitations d’un jury qui l’a pourtant oublié au Festival de Cannes de 2010, où son film a été présenté dans la section « Un certain regard ».
Ce « certain regard », il le pose sur le destin de lycéens des années 90, dont le quotidien sera troublé par les disparitions successives de plusieurs de leurs camarades. Prenant le parti de raconter l’histoire à travers les yeux de 4 personnages de ce lycée, il va donner aux spectateurs des indices et clés de cette énigme avec une certaine subtilité, ce jusqu’à son dénouement.
Malgré le fait que le traitement des personnages puisse paraître très caricatural, faisant presque penser à des caricatures américaines de teen-movie (le sportif, le beau gosse, la bombe sexuelle, la rebelle punkette, le fils de prof - premier de la classe, …), Fabrice Gobert sait capter la complexité des sentiments des jeunes adultes encore en quête d’eux-mêmes, sans jamais les ridiculiser. Cela va lui permettre de recréer un univers visuel propre à chaque personnage, en changeant la lumière et le type de plans utilisés pour filmer les visions de chacun d’entre eux : plans serrés sur le visage éblouissant d’Ana Girardot, plans larges pour le fils de prof qui se fond dans les couloirs du lycée, plans plus « classiques » pour le sportif à la jambe cassée (interprété par Jules, ex-participant de la nouvelle star en 2008), caméra embarquée pour Simon, le premier disparu…
Il peut paraître étrange d’avoir choisi de planter le décor de son histoire en 1992, époque où téléphones portables et Internet n’avaient pas encore envahis les cours de récréation. A travers ce choix et l’absence de moyen de communication instantané, le réalisateur laisse une plus grande marge à l’interprétation et aux suppositions des personnages, mais surtout à celles du spectateur, qui lui aussi aimerait dénouer les fils de cette mystérieuse disparition.
Et pour compléter ce tableau "nostalgique", Fabrice Gobert a choisi une BO qui immerge le spectateur 20 ans en arrière. Les morceaux de Noir désir, No one is innocent, Tom Waits, Killing Joke, The Cramps et Sonic Youth (qui a composé des morceaux originaux pour ce film), entre autre, contribuent grandement à la construction de ce film, comme une sorte de reflet des émotions enfouies de chaque personnage.
Pour un premier film, Fabrice Gobert a réalisé un film générationnel très propre, à l’esthétique incroyable, s’amusant avec les codes des teen-movies et du polar, avec un casting de nouveaux acteurs plus vrais que nature, qui sait nous transporter sans jamais nous perdre, 20 ans en arrière, et sans jamais tomber dans les travers d’un film « presque » autobiographique qui nous inviterait dans le lycée de son enfance où lui aussi a vécu la disparition d’un de ses camarades de classe…
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