© Pyramide Distribution
Rosa vit avec son mari Nestor et ses quatre enfants dans une petite Ă©picerie au sein dâun quartier pauvre de Manille. Pour sâen sortir financiĂšrement, elle est contrainte de faire du trafic de stupĂ©fiants. Un soir, des policiers ripoux dĂ©barquent chez eux en raison dâune dĂ©nonciation anonyme et embarquent les deux parents au commissariat. Les enfants sont dĂ©sormais les seuls Ă pouvoir payer la caution qui permettra Ă leurs parents de retrouver la libertĂ©âŠ
Aller voir en salles un film de Brillante Mendoza est toujours la promesse dâune immersion totale dans un cadre hyperrĂ©aliste, avec ce que cela peut comporter de secousses et de sensations fortes. Des travellings virtuoses dans le cinĂ©ma porno de "Serbis" jusquâĂ la longue marche tropicale de "Captive" en passant par les inoubliables ambiances nocturnes de "Kinatay", ce rĂ©alisateur philippin sait clouer son audience au fauteuil et redĂ©finir un style dâun film Ă lâautre. Dâune certaine maniĂšre, "Maâ Rosa" sera difficile Ă ranger dans cette catĂ©gorie. En optant pour la durĂ©e rĂ©elle dâune situation terrible dans les nuits agitĂ©es de Manille (comme dans "Kinatay") et en y ajoutant une nouvelle intrigue dâentraide familiale (comme dans "Lola"), Mendoza semble sâĂȘtre un peu rĂ©pĂ©tĂ© pour une fois. Reste que sa camĂ©ra rĂ©ussit encore Ă crĂ©er de puissants after-shocksâŠ
Au dĂ©but, avouons-le, il y a de quoi avoir un peu peur : entre une camĂ©ra portĂ©e qui abuse des plans instables et/ou flous (le chef opĂ©rateur a visiblement du mal Ă faire le pointâŠ) et qui va mĂȘme jusquâĂ intĂ©grer lâaction par accident (lâun des personnages se cogne involontairement Ă la camĂ©ra avec son coude !), on sent dĂ©jĂ venir le ratage pseudo-documentaire. Câest pourtant mal connaĂźtre Mendoza, artisan dâun cinĂ©ma immersif et sans concessions, qui enregistre la vie dâun quartier en donnant Ă sa camĂ©ra le relief dâun Ćil perdu, dâun tĂ©moin Ă©garĂ©, obligĂ© de se raccrocher aux informations quâil glane ici et lĂ . DâoĂč une situation en temps rĂ©el, ici traduite en des termes topographiques : arrestation dans lâĂ©picerie (scĂšne gĂ©niale), interrogatoires musclĂ©s au poste par des flics ripoux, quĂȘte monĂ©taire dans les rues de Manille par les enfants du couple arrĂȘtĂ© (vendre une tĂ©lĂ©, se prostituer, etc.). Si le film brasse lĂ encore des thĂšmes fĂ©tiches du cinĂ©aste (surtout la corruption des forces policiĂšres et lâoppression des classes sociales les plus dĂ©munies â incarnĂ©es notamment par Jaclyn Jose, prix dâinterprĂ©tation fĂ©minine Ă Cannes 2016), il tient en haleine jusquâĂ un dĂ©nouement brillant, privilĂ©giant la suspension Ă la rĂ©solution. Cela nous suffit amplement.
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