© Océan Films
Matteo (Alesso Boni) et Luigi Lo Cascio (Nicola) sont deux frères d'une famille italienne, qui, en cet été 1966, s'apprêtent à partir en voyage en Norvège, en compagnie de leurs deux meilleurs amis, étudiants eux aussi. Matteo, garçon impulsif et littéraire, se met en tête de rendre sa liberté à une jeune femme prénommée Giorgia, qui lui semble avoir été maltraitée dans l'institut médical où elle se trouve. Mais cette aventure n'aboutira pas, et leurs destins vont commencer à diverger…
En choisissant de retracer plus de trente cinq ans de la vie d'une famille italienne, les Carati, Marco Tullio Giordana ne se doutait peut être pas que son œuvre, formatée pour la télévision, allait finalement connaître une sortie en salles et devenir l'un des évènements du Festival de Cannes et plus certainement de l'année cinéma 2003. La durée du film, plus de 6heures, lui a permis d'installer chacun de ses personnages, ceux-ci tournant autour des destins trop distincts de ces deux frères, qui en restent les personnages principaux. Le temps a servi son histoire comme ses protagonistes.
A chacun des personnages, le spectateur peut s'identifier, puisant en eux une jeunesse perdue, une insouciance, des espoirs déçus, des désirs refoulés, des envies satisfaites, ou des actes manqués. Jouant sur les contrastes entre moments de bonheur et de tristesse, entre regards complices et incompréhensions, entre fureur et accalmie, le scénario donne à aimer chacun d'entre eux, et permet de rendre les cassures ou les pertes plus douloureuses encore. Car sur trente cinq ans, il se passe une multitude choses, qu'un découpage discret en quelques six parties, clairement identifiables, mettant chacune en avant l'histoire d'un des deux frères, sans pou autant oublier l'autre ou les autres.
Mais c'est surtout l'utilisation judicieuse de l'histoire italienne, qui, en filigrane, permet de donner du relief aux blessures, aux joies de cette famille comme tant d'autres. En choisissant certains évènements symboliques, et en les faisant entrer en résonance avec la petite histoire de chacun, le réalisateur met en exergue les utopies, et relativise les évènements personnels. Ainsi, des inondations catastrophiques de 1966 à Florence, aux attentats des brigades rouges, en passant par les évènements de Mai 1968, on obtient un aperçu rapide de ce qui fait l'identité moderne du pays. On regrettera juste qu'aucune allusion (ou presque) ne soit faite quant à la situation électorale actuelle et au virage vers l'extrême droite et le néo-libéralisme.
Nos meilleures années est une saga formidable, dont vous ne pourrez ressortir que le coin de l'œil humide, satisfait d'avoir partagé des histoires humaines, sans juger les actions de chacun, mais sans pour autant toutes les comprendre. Un film à voir absolument, dans les quelques salles qui le projètent encore, ne serait-ce que pour sentir, sous ses yeux, toute la fugacité du bonheur.
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