C’est le soir du Shabbat dans l’une des cités de Bat Yam en Israël. Avi, Kobi et Yaniv, trois jeunes du quartier, s’appliquent à faire respecter les règles du Talmud à tous les impies qui foulent du pied leur territoire. Justement, une bande de jeunes a décidé de camper sur un des parkings de la cité, la musique à fond. C’est l’heure des représailles…
Lauréat du prix SACD lors de la 51ème semaine de la Critique de Cannes 2012, « Les Voisins de Dieu » expose une forme d’intégrisme religieux émergeant chez les jeunes des quartiers des grandes villes d’Israël. Sur la base de guerres de territoires et de conflits d’obédience, Meni Yaesh dresse, à l’image de Scandar Copti et Yaron Shani avec leur film « Ajami », un navrant constat de la situation du pays, enlisé dans le conflit israélo-palestinien depuis presque soixante ans.
Sous couvert d’un étendard religieux, une bande de jeunes intégristes s’évertue à entretenir la haine ou le mépris qu’ils éprouvent envers ceux qui ne suivent pas les règles les plus strictes du judaïsme. Auto-proclamés gardiens de leur quartier de Bat Yam, ville juive limitrophe de Jaffa qui, elle, est à dominance musulmane, ces caïds du Talmud s’appliquent à casser la figure à quiconque refuse d’obéir aux règles qu’ils dictent. Ayant compris de travers l’enseignement religieux que pourtant le Rabbin Nahman leur inculque de manière très spectaculaire et humoristique, ces trois jeunes jouent au backgammon, un jeu arabe, boivent de l’arak, un alcool arabe et chantent leurs louanges sur de la musique à consonance arabe alors qu’ils maudissent tous ceux venant de Jaffa. C’est en faisant la connaissance de Miri, une belle et jeune israélienne non pratiquante, qu’Avi, le leader du gang, commencera à mettre de l’eau dans son vin et apprendra la tolérance. L’amour comme rempart à l’intégrisme, en quelque sorte.
Formé avec des films de gangsters américains tels que « Reservoir Dogs » ou « Les Affranchis », Meni Yaesh déploie une mise en scène percutante. Pour preuve, la séquence d’ouverture est impressionnante de maîtrise et reflète d’emblée l’orgueil démesuré de ces chiens de gardes des bonnes pratiques religieuses. Le jeune réalisateur d’origine turque a du style et n’en oublie pas pour autant ses personnages. Le reste du film est du même acabit, d’une efficacité retentissante, accompagné d’une bande son qui pulse. La musique est d’ailleurs au centre de l’histoire puisqu’Avi compose de la techno religieuse que ses amis du quartier écoutent à tue-tête.
Néanmoins, la grande force de ces « Voisins de Dieu » n’est pas dans la réalisation mais bien dans le traitement de ses protagonistes. Le film parvient à contourner un manichéisme de bas étage en évitant de dépeindre d’emblée ces trois jeunes comme de vulgaires petites frappes sans aucune ligne de conduite. Ils sont soucieux du respect des traditions tant que cela touche leur quartier et demandent toujours poliment aux mécréants d’arrêter leurs affronts. C’est finalement le perpétuel décalage entre leurs louables intentions et leurs attitudes de caïds qui rend ce premier film si intéressant à suivre, en plus des petites répliques très amusantes disséminées ici et là dans leurs évocations des textes sacrés. Au fil de ses tâtonnements quant à trouver la voie de Dieu, à travers son amour pour Miri, Avi se rendra vite compte que, quelles qu’en soient les raisons de son emploi, la violence n’est jamais vertueuse.
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