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Deux astronautes se réveillent dans leur gigantesque vaisseau spatial après un long séjour en hyper-sommeil. Désorientés et plongés dans le noir, ils ne se souviennent ni de leurs identités ni de leur mission. L’un d’eux part explorer le vaisseau et ne tarde pas à découvrir quelques survivants qui vivent cachés, traqués par d’effroyables créatures…
Bien que peu original, le pitch de « Pandorum » s’avère particulièrement excitant pour tout bon fan de science-fiction et d’horreur qui se respecte : le vaisseau spatial cyclopéen et vide, l’amnésie des protagonistes, la perte de tous repères géographiques et sociaux, la rencontre fortuite avec des bestioles peu affables… Ces idées soulèvent des promesses fatalement destinées à être déçues (la dernière exception en ce domaine date peut-être de « Pitch Black », cela fait un petit moment déjà…) tant la résolution de pareille intrigue s’avère délicate à tenir en main, telle une savonnette qui ne cesserait de glisser entre les doigts du metteur en scène. « Pandorum » n’échappe pas à cette mauvaise règle de basse-cour – à croire que les scénaristes font exprès de s’empêtrer dans des idées discutables et des motifs sordides –, toutefois l’on pourra arguer longuement que la qualité d’un film ne tient pas tant à sa résolution et à ses innombrables twists qu’à l’ambiance et l’inquiétude qu’il parvient à instiller. Quitte à passer à côté du sujet.
De ce côté-là, « Pandorum » ne déçoit pas. De par son épaisse couche de mystère, son rythme bien maîtrisé et son atmosphère claustrophobe, la première partie du film « fonctionne » parfaitement. C’est ensuite que Christian Alvart se fourvoie, mal dirigé par un scénario qui emprunte à tous les râteliers du genre : horreur, épouvante, action. Si les références renvoient explicitement aux modèles de la science-fiction – « Alien » en pôle position, et plus récemment « Event Horizon », la présence du réalisateur de ce dernier, Paul W. S. Anderson, comme producteur ne tenant sans doute pas du hasard – c’est principalement à « The Descent » de Neil Marshall que « Pandorum » paie son tribut, qu’il s’agisse de la présence, dans le gigantesque vaisseau Elysium, de créatures humanoïdes illustrant un sentier évolutif parallèle, ou des passagers rencontrés par Ben Foster au cours de son trajet vers le réacteur nucléaire, et transformés en guerriers prêts à tout pour survivre. La femme du groupe ressemble d’ailleurs à s’y méprendre à Milla Jovovich – encore un clin d’œil à Anderson via « Resident Evil » ? Bonnes ou mauvaises, ces trop nombreuses références finissent par encombrer le film par effet de saturation – et de mode.
Naturellement, presque nécessairement, la forme narrative souffre de ce trop-plein d’indices, d’idées, de motifs. « Pandorum » s’oublie dans l’immensité de ses ambitions thématiques, proposant à la fois une éprouvante obscurité, un malaise amnésique, une chasse à l’homme orchestrée par des bestioles anthropomorphes dotées d’ampoules bleutées, une réflexion sur l’homme comme loup pour l’homme, un aspect schizophrénique (plus proche d’ailleurs d’un « Sunshine »), le tout immergé dans une métaphore plus large sur le devenir de l’humanité. Alors, le film se perd dans les circonvolutions des entrailles de l’appareil, et nous avec lui. D’autant que certains de ces aspects sont traités avec beaucoup de négligence esthétique (le filmage épidermique des créatures fait mal à la tête, mais c’est un mal propre au début du XXIe siècle).
Un regret, donc : que les cinéastes qui s’attaquent aujourd’hui à la science-fiction n’aient pas assez foi en leur sujet, et qu’ils mélangent ceux-ci à une bouillie d’idées et d’effets. Est-ce une affaire de génération ? Christian Alvart a grandi dans les années quatre-vingt, en Allemagne, et a peut-être raté le coche des grands films de science-fiction de la décennie soixante-dix, des films dont les postulats puissants se suffisaient à eux-mêmes. L’histoire principale de « Pandorum » (le vaisseau spatial vu comme une fabuleuse Arche de Noé, la révélation de sa destination) semblait bien assez passionnante pour n’avoir pas besoin d’être mise en relief à coups de combattants spatiaux et de cannibale « predatoriens ». Reste que l’ambiance fonctionne et que certaines images magnifiques, particulièrement à la toute fin, viennent égayer un film qui n’est ni médiocre ni vraiment bon, mais entre les deux. D’où cette note mitigée qui ne reflète pas le plaisir pris à la vision d’un long-métrage qui, de toute façon, à l’instar des autres productions du genre, est victime d’une sortie en salles totalement sacrifiée.
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