© Les Films du Losange
Au détour d’une ruelle sombre et humide, git une femme blessée. Un voisin l’aperçoit et vient à son secours. La femme, Joe, refuse catégoriquement d’être transportée à l’hôpital mais accepte néanmoins une tasse de thé. Une fois remise, cette dernière revient sur sa vie afin d’expliquer à son hôte, pourquoi elle est une mauvaise personne…
Précédé par une communication sulfureuse et résolument provocatrice, le dernier film de Lars von Trier déjoue toutes attentes scabreuses par une première partie élégante et intimiste qui révèle un passionnant portrait. Certes, la trame principale du récit repose sur l’addiction démesurée de Joe au sexe mais le discours dépasse ce simple état de fait, en l’enrichissant d’une portée lyrique et symbolique dont Lars von Trier a le secret. Scindée en chapitres, l’histoire de la jeune femme se dévoile chronologiquement pour analyser les différentes phases de son désir excessif et incontrôlable.
Qu’elle soit joueuse, amoureuse ou la fille de son père, Joe aime s’imposer des règles et attend des autres qu’ils les transgressent. Appliquée, elle collectionne les rapports sexuels comme elle confectionne son herbier. Ses multiples amants ne sont en fait qu’une suite logique où apparaissent régulièrement des éléments singuliers qui, à la manière des chiffres premiers, sont uniques en leur genre, et non la combinaison d’autres expériences. Dépourvue de toute empathie, la jeune fille comble ainsi son manque d’affectivité par le sexe, seul catalyseur de ses émotions.
D’une facture classique mais résolument élégante, Lars von Trier nous conte l’histoire de Joe par le prisme d’une amitié naissante entre elle et Seligman (l’homme qui la recueille blessée dans la ruelle). On ne connait rien de lui, à l’exception des objets qui l’entourent et qui vont, au fil du récit, devenir chacun un symbole des chapitres de la vie de l’héroïne. Sa discussion bienveillante emmène les deux protagonistes vers une analyse esthète autant que didactique des événements qui ont marqués la vie de la jeune femme.
Le film n’en ait pas pour autant hermétique, loin de là. Sa narration parfaitement maîtrisée vous emmène, deux heures durant, dans une atmosphère troublante, soulignée comme de coutume par de sublimes compositions. Le cadre est soigné et l’ambiance vintage qui s’en dégage est pur raffinement. La seconde partie annoncée résolument plus « trash » dans le générique de fin nous surprendra t-elle à son tour ?… Pour cela il faudra patienter quelques semaines encore.
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