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© Version originale / Condor

SHOKUZAI – PARTIE 1

Celles qui voulaient se souvenir


un film de Kiyoshi Kurosawa

avec : Kyoko Koizumi, Yu Aoi, Eiko Koike, Sakura Ando, Chizuru Ikewaki, Teruyuki Kagawa


Alors qu’elle joue dans la cour de son Ă©cole avec ses quatre insĂ©parables amies, la petite Emili est attirĂ©e dans le gymnase par un inconnu, puis sauvagement assassinĂ©e. Comme frappĂ©es d’une subite amnĂ©sie, les quatre fillettes restent muettes face aux autoritĂ©s. Mais Asako, la mĂšre de la victime, dĂ©vastĂ©e et dĂ©cidĂ©e Ă  ne pas en rester lĂ , leur impose un pacte : si elles ne se souviennent pas, elles devront faire pĂ©nitence toute leur vie...


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Photo film

Beau film malade

Cinq ans aprĂšs le trĂšs beau « Tokyo Sonata », qui lui valut une reconnaissance internationale Ă©largie, Kiyoshi Kurosawa renoue avec l’un des genres qui fit jadis son succĂšs (« Cure », « Seance », « Retribution »), Ă  savoir le thriller policier. Donnant gĂ©nĂ©ralement dans l’horrifique ou le fantastique, il s’attelle cette fois-ci Ă  un sujet plus classique, au travers d’une (presque) banale affaire de meurtre dans laquelle il n’est question ni de fantĂŽmes, ni d’hallucinations. Pourtant, le thĂšme du hantement (que l’on retrouve dans quasiment tous les films du rĂ©alisateur) tient avec « Shokuzai » une place importante, irriguant chacun de ses sous-rĂ©cits et permettant l’articulation gĂ©nĂ©rale du mĂ©trage.

ComposĂ© d’un prologue, qui vise Ă  exposer le drame initial et le pacte liant les diffĂ©rents personnages, de quatre Ă©pisodes centrĂ©s sur chacune des fillettes devenues adultes, puis d’un Ă©pilogue permettant de dĂ©nouer l’intrigue, « Shokuzai » est une saga vengeresse tenant davantage du film fleuve (Ă  la maniĂšre du « Gangs of Wasseypur ») que de la sĂ©rie formatĂ©e pour le cinĂ©ma. DivisĂ© en deux parties, intitulĂ©es respectivement « Celles qui voulaient se souvenir » et « Celles qui voulaient oublier » (en rĂ©fĂ©rence Ă  l’état d’esprit des protagonistes dont il est question), le film bĂ©nĂ©ficie d’une sortie française qui Ă©tait loin d’ĂȘtre gagnĂ©e, Ă©tant donnĂ© son format.

DĂšs les premiĂšres minutes, peu de doutes sont permis quant Ă  la survenue d’un drame aussi effroyable que retentissant sur l’ensemble du film. Dans une atmosphĂšre Ă  la fois Ă©trange et morbide, l’intrigue prend le temps de s’installer avec efficacitĂ©, jusqu’à cette scĂšne sidĂ©rante du pacte imposĂ© par Asako aux quatre fillettes. Au-delĂ  de la cruautĂ© de la situation (les fillettes deviennent pour ainsi dire des « victimes » de la mĂšre Ă©plorĂ©e), qui donne le ton gĂ©nĂ©ral de ce qui s’ensuivra, cette scĂšne concentre le sujet principal du film, qui est que derriĂšre chaque monstre se cache un homme ou une femme qui souffre. Aussi, malgrĂ© la profonde injustice qui se noue dans cette scĂšne cruciale, c’est une vĂ©ritable radiographie de la culpabilitĂ© humaine qui se dessine.

Les deux Ă©pisodes qui s’ensuivent constituent sans conteste les meilleurs morceaux de toute la saga. Montrant ce que sont devenues « celles qui voulaient se souvenir », ils dĂ©crivent d’une part les tourments d’une jeune fille au foyer, victime des penchants douteux d’un mari dĂ©traquĂ©, tourments qui se transformeront en vĂ©ritable boucherie psychologique et physique, et d’autre part les malheurs d’une jeune professeur un peu rustre, jugĂ©e trop sĂ©vĂšre Ă  l’égard de ses Ă©lĂšves, et que sa tĂ©mĂ©ritĂ© portera aux antipodes de la popularitĂ©. Ces deux Ă©pisodes pourraient ĂȘtre des sketches indĂ©pendants de toute logique scĂ©naristique globale. Or la grande force du film est justement de laisser entrevoir des personnalitĂ©s fragiles et contrariĂ©es par le passĂ©, faisant planer en permanence l’ombre du pacte et du meurtre de la fille d’Asako.

Aboutis sur la forme, rondement menĂ©s sur le fond, ces deux premiers Ă©pisodes ont comme un goĂ»t de reviens-y. Ils sont aussi l’occasion de retrouver l’immense Kyoko Koizumi, la mĂšre de famille de « Tokyo Sonata », dans un rĂŽle Ă  la mesure de son charisme. Un film qui plaira aux fans de la premiĂšre heure, et Ă  toute personne amatrice de belles choses malades.

Lire la critique de la 2e partie : "Celles qui voulaient oublier"

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