affiche film

© Eurozoom

LES ENFANTS LOUPS, AME ET YUKI

Okami kodomo no Ame to Yuki


un film d'animation de Mamoru Hosoda

avec : Avec les voix originales de Aoi Miyazaki, Takao Osawa, Amon Kabe…

À 19 ans, alors qu’elle étudie à la fac, Hana tombe amoureuse d’un homme-loup qui lui donne deux enfants, Yuki puis Ame, moitié humains, moitié louveteaux. Après la mort brutale de son compagnon et face aux risques représentés, en ville, par deux enfants qui se transforment à volonté en lycanthropes, Hana décide de déménager à la campagne dans une maison isolée…


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Photo film

Loup, y es-tu ?

Au Japon, les loups sont considérés comme des dieux : des sanctuaires leur sont consacrés – même s’ils ont disparu depuis un bon siècle. Pour autant, un enfant capable de se changer en loup sans prévenir, parce qu’il se met en colère ou qu’il est pris de peur, voilà qui a de quoi effrayer monsieur-tout-le-monde, même au pays du soleil levant. Sauf Mamoru Hosoda qui a fait du lycanthrope – et, au-delà, de la bête qui sommeille en chacun de nous – le véritable héros de son long-métrage d’animation. Cette fable, qui brille par son intelligence, sa subtilité et sa puissance émotionnelle, s’appuie en effet sur le vieux principe de « La Belle et la bête » pour proposer une réflexion remarquable sur la vie de famille et le dépassement des différences.

Ancien animateur de séries animées (Dragon Ball, Sailor Moon), Mamoru Hosoda a marqué les esprits avec « La Traversée du temps » puis « Summer Wars », deux œuvres où la fantaisie est progressivement intégrée à la réalité, jusqu’à modifier subtilement le cours de celle-ci. Avec « Les Enfants loups », une production plus traditionnelle, tant au niveau du récit que de sa méthode d’animation, mais qui jongle avec des thématiques proches, Hosoda s’élève largement au niveau de ses « rivaux » du studio Ghibli – dont il fut renvoyé pour divergences artistiques après avoir été à deux doigts de réaliser « Le Château ambulant ». Avec la création récente de son propre studio, Chizu, Hosoda semble lancer à Miyazaki une sympathique déclaration de guerre : l’animation émotionnelle ne sera plus l’apanage des ateliers à l’effigie de Totoro.

Dans ce conflit entre studios d’animation, Hosoda a une vraie place à prendre, et il le prouve avec une manière qui le rapproche sensiblement de son modèle Ghibli. « Les Enfants loups » n’est pas qu’une jolie fable flirtant avec le fantastique, ce qui serait déjà suffisant. C’est aussi une réflexion sur le Japon moderne, ses us et coutumes, ses inquiétudes sociales. La petite famille formée par Hana, Ame et Yuki doit franchir tous les obstacles de la vie dans notre société contemporaine, en passant par le décès du mari, l’absence du père, la marginalisation sociale, la recherche de l’autosuffisance alimentaire, la fabrication progressive et complexe du lien sociétal, etc. À travers la figuration de la transformation en loup, le cinéaste porte également son attention sur le rapport que les humains entretiennent avec leur environnement naturel et avec la part primitive qui surnage au plus profond d’eux, produisant une analogie entre la métamorphose animale et les évolutions du corps de l’adolescent, notamment au niveau de la maturité sexuelle. Lorsque Yuki agresse l’un de ses camarades de classe un peu trop hardi, elle exprime ainsi sa crainte de l’autre masculin, une peur enfantine face au développement des émotions qui réveille son atavisme.

Les deux enfants sont bientôt séparés par leur nature : quand l’une rejette sa part bestiale, parce qu’elle l’empêche de cultiver un lien social traditionnel, l’autre embrasse pleinement sa participation au règne animal, persuadé qu’il est d’avoir un rôle fondamental à jouer en tant que liant au sein de la nature. Que chacun puisse trouver sa place, ici ou ailleurs, parmi les hommes ou loin d’eux, voici la belle morale de cette histoire, aussi bien racontée par Hosoda qu’elle est intelligente et adroite. Autant de qualités qui font du cinéaste un successeur potentiel à la suprématie Miyazaki. Et comme on le dit au Japon (ou pas) : s’il y a un loup, c’est que ça vaut le coup.

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