affiche film

© Kanibal Films Distribution

LES PORTES DU SOLEIL – ALGERIE POUR TOUJOURS


un film de Jean-Marc Minéo

avec : Zakaria Ramdane, SmaĂŻn Fairouze, Lorie Pester, Sofia N. Kouninef, Ahmed Benaissa, Patrice Quarteron, Amine Menster, Mike Tyson...

En ce cinquantiĂšme anniversaire de son indĂ©pendance, l’AlgĂ©rie va ĂȘtre confrontĂ©e Ă  une menace qui risque de rouvrir de profondes blessures : animĂ© par un profond dĂ©sir de vengeance, Slimane, un homme sans foi ni loi, fait renaĂźtre l’OAS de ses cendres afin de semer la terreur au sein de la sociĂ©tĂ© algĂ©rienne, aidĂ© par une tueuse Ă  gages sulfureuse et impitoyable nommĂ©e Sanya. Jawed, membre des services secrets, dĂ©cide d’intervenir en infiltrant la bande de Slimane



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Photo film

Du ciné-tajine 100% pur jus de nanar !

Pour information, le synopsis ci-dessus est Ă  peu de choses prĂšs celui qui circule en boucle sur les relais de presse Ă  propos du film. Au bout d’une heure, cela fait un bon moment qu’on a remis en cause son existence, et nos neurones sont dĂ©jĂ  partis se coucher, sans doute trop fatiguĂ©s pour arriver Ă  raisonner devant une telle « intrigue ». Parce que, oui, toutes nos attentes ont Ă©tĂ© exaucĂ©es : "Les Portes du Soleil", c’est sans conteste LE nanar de cette annĂ©e 2015, LE film qui a le pouvoir de provoquer des fous rires incontrĂŽlables Ă  chaque raccord de plan, LE film qui nous rappelle Ă  quel point ça ne tient pas Ă  grand-chose pour cuisiner un Ă©norme nanar. AprĂšs avoir essayĂ© en vain de faire passer son "Bangkok Renaissance" pour le nouveau "Ong-Bak" (on en rigole encore), l’ancien champion du monde de kung-fu Jean-Marc MinĂ©o passe donc Ă  la vitesse supĂ©rieure, avec sans doute le dĂ©sir de tourner un "Die Hard" saveur tajine, et nous offre au final 90 minutes de pur plaisir coupable, d’un niveau de nullitĂ© si stratosphĂ©rique que ça touche au sublime.

Bon, on commence par quoi ? DĂ©jĂ  le casting. Pour faire simple, en lieu et place d’un ancien de l’OAS qui sĂšme la terreur Ă  Oran, on verra juste un sous-Tony Montana algĂ©rien qui passe son temps Ă  faire la tronche, Ă  faire du vĂ©lo d’intĂ©rieur ou Ă  gueuler comme un hystĂ©rique sans qu’on sache pourquoi. Dans ce registre, Ă  force d’enfiler les mimiques outranciĂšres comme des perles, SmaĂŻn semble Ă©crire ici une trĂšs jolie lettre de motivation pour les GĂ©rards (oubliez Kad Merad dans "L’immortel", on a trouvĂ© encore plus drĂŽle !). Il est accompagnĂ© par une nana sexy en Armani qui cogne tout le monde avec ses talons aiguilles, qui flingue tout et n’importe quoi, souvent sans raison et toujours avec un rictus pas possible, visiblement parce qu’elle a Ă©tĂ© violĂ©e durant toute son enfance. Inutile de prĂ©ciser que Lorie est aussi crĂ©dible en tueuse que Bernard Menez en Terminator. Et pour leur mettre des bĂątons dans les roues, quoi de mieux qu’un frimeur Ă  lunettes fumĂ©es (en rĂ©alitĂ© un super-espion, mais on n’y croit jamais), qui marche au ralenti comme n’importe quel 2Be3 et balance des rĂ©pliques sacerdotales Ă  faire rougir notre Steven Seagal adorĂ©. Et n’oublions pas ce cher Mike Tyson, invitĂ© pendant cinq minutes pour pĂ©ter la tronche de trois idiots dans une boĂźte de nuit – on vous assure qu’il y a lĂ  de quoi faire passer "Road House" pour un mĂ©lodrame tchekhovien.

Un casting dĂ©jĂ  grandiose en soi, qui entre souvent en compĂ©tition avec tous les seconds rĂŽles pour la Palme du dialogue le plus dĂ©bile de la Voie LactĂ©e. Allez, comme on est sympas, on vous en offre un spĂ©cimen, extraite d’une conversation entre SmaĂŻn et un second rĂŽle : « Tu vois, si je t’ai demandĂ© de venir ici, c’est parce que je t’aime bien – HĂ© ho, j’ai passĂ© l’ñge pour devenir pĂ©dĂ©, alors les sentiments  ». Inutile de dire qu’on atteint lĂ  un degrĂ© rare de subtilitĂ© dans l’écriture, qui plus est avec une postsynchronisation totalement foireuse, sans doute commise par des acteurs de films pornos qui n’ont probablement mĂȘme pas vu le film. Le scĂ©nario mĂ©rite lui aussi la Palme dans l’art de meubler un vaste nĂ©ant de script avec des scĂšnes qui ne servent Ă  rien : Lorie va chez le psychiatre, SmaĂŻn va s’acheter un vĂ©lo, le hĂ©ros regarde une nana dans la vitre d’un magasin, etc
 MĂȘme quand les enjeux se rĂ©unissent enfin dans le dernier quart d’heure, c’est au prix d’un ensemble de pĂ©ripĂ©ties Ă  la limite de l’incomprĂ©hensible qui achĂšvent de prĂ©cipiter le film dans les trĂ©fonds du portnawak.

Et pour achever ce massacre narratif en beautĂ©, quoi de mieux qu’une mise en scĂšne puissamment analphabĂšte, conçue par un rĂ©alisateur qui n’a strictement aucune notion du cadre, du dĂ©coupage et de la scĂ©nographie ? DĂšs le gĂ©nĂ©rique, on hallucine : entre un montage sous taurine qui enchaĂźne de façon gratuite les coups d’obturateurs et les flashs stroboscopiques, MinĂ©o semble se prendre pour le nouveau Tony Scott, mais sans le travail d’expĂ©rimentation sur la longue focale qui faisait de "Man on fire" et de "Domino" de vĂ©ritables pĂ©pites graphiques. Ce qui en ressort n’est rien d’autre qu’une pure frime clippesque, sans aucune dimension filmique, tout juste limitĂ©e Ă  abuser des faux raccords, Ă  injecter de la soupe orientale indigeste en guise de bande-son (et dire que la moitiĂ© des Daft Punk est crĂ©ditĂ©e Ă  la BO
), Ă  filmer des cascades hautement improbables (le crash qui clĂŽt la poursuite avec la Coccinelle dĂ©fie les lois de la logique), ou Ă  charcuter chaque scĂšne d’action jusqu’à en effacer la lisibilitĂ© – la scĂšne finale est un festival d’incompĂ©tence Ă  tous les niveaux
 Non, vraiment, il n’y a rien Ă  rajouter : un grand merci Ă  Jean-Marc MinĂ©o pour ce cinĂ©-tajine 100% pur jus de nanar !

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