Afin d’enquêter sur les méthodes de recrutement de l’État Islamique, une journaliste anglaise freelance se crée un profil Facebook. Elle se fait alors passer pour une jeune femme convertie, désireuse de partir combattre et de trouver un mari...
Le réalisateur de "Nightwatch" et "Daywatch", devenu un habitué des grosses productions ("Wanted", "Ben-Hur"), a créé la surprise du côté de la section Panorama du Festival de Berlin 2018, en réalisant un film palpitant à partir de montages d'écrans d'ordinateurs et de téléphones portables. Le résultat, qui déstabilise un peu initialement le spectateur habitué à un autre type de montage, est une véritable réussite qui a valu au film le Prix du public de la Berlinale.
Adaptaant ici une histoire vraie, datant de 2014, impliquant une journaliste anglaise, tentant de prendre contact avec un recruteur de l’État Islamique, le film tente de montrer les mécanismes d'un embrigadement avant tout basé sur la séduction ou la fascination. Mais le scénario de "Profile" emprunte des voies inattendues, réussissant à installer rapidement une tension et à la maintenir de bout en bout, grâce à des intrusions extérieures dans cette enquête via écran interposé.
Brian de Palma avait déjà largement expérimenté sur les types d’images aujourd’hui à disposition avec le passionnant "Redacted" (2008). Par son mode de mise en scène, incluant ici en un seul écran toutes les technologies dans un seul écran (celui de l’héroïne devenant celui du spectateur), Timur Bekmambetov pousse la réflexion un cran plus loin. Il met en effet en évidence la multiplicité des sollicitations qui nous parviennent lorsque nous sommes connectés (mail, messages instantanés, internet, Skype…), comme autant d’intrusions potentielles. Il montre aussi l'incroyable quantité d'informations disponibles sur le net, comme autant de sources de danger potentiel pour notre intimité (et paradoxalement de mensonges aussi).
Pouvant finalement s’apparenter à un huis-clos, "Profile" doit beaucoup à son actrice principale, Valene Kane, que l'on ne voit finalement que sur une petite partie de l'écran, lorsqu'elle dialogue avec le recruteur ou avec ses ami(e)s. Celle-ci parvient rapidement à faire oublier l'irréalisme de l'âge du personnage qu’elle se compose, et à incarner une multiple mise sous pression. Et au final, le film, palpitant, surprend par un rythme constant et l'intelligence de son propos.
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