affiche film

© Metropolitan FilmExport

PAPERBOY

(The Paperboy)


un film de Lee Daniels

avec : Nicole Kidman, Matthew McConaughey, Zac Efron, John Cusack, David Oyelowo, Scott Glenn, Macy Gray…

Floride, 1969. Ward Jansen, reporter au Miami Times, retourne dans sa région natale de Lately pour enquêter sur la condamnation d’un chasseur d’alligator. Accompagné de son jeune frère Jack et d’un collègue journaliste, il est venu à la demande de Charlotte, une femme pulpeuse qui entretient une correspondance torride avec le détenu, et a bien l’intention de le faire sortir de prison pour l’épouser…


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Photo film

POUR : Niveau +2 - Un thriller torride dans une ambiance vintage. Détonnant !

Trois ans après la présentation au festival de Cannes de « Precious », film misérabiliste qui divisa la critique et le public, Lee Daniels est revenu cette année sur la Croisette avec un nouveau long-métrage d’une toute autre tonalité, et dont le seul point commun est d’avoir laissé un même goût mitigé. Adapté d’une histoire vraie, « Paperboy » se situe au croisement des thrillers un peu moites dans années 1990 (on pense parfois à « The Color of the night » de Richard Rush) et des films d’enquête de la même période. Ajoutez à cela une ambiance vintage ultra marquée, liée certes à l’époque dans laquelle l’histoire est censée se dérouler, mais dopée par la couleur saturée, limite jaunie, de la pellicule, et la mise en scène léchée de Lee Daniels.

Derrière cet emballage de papier glacé, le film révèle une histoire policière moyennement intéressante (faire sortir de prison un sale type, qui s’avèrera être encore pire une fois dehors), qui croise de façon assez convenue intrigues sexuelles (la Charlotte est prête à tout pour arriver à ses fins), amoureuses (le jeune Jack va bien évidemment s’amouracher d’elle) et sociales (la misère ambiante sociale et affective). À dire vrai, on trouve plus d’intérêt dans les digressions scénaristiques du film, notamment dans le mystère qui entoure la vie privée de Ward, joué par Matthew McConaughey, ou dans la personnalité complexe de Charlotte.

Mais là où le film parvient à surprendre, c’est dans la pertinence de son casting. Outre John Cusack, qui en fait des caisses dans son interprétation d’un tolard vicelard, les têtes d’affiche donnent le meilleur d’elles-mêmes. En tête : une Nicole Kidman à contre-emploi, totalement hallucinante dans son rôle de ménagère nympho pas si écervelée qu’elle voudrait bien le faire croire. Sa prestation, haute en couleur, vaut à elle seule le détour. Elle donne d’ailleurs lieu aux deux scènes les plus marquantes du film (et paradoxalement aussi les plus inutiles !), très sexuelles et plutôt délirantes. Même Zac Efron s’en sort avec les honneurs, malgré son image de minet lui collant à la peau, et qui lui valut d’ailleurs de nombreuses railleries lors de la projection cannoise du film (une histoire de slip... vous comprendrez).

Si « Paperboy » est un film mineur, de par son scénario faible et inégal, il n’en demeure pas moins un morceau de bravoure, qui ne craint ni le ridicule ni les excès en tout genre. À voir pour le croire.


CONTRE : Niveau 0 – L'auteur de Precious effleure son sujet


Le second film du réalisateur de « Precious », remarqué à Sundance et à Cannes il y a trois ans, prend la forme de l'interview d'une servante noire, relatant les déboires de Ward Jansen, reporter, et de son jeune frère Jack, durant l'été 1969. Centré sur le personnage le plus jeune, il tente de dresser le portrait d'un jeune homme inexpérimenté, plus fasciné par la femme qui a amené son frère à revenir dans la région (une « fan » de prisonnier, comme il semble en exister beaucoup aux États-Unis), que par l'enquête qu'il doit aider à mener en jouant dans un premier temps les chauffeurs, rôle ingrat auquel il ne saurait se cantonner.

Offrant au dernier festival de Cannes l'une de ses plus belles montées des marches, on retrouve à l'affiche le chouchou de ces demoiselles, Zac Efron (la série gentillette et rythmée signée Disney des « High school musical »), Matthew McConaughey en reporter dont certains penchants sont à peine dissimulés, et Nicole Kidman, saisissante en groupie irrationnelle qui entretient une correspondance avec Hillary (John Cusack), un prisonnier inquiétant sur le point d'être exécuté. Cette dernière est d'ailleurs certainement le seul intérêt du film, retrouvant ici un rôle à sa mesure, en nymphomane retorse.

Car dans le fond l'enquête ne passionne guère. Seule la peinture en toile de fond d'un contexte social où les gens de couleur étaient encore méprisés donne un peu de relief à ce film dont le scénario s'efface une nouvelle fois au profit de la mise en scène. Lee Daniels, plutôt adepte d'effets (trop) voyants, arrive cependant parfois à mettre mal à l'aise, comme lors de la première rencontre entre le détenu et sa future femme, une scène de masturbation à distance qui dérange forcément par son impudeur. Mais de manière générale il réussit surtout à agacer, soulignant inutilement des passages déjà suffisamment dramatiques en eux-mêmes, et les transformant presque en éléments involontairement comiques (les plans flous où Charlotte doit uriner sur les piqures de méduses de Jack, la baise furieuse sur la machine à laver, la scène de la fin avec le plan zénithal sur un canot...).

Ressort cependant une vision inquiétante des marais de Louisiane, lieux hautement cinématographique, dont l'imagerie relève d'un mélange de fascination et d'inquiétude. Certes les réalisateurs ont tendance à abuser de la symbolique qu'ils recèlent, d'autres films sortant ces temps-ci se déroulant dans des lieux comparables, prisons ou dernier refuge (« Mud », « Les bêtes du sud sauvage »). Pourtant la peinture de ce monde reculé et dangereux, où les humiliations semblent constituer le nectar d'un quotidien miséreux comme aisé, semble sonner juste, alors que l'enquête qui se déroule sous nos yeux se déroute presque de sujet, peu aidée par un découpage stylisé et inutilement complexe.

Olivier Bachelard

17-10-2012

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