©Bac Films
Nora (Emmanuelle Devos), est sur le point d’épouser son troisième mari et de perdre son père (Maurice Garrel), gravement malade. Ismaël (Mathieu Amalric), lui, est interné en hôpital psychiatrique contre son grès, et tente d’en sortir, et de montrer qu’il n’est pas fou. Lui, a été le deuxième mari de Nora. Elle, voudrait qu’il adopte son fils, Elias, qu’elle a eu de son premier mariage…
Ne vous laissez pas rebuter par la soi-disant longueur de ce petit bijou, 2h30, film le plus abouti et le moins noir de Arnaud Desplechin (La vie des morts, La sentinelle, Comment je me suis disputé). Ici, les deux films de deux vies, sont finement entremêlés par un montage aussi intelligent qu’intuitif, prenant le meilleur de chaque existence, le plus important, pour tisser deux portraits, celui d’une femme libre qui s’enferme dans une sécurité, et celui d’un homme enfermé dans ses peurs, qui se libère et s’ouvre au monde.
De deux films séparés, Despechin s’amuse à faire des films de genre. D’un côté, un drame personnel et presque passionnel, où Emmanuelle Devos resplendit, en mère solitaire et courageuse, face à un père qui l’aime et la hait à la fois. De l’autre, une comédie burlesque, où Mathieu Amalric donne la mesure de son talent d’orateur, nous amuse, et nous effraie à la fois, avec ses souffrances superficielles, et ses envolées effrontées. Et ce tourbillon de sensations nous emporte sans difficulté, grâce à la justesse de ces moments de vies, alternativement si touchants, si drôles, si pathétiques…
Après quelques œuvres sombres, où la mort était au cœur de ses préoccupations, Desplechin mêle ici tout ce qui fait l’intérêt de la vie, rencontres, amour, trahisons, humiliations, besoin, amitié, mensonge, mépris, rivalité, et nous offre son grand film, creuset à réactions et actions humaines, que le spectateur ne peut que prendre en pleine figure, comme un ensemble d’expériences, qui le toucheront forcément à un moment ou à un autre. On ne saurait donc que trop vous conseiller de voir ce qui pourrait bien être le favori des prochains Césars.
2ème Avis: Intello, prétentieux, long… Heureusement qu’il y a Amalric !
Comparé à « Comment je me suis disputé… (ma vie sexuelle) », il est clair que Desplechin s’est amélioré ! Mais il n’empêche que ce film sonne encore comme une sorte de caprice de "bourgeois parigot" dans le mauvais sens du terme. Les personnages, pour la plupart, sont à l’image de cette histoire qui toise de très haut les petites gens (pourtant quasiment absents du film !), comme cette Catherine Deneuve qui n’a jamais été aussi irritante. Du coup certains destins même tragiques ont parfois du mal à susciter l’émotion tant il est difficile de s’attacher à eux. Emmanuelle Devos est comme à son habitude (« Sur mes lèvres » mis à part) assez inégale et semble faire corps avec une construction du récit décousue elle aussi. Les longueurs s’enchaînent entre les rares passages excellents (c’est bien ça le grand paradoxe : certaines séquences sont réellement très réussies !) et le montage n’arrange rien, multipliant les plans inutiles et les raccords dans l’axe… à vomir.
Le propos est parfois sans grand intérêt voire parfois complètement gratuit (la cruauté posthume du père tombe comme un lourd cheveu sur cette soupe glaciale !) et les préoccupations des personnages paraissent très souvent déconnectées de la "vraie vie". Le titre prétentieux et la multiplication des références intello-culturelles contribuent à faire de ce film un très grand hommage aux vaines masturbations intellectuelles où Desplechin semble se complaire avec une morne satisfaction (n’est-ce pas une personnification de lui-même en ce Pierre tête à claques ?).
Alors qu’y a-t-il pour sauver tout cela ? Mathieu Amalric, excellent dans la peau du plus intéressant des personnages, le plus complet, le plus humain sans doute. Avec lui, presque des fous rires et les principales émotions. Tant qu’on en vient à se demander si Desplechin, dans son apparente recherche d’une morosité amoindrie, n’aurait pas mieux fait de tirer plus son film vers ses côtés tragi-comiques qu’incarne parfaitement le personnage d’Ismaël. Il n’y a plus qu’à remonter le film !
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