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Alors qu’il passe l’été chez sa mère près de Nice, Amin passe un matin devant la maison de sa bonne amie Ophélie et la surprend à coucher avec son cousin, le tombeur Toni. Surpris, les deux amants se séparent en vitesse, Toni prenant la poudre d’escampette en mobylette. C’est l’occasion pour Amin de la questionner sur la nature de sa relation avec son cousin, elle qui est censée être en couple avec Clément, un militaire constamment en mission aux quatre coins du monde mais surtout de revoir sa bonne amie, Ophélie...
A l’origine, "Mektoub, my love" est censé être une adaptation du roman de François Bégaudeau, « La Blessure, la vraie ». A l’arrivée, difficile de reconnaître une once du matériau original tant le réalisateur et sa compagne en ont fait quelque chose de radicalement différent. Il s’agit toujours d’un récit initiatique certes, mais les personnages, les enjeux et même le lieu n’ont plus rien à voir avec ce qu’il est raconté par Bégaudeau. Ce n’est pas une tare, mais que les fans du livre en soient ici avertis.
Car ceux qui apprécient le cinéma de Kechiche savent à quel point le réalisateur peut apporter une richesse supplémentaire à l’œuvre dont il s’inspire lorsqu’il se l’approprie. On est d’emblée séduit par sa manière de se concentrer sur ses actrices et acteurs. Il en capte une vitalité contagieuse absorbant toute notre attention malgré, encore une fois, une durée démesurée (trois heures de film). Les échanges paraissent authentiques et il n’est pas rare de reconnaître plusieurs comportements de personnes que l’on connait personnellement comme cette jalouse qui ne veut pas l'assumer. Le réalisateur prend bien le temps d’exposer la bande et leurs relations à travers le regard d’Amin, en grand observateur.
La première moitié est ainsi maîtrisée grâce à des comédiens dégageant une constante authenticité. On est facilement emporté par ces marivaudages et jeux de séduction portés par des acteurs et actrices tous magnifiques et radieux (mention spéciale à Lou Luttiau et son rayonnant sourire). Il est toutefois dommage de fréquemment voir la camera s’égarer sur le fessier d’Ophélie Bau donnant l’impression de prendre ces corps, certes sublimes, pour des objets. Puis, au bout de deux heures, le film s’embourbe dans sa mécanique. Les fiestas au sein de cette communauté maghrébine bienveillante et protectrice s’enchaînent et se ressemblent. On cherche un propos, une profondeur comparable aux précédents films du réalisateur qui ne vient réellement jamais.
Et ce n’est pas l’interminable scène de discothèque - tournant en rond à nous montrer des postérieurs se trémousser - qui arrangera les choses. Difficile de cerner l’intérêt de tirer en longueur une telle scène si ce n’est de montrer les corps et peut-être la dépravation qui y règne. Ceci parait étonnant de la part d’Abdellatif Kechiche, tant on a l’impression que le reste du film est une ode au carpe diem via notamment l’adorable personnage de la mère d’Amin. Si l’on peut interpréter que le réalisateur franco-tunisien prône un retour aux choses simples à travers l’hésitation constante puis la décision finale de son personnage principal, il manque cette touche de malaise qui était présente et si réussie dans ses précédents long-métrages. Au final, un sentiment d’inachevé prédomine, ce qui est peut-être l’intention du réalisateur puisqu’une deuxième partie aurait déjà été tournée.
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