© Diaphana Distribution
À la douane, une jeune femme passe le contrôle avec un pot. Il s'agit en fait des cendres de son mari, brusquement décédé. Elle retrouve sa maison à Montreuil, mais ne semble toujours pas savoir quoi faire avec ce pot, qu'elle trimbale partout. Débarquent alors chez elle deux Islandais, une mère et son fils...
Pas facile de qualifier le nouveau film de la réalisatrice française d’origine américano-islandaise Solveig Anspach, qui met face à face tempéraments islandais et français, pour mieux aborder la question du deuil, et celle d'un potentiel retour à la vie. Cinéaste iconoclaste, découverte en 1998 avec « Haut les cœurs », son premier long, elle avait ensuite offert un très beau rôle à Élodie Bouchez, en l'entraînant dans une balade amoureuse et mélancolique en Islande dans « StormyWeather ».
Pour mieux perdre son personnage et tenter de lui redonner une étincelle, elle l'entoure de multiples personnages, représentant un Montreuil idéalisé, proche du communautaire. Car la maison d'Agathe va vite devenir un vrai moulin, annihilant les tentations suicidaires ou même mélancoliques de la jeune femme, sans cesse sollicitée, par un ami qui lui emprunte de l'argent, un autre qui cherche à l'embrasser, et ses proches, qui lui prodiguent des conseils plus ou moins avisés pour oublier l'homme de sa vie (faire comme s’il était « tout le temps en voyage » ou encore faire la liste de ce qu'elle aimait ou pas chez lui...).
Porté par Florence Loiret-Caille (« La Petite Chambre », « J'attends quelqu'un »), qui trouve ici certainement son plus beau rôle, le personnage surprend par un frêle équilibre entre malheur accablant, désarroi affiché, et rares instants d'agacement distancié. Incapable de parler de son deuil, elle semble bien moins surprise que le spectateur des agissements de ceux qui l'entourent. La réalisatrice oppose ainsi deux cultures, une prétendue simplicité islandaise et un don bien français pour compliquer les choses et tourner autour du pot (voir sa relation avec un voisin plein de bonne volonté).
C'est à surmonter son deuil que la réalisatrice invite son personnage, grâce au contact avec les autres, et à une certaine ouverture d’esprit. Autour d'elle, la galerie de portraits est attendrissante, les situations décalées et cocasses, les dialogues et paraboles mitonnés comme des petits plats. De la mère islandaise, nerveuse et étrange, aux grues de cette ville en mouvement, en passant par un phoque oublié lors du déménagement d'un zoo, ou par les allusions à divers contes, « Queen of Montreuil » nous régale par son excentricité. Conte philosophique, prônant la simplicité des rapports humains, il aborde avec tact et humour la question du deuil, mais aussi l'état d'un pays, l'Islande, aujourd'hui sévèrement touché par la crise économique. Une généreuse réussite.
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